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    "Ce procès est une farce !". Invectives, colères et évacuation lors de la condamnation de 7 militants "ultragauche"

    Lien publiée le 22 décembre 2023

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    Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

    « Ce procès est une farce ! » Invectives, colères et évacuation lors de la condamnation de 7 militants d’« ultragauche » (nouvelobs.com)

    Sept personnes issues des milieux anarcho-libertaires ont été condamnées ce vendredi 22 décembre à des peines allant de deux ans de prison avec sursis à cinq ans de prison ferme, dont trente mois avec sursis probatoire. L’énoncé de la décision a donné lieu à plusieurs incidents dans une atmosphère parfois surréaliste.

    Ce procès est une farce ! » Invectives, colères et évacuation lors de la  condamnation de 7 militants d'« ultragauche »

    Des cris, des chants anarchistes, des refus d’obtempérer aux ordres des policiers : il flotte ce matin un parfum de révolte dans les travées de la salle Victor-Hugo du palais de justice de Paris. Une foule importante est venue prendre connaissance de la décision rendue par la 16e chambre du tribunal correctionnel dans l’affaire dite « du 8 décembre », où 7 personnes issues des milieux anarcho-libertaires étaient poursuivies pour association de malfaiteurs terroristes. La présidente du tribunal commence à lire son délibéré, et assez vite il ne fait aucun doute que les prévenus seront tous condamnés. Des bancs du public jaillissent les premières invectives : « Vous mentez ! »« La honte ! »« C’est vous les terroristes ! ».

    Furieuse, la présidente ordonne aux forces de l’ordre de faire évacuer la salle, avant de suspendre l’audience et de sortir, escortée de ses deux assesseures. Ce n’est pas la première fois, au cours de ce procès, qu’elle agit ainsi. Mais il se passe cette fois-ci un étrange phénomène : tandis que les policiers quadrillent la salle et demandent au public de « partir tranquillement », personne ne bouge. Camille B., seule femme parmi les prévenus, s’interpose, bras croisés, devant son frère et sa mère. « Ma famille ne partira pas d’ici », dit-elle avec fermeté à un policier.

    Déboussolés par cette résistance, les forces de l’ordre tentent de convaincre les journalistes. « On va commencer l’évacuation par vous. » Aucun représentant de la presse ne se lève. La salle entonne un chant pour la liberté, et, ça et là, on entend des mots d’ordre, des slogans : « Etat fasciste ! »« A bas l’Etat policier ! ».

    Pendant ce temps, les prévenus et leurs avocats se sont retrouvés au milieu de la salle, plongés dans un long conciliabule afin de savoir quelle suite donner aux événements. On pense à des conjurés durant la Révolution française. Les policiers semblent perdus : doivent-ils employer la force pour faire respecter la décision de la présidente ? Des renforts sont appelés. Il y a, l’espace d’une heure, le sentiment grisant d’une vacance du pouvoir, comme si cette petite foule (une centaine de personnes tout au plus) était soudain en mesure de faire dérailler le cours inéluctable de la justice (ou de l’injustice).

    Raphaël Kempf, l’avocat de Florian D., le principal prévenu, annonce que la présidente du tribunal refuse de recevoir les avocats. Exclamations, sifflements. Puis Camille B. s’extrait du cercle à son tour. La voilà qui harangue la foule : « Ce procès est une farce ! La meilleure façon d’en sortir la tête haute, c’est de quitter tous ensemble cette audience qui ne sert à rien ! » Longs applaudissements.

    « Vous n’avez jamais pensé à désobéir »

    Tandis qu’un homme en tee-shirt distribue de la pâte de coing au public, au premier rang, une jeune femme interpelle deux policiers : « Vous n’avez jamais pensé à désobéir ? » Le premier hausse les épaules quand le second répond : « Si vous me payez mon crédit immobilier, je veux bien y réfléchir. Il faut bien casser sa croûte ». « Vous diriez quoi si c’était vos enfants qui étaient jugés ? », le relance une vieille femme. « Eh bien je ne serai pas fier d’eux ! ».

    Entretemps, les conjurés ont changé leur fusil d’épaule : tous veulent éviter un mandat de dépôt à l’issue de l’audience. Ils choisissent donc de calmer le jeu. Florian D. l’annonce lui-même : « On va laisser nos familles rester ici avec nous, et on va voir si ces braves policiers oseront les gazer. » Le gros des troupes est prié de quitter la salle.

    Reste désormais une quarantaine de personnes. La tension est redescendue d’un cran. La présidente réapparaît. On croit à un dénouement. Las !

    « Je m’étonne que la salle soit encore si nombreuse, dit-elle. Je ne veux pas qu’il y ait de nouveaux débordements. Aussi je demande à chacun des prévenus de choisir trois membres de sa famille autorisés à rester dans la salle. » Et la magistrate de repartir aussi sec.

    Guerre d’usure entre la présidente et les prévenus

    Cette fois-ci, plus de slogans, plus de mots d’ordre : tout le monde est sagement assis à sa place et personne n’entend quitter la salle. « Tant qu’il y aura plus de 21 personnes dans la salle, l’audience ne reprendra pas », insiste un policier. En vain. Sur les bancs, on note la présence de Julien Coupat, qui fut relaxé dans un procès similaire et non moins spectaculaire, celui de l’affaire de Tarnac en 2018. « Désormais, le gauchisme est une forme de terrorisme », constate-t-il avec amertume. Avant de provoquer les rires de la foule, quand il apostrophe le procureur de la République : « Monsieur le procureur, lisez-nous le jugement, c’est le vôtre ! »

    Entre la présidente et les prévenus, la guerre d’usure aurait pu durer encore longtemps. Une demi-heure plus tard finalement, la première revient, dénonçant les propos « injurieux et outrageants » dont le tribunal a fait l’objet. Puis d’énoncer, sans en livrer les justifications, et dans un silence à peine troublé cette fois-ci par quelques soupirs de mécontentement, les peines infligées aux prévenus, de deux ans de prison avec sursis à cinq ans de prison ferme dont 30 mois avec sursis probatoire pour Florian D. Des peines, pour deux d’entre elles, plus lourdes que celles requises par le parquet national antiterroriste. Dans la salle Victor-Hugo, le parfum de révolte a laissé place à la gueule de bois. Restent, parmi la foule, la colère et l’abattement. Et, surtout, un profond sentiment d’injustice.