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    Roumanie: ruée sur les terres agricoles

    Lien publiée le 3 juillet 2013

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    Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

    (Le Monde) Une baraque fait office de bureau. Plantée au milieu des champs à proximité du village de Bujoru, dans le sud de la Roumanie, on la distingue à peine depuis la route. "Elle m'a coûté 500 euros", explique Christophe de Beukelaer avec un clin d'oeil. Depuis son plus jeune âge, il rêvait d'avoir sa ferme, mais, en France, les possibilités n'étaient pas à la hauteur de ses ambitions. En 2004, il s'installe dans le village de Bujoru à la tête d'une ferme de 1 200 hectares. "Ici, l'accès au foncier est très facile, explique l'agriculteur, originaire de la Haute-Marne. Par rapport à la France, on a une grande liberté. Aujourd'hui, j'ai 1 200 hectares parce que j'ai les moyens financiers d'acheter cette superficie, mais avec un peu plus d'argent, j'aurais pu acheter 5 000 ou 10 000 hectares. En France, la place est prise, c'est fini."

    Avec ses 15 millions d'hectares de terrains agricoles, qui se vendent en moyenne 2 000 euros l'hectare (le prix moyen des terrains agricoles français était de 5400 euros l'hectare en 2012), la Roumanie attire comme un aimant. De nombreuses parcelles sont depuis longtemps au repos, car après la chute de Ceaucescu en 1989, elles n'ont guère été exploitées. Les paysans, qui représentent 50 % des 19 millions de Roumains, avaient récupéré ces terres nationalisées par le régime communiste mais, sans moyen de les exploiter à l'occidentale, ils ont pratiqué une agriculture de subsistance, laissé de grands terrains en jachère.

    LES AGRICULTEURS OCCIDENTAUX À LA CONQUÊTE DE L'EST

    Outre les prix imbattables des terrains, la Roumanie bénéficie de subventions de Bruxelles. C'est pourquoi des milliers d'agriculteurs occidentaux sont partis à la conquête de l'Est : Français, Suisses, Allemands, Italiens, Néerlandais, Autrichiens, Britanniques et même Danois ont, depuis 2007, date d'entrée de la Roumanie dans l'UE, pris d'assaut les vastes terres du pays. "Grâce aux investissements étrangers, l'agriculture roumaine offre de bonnes perspectives, assure Cecilia Alexandri, chercheuse à l'Institut d'économie agricole de Bucarest. Les nouveaux agriculteurs apportent du capital, des outils et un savoir-faire. Ils sont aussi un exemple pour les agriculteurs roumains qui commencent à adopter leurs méthodes de travail."

    Le phénomène risque même de s'accélérer. Conformément au traité d'adhésion signé avec l'UE, la Roumanie devra, à partir de 2014, permettre à tout citoyen européen d'acheter des terres agricoles. Aujourd'hui, la procédure est plus compliquée : il faut commencer par créer une société sur place. Cet obstacle supprimé, le prix des terrains risque d'exploser. Les paysans roumains se retrouveront en concurrence avec les arrivants de l'Ouest, alors que leurs moyens sont bien plus faibles. La Roumanie n'a utilisé qu'environ 15 % des 32 milliards d'euros d'aides accordés par la Commission européenne pour la période 2007-2013, notamment pour soutenir son agriculture.

    L'Eglise orthodoxe roumaine a décidé de s'impliquer dans les affaires européennes en demandant à ses 14 000 popes de convaincre les paysans d'accepter la manne de Bruxelles. "Les paysans sont très méfiants quand on leur offre quelque chose gratuitement, comme c'est le cas pour les fonds européens, explique le porte-parole de l'Eglise, Constantin Stoica. Seul Dieu semble pouvoir gagner leur confiance." Pendant ce temps, les agriculteurs occidentaux commencent à prendre les rênes de l'agriculture roumaine. Christophe de Beukelaer est certain d'avoir fait un pari fructeux. "Je pense que le prix des terres en Roumanie va monter jusqu'à 3 000 ou 4 000 euros l'hectare dans les années à venir", affirme-t-il. Avis aux amateurs.