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Illusions perdues, de Xavier Giannoli
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Illusions perdues, de Xavier Giannoli | L’Anticapitaliste (lanticapitaliste.org)
Film français, 2h30, sorti le 20 octobre 2021.
Dans l’atmosphère réactionnaire qui règne en France sous la Restauration, le jeune Lucien Chardon, qui tient à se faire appeler de Rubempré, du nom de sa mère, et a des ambitions poétiques, quitte Angoulême pour venir tenter sa chance à Paris, au côté de sa protectrice Louise de Bargeton. Mais arrivée à la capitale, celle-ci abandonne avec tristesse son amant dont les origines roturières pourraient lui nuire dans cette haute société où les nobles s’acharnent à effacer le souvenir de la Révolution.
Une société où la bourgeoisie assoit sa domination
Livré à lui-même dans la grande ville, le jeune homme pauvre découvre le milieu de la presse puis s’y intègre avec brio car il a du talent pour les formules frappantes qui peuvent démolir une personne ou une œuvre, tandis que ses scrupules s’évanouissent progressivement. Il découvre un milieu voué à la loi du profit et des faux-semblants, où les journalistes servent avant tout à faire gagner de l’argent aux actionnaires tout en se servant le mieux possible au passage. Pour cela, il ne faut pas avoir de scrupule et accepter de vendre sa plume au plus offrant et ne pas hésiter à répandre des « canards » (les fake news de l’époque). Il faut avoir des adversaires car cela suscite les controverses et une bonne controverse fait vendre. Après divers épisodes, Lucien perd peu à peu ses illusions et quitte Paris.
Xavier Giannoli a, bien sûr, pris des libertés avec le livre et concentré son film sur la deuxième partie du roman de Balzac, négligeant largement les épisodes qui se déroulent à Angoulême (et la rencontre qui permettra à Lucien de rebondir). Servi par d’excellents acteurs et actrices, il décrit une société où la bourgeoisie assoit sa domination, en centrant son scénario sur une presse soumise à l’argent et qui fait irrésistiblement penser aux réseaux sociaux et à certaines chaines d’information actuelles.
Marx et Engels étaient de grands admirateurs de Balzac qui, tout réactionnaire qu’il fut, mettait à nu dans ses romans les ressorts de la société bourgeoise, cette société qui, pour reprendre la formule du Manifeste communiste, « a noyé les frissons sacrés de l’extase religieuse, de l’enthousiasme chevaleresque, de la sentimentalité petite-bourgeoise dans les eaux glacées du calcul égoïste ».