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    Pour les migrants aussi, le gouvernement promet un «choc de simplification»

    Lien publiée le 25 avril 2013

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    Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

    (Mediapart) « La fermeté n’est pas la fermeture », a lancé Manuel Valls, le ministre de l’intérieur, pour ouvrir le débat au Sénat sur l’immigration professionnelle et étudiante qui s’est tenu le 24 avril dans la soirée. Promis par François Hollande lors de la campagne présidentielle, ce rendez-vous annuel – une première – doit se poursuivre à l’Assemblée nationale le 29 mai. Une dizaine d’orateurs représentant l’ensemble des groupes politiques se sont succédé à la tribune, dans un climat serein, qui peut s’expliquer par l’absence d’échéances électorales immédiates, sur un sujet pourtant propice à la polémique.

    Ce débat, sans vote, a été l’occasion pour le gouvernement de dévoiler ses intentions en matière d’immigration professionnelle et étudiante, alors qu’un projet de loi sera présenté « dans quelques semaines ». « La France est belle car elle est diverse. Elle a mille visages », a entamé le ministre de l’intérieur, rappelant que 19 % des personnes vivant en France sont des immigrés ou des fils ou filles d’immigrés. « L’immigration doit répondre aux besoins de notre économie et permettre le rayonnement de notre pays dans le monde », a-t-il aussitôt enchaîné se défendant de tout « angélisme ». « Nous connaissons les peurs, les pulsions qui peuvent exister », a-t-il indiqué en référence aux « sondages d’opinion ».

    « Réalisme », « pragmatisme » : sa vision utilitariste va de pair avec l’idée que « pour être acceptée l’immigration doit être maîtrisée et contrôlée ». Pour lutter contre « les clichés, les raccourcis, les outrances », il a rappelé les évolutions des principaux flux migratoires, stables au cours des dernières années. En 2012, selon les chiffres officiels, un total de 193 655 titres de séjour ont été délivrés, parmi lesquels 59 000 à des étudiants et 17 000 à des salariés. Les 100 000 autres personnes sont venues dans le cadre de l’immigration familiale, pour des raisons de santé ou pour des motifs humanitaires. Elles peuvent elles aussi accéder au marché du travail. Cet apport, comme le souligne le rapport du Secrétariat général à l’immigration et à l’intégration préparé en vue du débat parlementaire, est « circonscrit en volume et bien encadré ».

    Manuel Valls partage avec l’exécutif précédent la conception selon laquelle les travailleurs étrangers doivent venir à condition qu’ils aient décroché un contrat de travail en France, à la différence de ce qui se passe dans certains pays, comme le Canada, l'Australie ou la Nouvelle-Zélande où les immigrés sont sélectionnés en fonction de leur potentiel. Mais le ministre de l’intérieur se démarque néanmoins de la politique d’« immigration choisie » mise en place par Nicolas Sarkozy. Devant les sénateurs, il a souligné que l’immigration familiale ne peut être qualifiée de « subie », selon l'expression utilisée au cours du quinquennat passé, car elle résulte de ce que la France, en tant qu’État de droit, respecte les conventions nationales et internationales garantissant le respect de la vie privée et familiale.

    Les flux d’entrées étant modestes comparativement à ceux observés dans les pays de développement économique de même ordre, Manuel Valls et, dans son sillage, bon nombre d’intervenants ont souligné le retard pris par la France en matière d’attractivité. « Si nous restons avec notre droit complexe, nous serons dépassés », a-t-il affirmé promettant des règles « plus stables, plus lisibles, plus simples ».

    Reprenant les annonces faites récemment avec la ministre de l'enseignement supérieur Geneviève Fioraso, il s’est engagé à généraliser les titres de séjour pluriannuels afin d’éviter chaque année les renouvellements qui engorgent les préfectures et font perdre du temps à tout le monde. Notant le foisonnement des titres de séjour – pas moins de 15 différents coexistent –, il a jugé nécessaire une refonte. En ce qui concerne les listes de métiers en tension, pour lesquels les employeurs peuvent recruter plus facilement des étrangers, le ministre a reconnu que « personne ne s’y retrouve » et envisagé une actualisation des besoins à l’échelle des régions avec les partenaires sociaux. Le système actuel est « illisible », a-t-il insisté, en raison de son incohérence, les Sénégalais, les Camerounais et les Gabonais, par exemple, n’ayant pas accès aux mêmes métiers en fonction des accords bilatéraux qui ont été signés avec leur pays d’origine. À propos des étudiants, il a martelé que « la France ne doit pas rester à la traîne ». « Nous perdons du terrain, alors que les flux d’étudiants augmentent partout dans le monde », a-t-il alerté.

