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"Le télétravail casse les collectifs de travail, isole les salariés" par Sabina Issehnane
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
"Le télétravail casse les collectifs de travail, isole les salariés" par Sabina Issehnane (qg.media)
Le télétravail a le vent en poupe depuis le covid et les multiples confinements instaurés en France depuis plus d’un an, avec une incitation gouvernementale importante. Si pour les entreprises les avantages semblent importants, en est-il de même pour les salariés ? Rien n’est moins sûr pour Sabina Issehnane, membre des Économistes atterrés, qui a répondu aux questions de Jonathan Baudoin pour QG
Le télétravail a le vent en poupe depuis le covid et les multiples confinements ou semi-confinements instaurés en France depuis mars 2020, avec une forte incitation gouvernementale. Si pour les entreprises, les avantages sont importants, notamment pour réduire les coûts tout en maintenant l’activité, en est-il de même pour les salariés ? Pour QG, Sabina Issehnane, économiste et membre du collectif les Économistes atterrés, indique à quel point tous les salariés ne sont pas logés à la même enseigne face au télétravail, qui concerne en grande partie les cadres. Les risques de dégradation des conditions de travail se voient en effet accrus, et le télétravail renforce le patronat face aux salariés, accentuant l’isolement de ces derniers et l’incapacité des syndicats à les défendre. Interview
Sabina Issehnane, économiste, chercheure associée au Centre d’études de l’emploi et du travail (CEET) et membre du collectif les Économistes atterrés
QG : Peut-on dire que le covid a permis un développement sans précédent, et surtout durable, du télétravail en France ?
Sabina Issehnane : Une étude de la Dares, le service statistiques du ministère du Travail, parue en 2019, a permis de rendre compte de l’ampleur du télétravail en France avant la pandémie. Il faut savoir que pendant très longtemps, on a fait croire que le télétravail allait se développer de manière très importante, mais ça restait en réalité très marginal. Il était principalement développé chez les cadres et concernait très peu de personnes. Selon cette étude, seuls 3% des salariés étaient en télétravail au moins un jour par semaine et 4% en télétravail au moins une fois par mois. Ce chiffre montait à 11% chez les cadres. Le télétravail était donc très marginal au sein des entreprises françaises et de la fonction publique en France, et concernait surtout des salariés ultra-qualifiés. Lors de la pandémie, on a également vu que le télétravail ne concernait pas tous les salariés, seulement certaines catégories en ont largement bénéficié. Si on prend le premier confinement, qui a concerné plus d’un tiers des personnes en emploi, le télétravail a concerné majoritairement des cadres et des professions intellectuelles supérieures, puis dans une moindre mesure, des employés et quasiment aucun ouvrier. On a donc un télétravail qui ne s’est pas développé de la même manière depuis le covid. Mais celle-ci a permis de développer de manière extrêmement importante le télétravail en France.
QG : Une fois que cette crise du covid sera passée, y aurait-il une pérennisation de cette situation en France, selon vous ?
De la même ampleur, j’en doute. Néanmoins des conséquences de la crise perdureront. Il faut savoir que le télétravail a été encadré par les ordonnances Macron de 2017, mais ce n’est pas une obligation pour le salarié d’y avoir droit. Un accord collectif est censé être mis en place, ou à défaut une charte entre l’employeur et les salariés. En l’absence d’un accord, il faut qu’il y ait une formalisation qui s’opère. Il ne doit plus être obligatoirement mentionné dans le cadre du contrat de travail, ou d’un avenant à ce contrat, mais il peut prendre la forme d’un simple courriel. Il faut rappeler qu’il n’y a pas d’obligation pour l’employeur d’accorder un télétravail à ses salariés. Lorsqu’on regarde ce qui s’est passé avant et pendant la pandémie, on voit que la situation s’est mieux passée dans les entreprises qui avaient déjà des accords collectifs de télétravail. Que ce soit en matière de durée du travail, de travail atypique, d’horaires de travail le soir ou le week-end, ou de santé au travail. La situation a été meilleure pour les salariés encadrés par un accord collectif.
