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Lorsque 2019 à Nice nous ramène en 1986 à Paris, de Geneviève Legay à Malik Oussekine…
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
… victimes de la violence couverte et ordonnée par le pouvoir, par Macron, son préfet, son gouvernement.
Pour l’arrivée des GJ parisiens, plus nombreux que prévus après les menaces du gouvernement de faire éventuellement « tirer l’armée contre les émeutiers », cette inscription dans le jardin du sacré coeur: « 1871-2019, la commune de Paris ».
1871, la référence est adaptée pour évoquer le mouvement social actuel, son organisation, son indépendance, son aspiration à la démocratie, le plus grand mouvement social que la France a connu depuis des décennies. Mais ce samedi 23 mars, ce XIX acte des Gilets jaunes ne m’inspire pas seulement 1871. Je me retrouve en 1986, le 6 décembre exactement. Car la similitude est terrible, amplifiée par l’ignominie d’un pouvoir qui transgresse l’imaginable.
Ce 23 Mars à Nice, Geneviève Legay, 73 ans, militante portant le Gilet jaune, se trouvait place Garibaldi avec une cinquantaine de citoyens, lorsque des dizaines de CRS chargeaient, boucliers en avant, matraque en main pour cogner. La vieille dame chutait lourdement sous la pression policière. Elle se retrouvait au sol, inanimée, la tête baignant dans son sang, victime de multiples fractures du crâne et souffrant d’hématomes sous-duraux.
Le 6 décembre 1986, rue monsieur le prince à Paris, Malik Oussekine, jeune étudiant opposé à la réforme Devaquet synonyme d’augmentation des frais d’inscription, de fin des diplômes nationaux, d’université à deux vitesses, était victime des fameux « voltigeurs », cette brigade policières à moto dont le passager armé d’une trique frappait à la volée. Malik Oussekine, réfugié dans un hall d’immeuble allait être le punching-ball de policiers qui le battront à mort.
Après ce 6 décembre 1986, je parvenais à pénétrer dans la caserne de la CRS 4 qui était en action le soir fatal à Malik Oussekine. Je rencontrais alors le responsable de l’escadron motocycliste qui me livrait avec franchise son sentiment: « Dans les conditions où il était ce garçon-là, moi je serais resté chez moi si j’avais été malade comme il était lui, je pense qu’il aurait pu rester, sans parler mal, sans prendre partie, avec ce qu’il avait, je pense qu’il aurait pu rester chez lui ce jour là, il aurait évité… ». (https://www.youtube.com/watch?v=GXUOvj7irV0)
Après le 23 Mars à Nice, c’est d’abord Nicole Belloubet la garde des sceaux qui se livre, sur la ligne du policier 33 ans plus tôt: « Je trouve tout de même curieux que lorsqu’une manifestation est interdite, comme c’était le cas à Nice, quelqu’un aille absolument avec la volonté de manifester à cet endroit-là … A la suite de sommations, une personne qui y reste est susceptible de commettre un délit et c’est dans ce cadre-là que les événements se sont passés ». Puis c’est le président de la république en personne qui y va de sa petite phrase: « Quand on est fragile, qu’on peut se faire bousculer, on ne se rend pas dans des lieux qui sont définis comme interdits et on ne se met pas dans des situations comme celle-ci ».
A bien y réfléchir, 2019 n’est pas 1986. C’est pire! La nausée est totale! C’est Macron et Belloubet, Président de la république et ministre de la justice, qui reprennent les termes qui à l’époque étaient tenus par un simple CRS motocycliste. Ce qui hier était condamné par le pouvoir exécutif, de Mitterrand à Chirac, est aujourd’hui justifié, revendiqué par le pouvoir au plus haut niveau.
Macron a été élu, nous avait dit notamment les électeurs de gauche, pour éviter le fascisme. Jamais un régime n’a été aussi autoritaire. Jamais un président aussi méprisant, aussi hargneux, aussi peureux aussi. Jamais une majorité aussi veule, aussi minable, aussi servile.
Les Gilets jaunes tirent les conclusions. Malgré les menaces, malgré les coups, malgré les blessures, malgré les armes, la détermination entendue est unanimes. « On ne lâche rien! ».
Décidément l’histoire à la peau dure. « 1871-2019, vive la commune de Paris » est l’inscription dans un coin du sacré coeur qui accueillait les Gilets jaunes parisiens, et à travers eux tous les Gilets jaunes, dont la niçoise Geneviève Legay.
Jacques Cotta, le 25 mars 2019