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"Lutter contre l’extradition d’Assange, c’est lutter pour la liberté de la presse"
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
L’Humanité, 12 avril 2019
Entretien avec la députée allemande au Bundestag, Sevim Dagdelen, membre de « Die Linke », spécialisée dans les questions de droit international et de droit de la presse.
Comment réagissez-vous à l’arrestation de Julian Assange
Sevim Dagdelen : « Ce qui est important pour moi, c’est que ce ne soit pas ceux qui révèlent les crimes, mais ceux qui les commettent qui se retrouvent derrière les barreaux. En Allemagne, nous avons immédiatement appelé à une manifestation de protestation et de solidarité ce vendredi devant l’ambassade britannique à Berlin. Le 11 avril est un jour noir pour la liberté de la presse. L’arrestation de Julian Assange par les autorités britanniques est une attaque contre le journalisme indépendant.
Selon vous, qu’est-ce qui a rendu possible l’arrestation de Julian Assange ce 11 avril ?
S.D. Il s’agit clairement une décision politique. Le gouvernement équatorien apaise les États-Unis et jette par dessus bord les bases du droit international, des droits de l’homme et de la liberté de la presse. L’arrestation d’hier était évidemment soigneusement calculée. Ceux qui l’ont organisée tablaient sur le fait que l’attention du public était surtout monopolisée par les débats du Brexit. L’idée, c’était d’arrêter Assange avant les vacances de Pâques dans l’espoir que personne n’en parle beaucoup.
Pourquoi selon vous, est-ce qu’il est important de défendre Julian Assange aujourd’hui ?
S.D. Julian Assange est aujourd’hui gravement en danger. Après avoir été rapidement reconnu coupable de ne pas avoir respecté les conditions de sa mise en liberté sous caution au Royaume-Uni, il risque une peine de prison pouvant aller jusqu’à douze mois.
Dans le même temps, le ministère américain de la Justice demande déjà son extradition. Selon les déclarations du ministère, Assange est accusé de complot, il n’est donc passible que d’une peine maximale de cinq ans de prison. Mais ce sont des déclarations destinées à calmer le jeu de façon à obtenir enfin l’extradition de Julian Assange aux Etats-Unis, et à saper la solidarité qui se développe suite à son arrestation. Rien ne garantit que Julian Assange, une fois tombé entre les mains du pouvoir judiciaire de Trump, ne risque pas l’emprisonnement à vie ni même la peine de mort.
Maintenant, quiconque aime la liberté est instamment prié de se tourner vers les autorités britanniques pour obtenir sa libération.
En publiant les documents secrets sur les guerres en Irak et en Afghanistan en 2010, et exposant les crimes de guerre commis par les États-Unis, Wikileaks et Julian Assange ont réalisé un excellent travail journalistique. L’Union européenne, dont la Grande-Bretagne est toujours membre, ne peut tolérer que des journalistes soient punis pour leur travail.
Comment est-ce possible de défendre Julian Assange ?
S.D. Assange a maintenant besoin d’une large solidarité internationale. Lutter contre son extradition vers les États-Unis ne signifie rien de moins que lutter pour la liberté de la presse et la liberté d’expression. Notre tâche est maintenant de faire pression sur les autorités britanniques pour ne pas extrader Assange vers les États-Unis.
Le gouvernement allemand, les gouvernements européens, ont le devoir d’empêcher le Royaume-Uni d’extrader le journaliste.
Les principes de la liberté d’expression et de la liberté de la presse ainsi que de la protection des sources des journalistes doivent s’appliquer à Julian Assange. »
Propos recueillis par Jean-Jacques Régibier