    « Une France qui s’ouvre est une France qui se renforce »

    L’Allemagne a souvent été citée. Geneviève Fioraso a rappelé que ce pays venait de dépasser la France en matière du nombre d’étudiants accueillis. « Nous sommes passés de la 3e à la 5e place, notre position est fragile, les meilleurs étudiants en sciences se détournent », s’est inquiétée la ministre dénonçant les « ravages » de la politique mise en œuvre par Nicolas Sarkozy et en particulier la circulaire Guéant, supprimée dans la foulée de l’élection de François Hollande.

    À la défiance s’ajoute, selon elle, la complexité des démarches. « Notre réputation a été durablement entachée, nous devons inverser la tendance », a-t-elle estimé, s’engageant à créer des titres pluriannuels pour les étudiants, à leur permettre de travailler pendant un an après l’obtention de leur diplôme, à améliorer leurs conditions de vie et à attribuer aux doctorants des visas permanents rendant possibles des visites régulières. Elle a fixé deux priorités : se tourner vers les pays émergents et poursuivre les relations avec les pays d’Afrique et notamment subsahariens où, a-t-elle fait remarquer, « la Chine est de plus en plus présente ».

    « Une France qui s’ouvre est une France qui se renforce », a-t-elle souligné. Sans trancher la question des droits d’inscription, que certains voudraient augmenter pour les étudiants étrangers, elle a considéré qu’il ne fallait pas exagérer l’afflux de devises que cela pourrait générer et rappelé que le niveau peu élevé des frais constituait justement un élément d’attractivité dont le pays ne pouvait pas forcément se passer.

    Ex-ministre de l’éducation nationale et ex-ministre de l’intérieur, Jean-Pierre Chevènement, au nom des radicaux de gauche, a salué de « très bonnes orientations » qu’il a jugées « cohérentes avec le pacte de compétitivité ». Dans son sillage, André Reichardt, pour l’UMP, a reconnu un « large consensus » à propos des étudiants étrangers « indispensables pour gagner la bataille du soft power ». Il s’est même payé le luxe d’évoquer la nécessité d’une politique « généreuse », sans toutefois oublier de mentionner les 3 milliards d’euros que coûterait leur accueil aux finances publiques, laissant entendre qu’il n’était pas défavorable à une hausse des frais d’inscription. « L’immigration contribue à l’accroissement de notre richesse », a-t-il admis, plaidant en faveur d’une politique « maîtrisée, utile pour notre pays ».

    Esther Benbassa, du groupe écologiste, s’est elle aussi déclarée favorable à une « forme de participation en fonction des ressources » et a défendu l’idée d’enseignements dispensés en anglais. Tous se sont prononcés en faveur d’un « choc de simplification » concernant les démarches administratives à effectuer.

    Dans cette ode à la « mobilité » et à l’« attractivité », quelques voix se sont élevées pour rappeler la présence sur le territoire de centaines de milliers d’étrangers en situation irrégulière. Cécile Cukierman, du groupe communiste, a demandé la régularisation de ces sans-papiers, qui vivent en France, travaillent et parfois paient des impôts. Elle a estimé bienvenu ce débat, mais, appelant de ses vœux une réforme en profondeur du Code de l’entrée et du séjour, elle a regretté l’immobilisme, voire le renoncement du gouvernement en matière de droits des étrangers. Quant à Barisa Khiari, du groupe socialiste, elle a souligné l'effort d’« inclusion » à réaliser en direction des femmes immigrées nombreuses à travailler ou à vouloir le faire sans en avoir la possibilité.

    Quels que soient leurs désaccords, les orateurs se sont félicités de la tonalité « apaisée » des échanges, comme si, après les débordements auxquels a donné lieu l'examen du projet de loi sur le « mariage pour tous », ils se trouvaient presque surpris de pouvoir de nouveau discuter sans s'injurier.