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Brésil : résister et construire une alternative
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
https://npa2009.org/actualite/international/bresil-resister-et-construire-une-alternative
Face à l’arrivée de Jair Bolsonaro au pouvoir, l’urgence d’une riposte du mouvement ouvrier.
Dès le lendemain de son élection, Jair Bolsonaro a violemment attaqué le PT (Parti des travailleurs), le PSOL (Parti Socialisme et Liberté) et les deux grands mouvements sociaux du pays, MST (Mouvement des sans-terre) et MTST (Mouvement des travailleurs sans-toit) taxés de « terrorisme ». Les enseignantEs, accusés de propager une idéologie « communiste » et « antipatriotique », font l’objet d’une offensive en règle. Le futur gouvernement comportera une brochette de militaires et son ministre de la Justice sera Sergio Moro, le juge prétendument « anti-corruption » qui a décidé sans aucune preuve l’emprisonnement de Lula.
Face aux mesures autoritaires et répressives
Les perspectives ne sont pas moins inquiétantes sur les plans socio-économique et écologique. Le président élu promet entre autres une intensification de la déforestation en Amazonie, une vague de privatisations, une nouvelle contre-réforme des retraites, des coupes drastiques dans les programmes sociaux et, pour les salariéEs, la pure et simple suppression du 13e mois.
Le prochain gouvernement sera-t-il pour autant « fasciste » ? Bolsonaro est sans aucun doute un néo-fasciste et beaucoup de ses ministres le seront aussi. Mais sans un bouleversement des rapports de forces, il n’aura pas les moyens d’imposer une telle transformation. Rappelons qu’il n’a obtenu que 37 % des voix des inscritEs, que son parti reste peu nombreux et faiblement structuré, ne dispose que de 52 députés fédéraux sur 513 et de très peu de gouverneurs, de plus dans des États d’importance secondaire. Surtout, la grande bourgeoisie ne veut pas liquider les formes démocratiques-bourgeoises, parce qu’elle n’en a pas besoin et que le risque ne vaut pas d’être couru. Ce à quoi il faut s’attendre est un redoublement des mesures autoritaires et répressives, peut-être assorties, et lorsque de grandes luttes surgiront, d’interventions de groupes fascistes ou paramilitaires.
Le Brésil ne deviendra pas fasciste dès demain mais le danger se rapproche. N’oublions pas que Mussolini était arrivé au pouvoir en 1922 mais qu’un régime fasciste ne s’était imposé en Italie qu’en 1926. Le mouvement ouvrier et de masse – partis, syndicats, mouvements sociaux – conserve tous les moyens de faire face, et même de défaire l’agression et de passer à la contre-offensive. Pour cela, un front unique de toutes les organisations concernées, qui agisse sur les objectifs démocratiques et sociaux communs dans les quartiers, localités, entreprises et universités, par la manifestation et par la grève, serait le meilleur outil.
Une alternative politique au PT
Naturellement, un tel front unique ne devrait entraver en rien l’indépendance des révolutionnaires, plus que jamais confrontéEs à la nécessité de construire une alternative politique au PT. Ce n’est pas tant la corruption, consubstantielle de tout le système politique, qui a mené ce parti à sa perte. C’est d’abord la politique qu’il a menée, sur tous les terrains. Du néolibéralisme un peu social des deux gouvernements Lula (2003-2010) et du premier gouvernement Dilma (2011-2014), le PT est passé à une austérité dure quand le pays a sombré dans la crise suite à l’effondrement des cours des matières premières. Lorsque la bourgeoisie a jugé que même l’austérité made in PT n’était pas suffisante, qu’il fallait reprendre toutes les concessions et tous les acquis des luttes, et pour cela se débarrasser de Dilma à travers le coup d’État institutionnel de l’impeachment, le PT a refusé de mobiliser dans la rue, en faisant aveuglément confiance à la justice et aux institutions politiques en place. Même chose deux ans plus tard lors de la condamnation et de l’emprisonnement de Lula. Tout comme en avril 2017, en s’appuyant sur les principales directions syndicales, quand une grève générale contre la réforme des retraites avait bloqué le gouvernement Temer – successeur droitier de Dilma – et ouvert la -possibilité d’une contre-offensive.
Les relativement bons résultats électoraux du PSOL, un front d’organisations et courants réformistes de gauche et révolutionnaires, passé notamment de 6 à 10 députés fédéraux, apportent une lueur d’espoir dans un panorama général assombri. La gauche révolutionnaire fait face à de lourdes responsabilités. Notre solidarité politique et militante ne doit pas lui faire défaut.
Virginia de la Siega