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Billet avant même que Macron cause
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
https://aplutsoc.org/2019/04/15/billet-avant-meme-que-macron-cause/
Ce billet sur la situation politique française est écrit le matin du lundi 15 avril, alors que le président Macron doit « parler » ce soir et révéler au bon peuple les augustes décisions que lui aura inspiré le « grand débat ».
Nous serons sans doute amenés à analyser la chose, mais pourtant, nous pouvons nous permettre de ne pas attendre ce discours pour produire ce petit édito. Il y a à cela une raison de fond : l’exécutif de la V° République n’est plus, depuis fin novembre, ce « maître des horloges » que les journalistes de cour saluaient en lui.
Malgré tous ses efforts, il n’est pas parvenu à reprendre le contrôle du tempo. Le tempo est donné par les mouvements de celles et de ceux d’en bas. Depuis que, lors des journées de début décembre (les manifestations de masse des samedi 1° et 8 décembre, cherchant à s’en prendre à l’Elysée, et la « fuite à Varennes » de Macron au Puy-en-Velay le 4 décembre), le pouvoir exécutif de la V° République est devenu ce qu’il devait être : la cible de la colère populaire, non pas de façon métaphorique, mais de façon tout à fait concrète.
Depuis, outre le faux suspense de chaque samedi, concernant et les violences physiques de l’appareil d’Etat et les manifestations de gilets jaunes, les frémissements de la jeunesse, les grèves et l’ébranlement des personnels de l’enseignement public ont à leur tour déterminé le tempo.
Macron veut reprendre la main, il n’y arrivera pas. Car alors même qu’il doit « faire son discours », le tempo a un nouvel horizon qui est en train de prendre de l’importance. Le 9 mai, toutes les fédérations de fonctionnaires jusqu’à la CFDT appellent à la grève. La plupart de ces fédérations ont été conduites, par la volonté évidente de la masse des personnels (fonctionnaires mais aussi contractuels, vacataires et en CDI) de l’Etat, des collectivités locales et des hôpitaux publics, à demander le retrait du projet de loi dit de « transformation de la fonction publique » ayant pour auteur le secrétaire d’Etat dit de la Fonction publique, l’ex-PS Dussopt.
Ce projet est, avec la retraite à points, l’axe central de la poursuite de l’offensive de destruction de Macron. Il vise à détruire les statuts de la fonction publique, en généralisant le recrutement par contrats au lieu des concours et en brisant les attributions des commissions administratives paritaires, historiquement conquises en 1946.
Fin décembre, la jeunesse s’est mise en mouvement, puissamment mais momentannément, faute d’organisation dans la continuité et confrontée à une répression violente et déterminée qu’on a vu à l’oeuvre notamment dans le traitement infligé aux jeunes de M antes-la-Jolie, contre Parcoursup et les réformes du lycée, du Bac et du Bac pro.
Depuis début février les personnels enseignants des lycées et de nombreux collèges ont commencé à réagir en masse dans leurs établissements contre les suppressions de postes, les réductions de moyens, la désorganisation voulue des services par les heures supplémentaires imposées, et la réforme du lycée qui s’annonce pour exactement l’inverse de toute la publicité ministérielle en direction de « l’opinion publique » sur la soi-disant liberté de choix accordée aux jeunes.
Le mardi 19 mars une journée d’action interprofessionnelle de plus, CGT-FO-FSU-Solidaires, organisée sans enthousiasme par les directions syndicales pour faire passer le temps en fixant des échéances longtemps à l’avance, a été saisie par les personnels des écoles publiques, massivement, pour dire Non à la loi Blanquer. Cette loi est le complément de la loi Dussopt. Elle combine un autoritarisme hiérarchique ridicule, qui va dresser contre cette hiérarchie, expression de la V° République contre l’école publique, la masse des personnels, et des mesures de déréglementation dont la plus emblématique est la mise sous tutelle, pour supprimer des postes, des écoles de tel ou tel territoire, sous le principal de collège du coin.
L’addition de ces processus engagés, dans le contexte politique d’affaiblissement de l’exécutif par les manifestations populaires des samedis, est maintenant le spectre qui hante M. Blanquer, lequel réagit en qualifiant de « bobards » et de « fake news » tout ce qui circule à propos de sa politique. Il est normal qu’il réagisse ainsi, car c’est par des bobards et des fake news que, comme Macron, il a procédé jusque là.
La peur du pouvoir s’est exprimée ce dernier samedi, 13 avril, par des violences policières de massecomme à Paris et Toulouse, enfermant des centaines voire des milliers de manifestants dans des nuages de gaz en leur interdisant d’en sortir, multipliant les arrestations « préventives » de non manifestants, et ainsi de suite.
La fuite en avant de l’exécutif lui fournit aujourd’hui un arsenal juridico-administratif complété par le pur arbitraire illégal, qui lui permet potentiellement de fonctionner comme un Erdogan. Mais il est hors sol.
Et ce n’est pas un discours de Macron, ni les élections européennes, qui y changeront quoi que ce soit.
La question centrale est et reste de le chasser.
Et la prochaine étape certaine de la lutte des classes sera la réalisation de la grève générale de la fonction publique le 9 mai pour le retrait des lois Dussopt et Blanquer, posant à nouveau la question de la grève générale de toutes et de tous, depuis les entreprises, les services publics et les ronds-point.