« En 2019, seuls 3% des salariés étaient en télétravail au moins un jour par semaine, selon une étude de la Dares »
QG : Plusieurs études ont relevé que le télétravail comporte des risques sur la santé physique et psychique des salariés. Est-ce pris en compte dans la réflexion économique ?
Les études se sont en effet intéressées au risque du télétravail en matière de conditions de travail et de risques psycho-sociaux. Les données de 2019 portant sur un télétravail regardaient les effets sur la santé des travailleurs. Toute la question qui se posait à l’époque était : « Est-ce le télétravail qui a accentué les problèmes de santé au travail des personnes concernées, ou sont-ce les personnes qui avaient déjà des problèmes dans leur entreprise, en termes d’organisation du travail, de problèmes de handicap ou de santé au travail qui demandaient à avoir une organisation en télétravail? ». Les résultats statistiques qui en sont sortis montrent que les personnes en télétravail se déclarent généralement en moins bonne santé et présentent des risques dépressifs plus importants, mais il était difficile d’en déduire un lien de causalité. Je rappelle qu’il s’agit d’une étude faite avant la pandémie, avec un télétravail peu développé. Avec la pandémie, les confinements et le télétravail conjugués, ont cassé les collectifs de travail, et davantage isolé les travailleurs. Certains ont eu des durées de travail plus importantes, avec un travail plus intensif, avec des problèmes de conciliation vie familiale/vie professionnelle, avec la fermeture des écoles, la fermeture des crèches, avec des inégalités hommes/femmes qui se sont accentuées via le télétravail, avec l’augmentation du travail domestique pour beaucoup de femmes, et bien sûr de la charge parentale. On observe une déclaration plus importante de personnes en moins bonne santé, ayant des risques dépressifs et des risques psycho-sociaux plus importants. Après, est-ce que c’est un effet du confinement, ou du télétravail généralisé ? C’est toujours difficile de prouver formellement un tel lien de causalité dans une situation post-Covid ou post-confinement, même si la situation semble partie pour perdurer. Ce qui est sûr c’est que la crise sanitaire s’est accompagnée d’une intensification du travail et d’une aggravation des risques psycho-sociaux. Une étude qui vient d’être publiée par la DARES suite à une large enquête le montrait le 28 mai dernier. Plus de 40% des personnes ayant un emploi déclarent une dégradation de leurs conditions de travail depuis la crise sanitaire.
« Plus de 40% des personnes ayant un emploi déclarent une dégradation de leurs conditions de travail depuis la crise sanitaire. »
QG : Avec le télétravail, y a-t-il à craindre un transfert de certains frais (électricité, internet, etc.) de l’entreprise vers les salariés ?
Il y a effectivement un risque élevé d’observer des charges plus importantes pour les salariés, et cela même si des économies peuvent être réalisées du fait de la réduction du temps de transport. Avant le confinement, on avait vu que les salariés qui étaient davantage en télétravail étaient issus des grandes agglomérations, avec des temps de trajet plus longs pour aller au travail. Il faut donc tout de même noter aussi des gains environnementaux. Mais le télétravail génère incontestablement des coûts plus importants pour les travailleurs qui n’ont pas été pris en charge par les entreprises.
QG : Peut-on dire, également, que le télétravail atomise encore plus les salariés et affaiblit les capacités des syndicats, par ricochet ?
On peut le dire, en effet. D’ailleurs, les travaux de la sociologue Danièle Linhart sur la question le montrent très bien. Le télétravail casse les collectifs de travail, isole les salariés. Il rend les salariés plus vulnérables et plus fragiles. D’une certaine manière, pour reprendre les mots de Danièle Linhart, le télétravail rend les salariés plus sujets aux liens de subordination. Le télétravail réduit la capacité des salariés à se défendre et à créer un collectif qui permet de résister.
Propos recueillis par Jonathan Baudoin
Sabina Issehnane est économiste, maître de conférences à l’Université de Paris, chercheure associée au Centre d’études de l’emploi et du travail (CEET) et membre du collectif les Économistes atterrés