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    Big Data a vaincu Big Brother : On a lu "Thanatocapitalisme" de Byung-Chul Han

    Lien publiée le 10 novembre 2021

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    Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

    Big Data a vaincu Big Brother : On a lu "Thanatocapitalisme" de Byung-Chul Han (marianne.net)

    Quatrième livre du philosophe allemand d'origine sud-coréenne Byung-Chul Han publié par les Presses universitaires de France, « Thanatocapitalisme » réunit essais et entretiens. Une introduction aux grands axes de sa pensée : nouvelles technologies et Big Data, l'étranger et l'hospitalité, transparence, ou encore rapport contemporain au temps, à la vie et à la mort à l'ère de l'hypercapitalisme.

    Le capitalisme, qui ne produit qu'en détruisant, est une « négation de la mort » pointe Byung-Chul Han, dans le texte « Capitalisme et pulsion de mort ». Citant Bernard Maris (« La grande ruse du capitalisme […] est de canaliser, de détourner les forces d'anéantissement, la pulsion de mort vers l'anéantissement »), auteur d'un ouvrage du même nom, l'Allemand « [défend] la thèse selon laquelle l'idée de la pulsion de mort chez Freud représente au bout du compte une stratégie inconsciente pour refouler la mort ». Cela se manifeste, analyse-t-il, par « [l]a séparation entre la vie et la mort, constitutive de l'économie capitaliste, [qui] produit la vie fantôme, la mort-dans-la-vie. Le capitalisme génère une pulsion de mort paradoxale, car il prive la vie de la vie. Ce qui est mortel, c'est sa quête de vie sans mort. »

    Plus loin, dans un autre essai, il évoque ainsi ce sentiment de vide, commun, qui conduit certains jusqu'à l'automutilation. Mais le constat a été illustré aussi par l'absurde « gestion » politique du Covid qui, privant chacun de ce qui fait que la vie vaut d'être vécue, a défendu la vie se résumant à la persistance biologique. Suivant le philosophe Theodor Adorno, il écrit d'ailleurs que « la santé est une idéologie du capital, mieux qu'elle est une maladie. L'hystérie de la survie défigure la vie. » Pour Byung-Chul Han, « [i]l faut élever au niveau de la conscience le fait que la vie n'est vivante que dans l'échange avec la mort, que la récusation de la mort détruit tout présent vivant […]. Approuver la vie, c'est aussi approuver la mort. La vie qui nie la mort se nie elle-même. »

    PLUS BESOIN DE STASI

    Dans « Pourquoi aucune révolution n'est possible aujourd'hui », texte inspiré d'un débat avec Toni Negri, Byung-Chul Han affirme que le capitalisme n'est pas (plus) un système économique vertical ou autoritaire « extérieur », mais un système « intériorisé », voire une anthropologie. Et qu'il génère d'autant moins de désirs révolutionnaires ou d'opposition que « le sujet soumis n'est même pas conscient de sa soumission. Il s'imagine en liberté [...]. La domination qui réprime et attaque la liberté n'est pas stable. Si le régime néolibéral est si stable, s'il s'immunise contre toute résistance, c'est parce qu'il fait usage de la liberté au lieu de la réprimer. »

    Le rapport des usagers au numérique illustre cette « crise de la liberté ». Si dans les années 1980, de nombreux manifestants se sont opposés au recensement, « aujourd'hui, nous livrons des données personnelles beaucoup plus massives ». Plus besoin de Stasi quand « la peur de perdre sa sphère privée et intime laisse place au besoin de l'afficher sans la moindre honte » : Big Brother est vain au temps de Big Data où « [l]a liberté ressentie est un contrôle. »

    Dans l'économie psychique produite par le capitalisme, « l'étrangeté est éliminée parce qu'elle entrave l'échange global du capital et de l'information », écrit-il. Ainsi l'auteur soulève-t-il un paradoxe, aussi bien pour l'extrême droite que les néogauchistes identitaires : « Nous vivons dans une société entièrement orientée vers la production et vers la positivité. Elle abolit la négativité de l'autre ou de l'étranger pour accélérer les cycles de la production et de la consommation. Seules sont tolérées les différences consommables. L'autre, celui auquel on ôte son altérité, on ne peut pas l'aimer, uniquement le consommer [...]. On sent un enfer de l'identique et l'on aimerait y échapper. »