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Élections européennes du 9 juin : Pour s’opposer au macronisme, à l’extrême-droite et à la gauche bourgeoise, mobilisons-nous pour le succès de la France Insoumise !
L’élection européenne du 9 juin revêt une importance particulière : c’est la dernière élection nationale (avec des listes nationales) avant les prochaines élections présidentielles et législatives. Malgré le poids du contexte de crise et de tensions internationales, les enjeux politiques nationaux seront prépondérants. En faisant de l’élection européenne le « premier tour de l’élection présidentielle », Mélenchon est bien conscient qu’il ne peut pas minimiser l’importance de cette élection difficile pour la France Insoumise : dans un contexte de stigmatisation exacerbée de LFI, un faible score de LFI serait beaucoup plus handicapant qu’en 2019. Pour autant, est-il possible que LFI soit cette première force ?
Une élection importante pour LFI
La France Insoumise a décidé de faire de cette élection une bataille politique centrale. L’enjeu est de rester la force dominante à gauche, en cherchant à mobiliser sa base électorale qui, pour l’instant, est la plus démobilisée dans la mesure même où elle est populaire et jeune. Il faut dire que le contexte est très compliqué, avec des médias dominants qui désignent l’organisation LFI comme l’ennemi intérieur, dédiabolisent le RN et déroulent un agenda quotidien réactionnaire. Un an après la défaite de la mobilisation contre la réforme des retraites et suite à la répression massive des jeunes des quartiers populaires engagés dans les émeutes consécutives à l’assassinat du jeune Nahel au début de l’été 2023, le climat a changé et complique la tâche de la France Insoumise.
Dans un premier temps, LFI a tendu la main aux autres forces de la NUPES, continuant dans sa stratégie illusoire d’unité de la gauche, que nous dénoncions déjà lors des législatives de 2022. En proposant à EELV de prendre la tête de liste, LFI a essayé de faire croire que les divergences exprimées durant les différentes séquences de lutte de classe en France ainsi que sur les questions internationales n’étaient pas suffisamment profondes pour empêcher une unité d’action dans les élections. Le fantasme de l’unité a fait long feu et la réalité de la campagne qui s’ouvre montre que les désaccords sont en fait très importants.
À juste titre, LFI combat fermement la liste du PS emmenée par le libéral atlantiste Raphaël Glucksmann. Sa campagne, soutenue par les médias dominants, connaît une certaine dynamique et permet de valider l’hypothèse qu’il puisse apparaître comme le grand gagnant « à gauche » de ces élections. Mais elle confirme aussi qu'il était temps d'en finir avec la fiction d’une unité possible de la NUPES autour d’un « programme de rupture ». LFI ne gagnera aucune voix du centre gauche en essayant de se faire passer pour plus « unitaire » et pour modérée. C’est en menant la bataille sur sa ligne de rupture contre le macronisme et l’extrême droite, mais aussi contre la gauche bourgeoise, qu’elle pourra convaincre et mobiliser son électorat jeune et populaire. Bien que les élections européennes ne soient a priori pas favorables à LFI (ce sont majoritairement des CSP+ et des retraités qui votent lors de ces élections), la participation en hausse en 2019 par rapport à 2014 montre malgré tout un plus grand intérêt de la population pour ce scrutin. C’est à raison que LFI fait campagne pour l’inscription sur les listes électorales, analysant que ses réserves de voix se trouvent davantage chez les abstentionnistes et les non inscrits que chez les publics déjà mobilisés. Or, malgré ces difficultés, nous savons que LFI est une machine capable d’entraîner largement lors des périodes électorales. L’enjeu est aujourd’hui de rester la première force d’opposition de gauche à Macron, en gardant une légitimité contestataire, bien qu’insuffisante tant qu'elle restera essentiellement électorale.
Macronistes et Lepénistes
Le camp macroniste est en grande difficulté. Sur l’échelle internationale, en « assumant » une « ambiguïté stratégique » à l’égard de la Russie, mais aussi plus largement dans le cadre des conflits armés et/ou géopolitiques (Ukraine, Palestine, Sahel…), le président français n’arrive pas à convaincre largement. S’il veut augmenter le soutien militaire à l’Ukraine de la part de l’UE – ce qui est effectivement en cours –, il ne parvient évidemment pas à enclencher une dynamique pour que l'UE incarne une alternative réelle au géant impérialiste américain. Dès lors, il peine à convaincre de la spécificité de son programme à l’heure même où la question de l’économie de guerre est portée encore plus ouvertement par le PS et Place Publique. De plus, le programme libéral et autoritaire des macronistes n’arrive pas à toucher d’autres secteurs de la population, réduisant de plus en plus leur base électorale. Sur le plan intérieur, l’effet Attal est en train de se dissiper, et les nouvelles attaques programmées contre les dépenses sociales et les services publics (sur fond de fiasco autour du déficit public) ne peuvent qu’aliéner le peu d’électorat populaire qui restait aux macronistes. Il est fort probable que la liste macroniste n’arrive pas à atteindre les 20 %. Si la participation était plus forte qu’en 2019, elle pourrait faire beaucoup moins et subir une défaite sans appel.
En revanche, le RN prospère largement, bien aidé par le système médiatique, et pas seulement par le groupe Bolloré, qui porte ses thématiques à une échelle de masse (« submersion migratoire », « grand remplacement », « ensauvagement de la société », « crise de la civilisation »…) et normalise son discours réactionnaire, raciste et autoritaire. Le RN donne de plus en plus de gages à la bourgeoisie, affichant sa conversion aux fondamentaux du néolibéralisme, dans le cadre notamment du déficit budgétaire. Le rapprochement sur le fond avec le macronisme ne cesse de s’approfondir, et des initiatives se multiplient, y compris sur le terrain parlementaire, pour un rapprochement entre l’extrême centre et l’extrême droite. Le parti d’Edouard Philippe, Horizons, revendique ainsi de faire un travail parlementaire avec le RN, dans l’objectif qu’il faudra additionner les voix face à la menace Mélenchon en 2027. Effectivement, les bourgeois et leurs porte-parole savent que la menace que représente LFI contre leurs intérêts est loin d’être écartée, et qu’il faudra alors mettre en place un large front réactionnaire pour lui empêcher sa conquête du pouvoir.
Rapide panorama des campagnes des différentes listes « de gauche ».
La campagne du PCF est un fiasco. Sur le fond, sa tête de liste Léon Deffontaines arrive à être encore plus réactionnaire que Roussel. Il veut incarner une « gauche populaire » en s’alignant sur les poncifs les plus réactionnaires, tout en tapant le plus fort possible sur LFI. La France Insoumise serait ainsi « communautaire » dans sa volonté de s’adresser aux populations non-blanches des quartiers, anti-laïque car contre les discriminations visant explicitement les musulman·e·s, pas claire sur l’antisémitisme parce qu’elle refuse de soutenir Israël dans son génocide à Gaza… Le problème du PCF est que les médias bourgeois n’ont plus besoin de faire sa promotion : leur nouveau chouchou s’appelle Glucksmann, figure idéale pour incarner la « gauche » libérale. Il s’agit pour ces médias d’expliquer au « peuple de gauche » ainsi qu’aux déçu-e-s du macronisme que Glucksmann est leur nouveau héros : soi-disant moins à droite que Macron et surtout moins radical que Mélenchon. Le résultat du PCF s’annonce très mauvais. De façon quasi certaine, le PCF n’aura pas d’élu-e-s, ce qui, espérons-le, contribuera à ouvrir une crise dans ce parti et permettra d’en finir avec le clown pathétique et réactionnaire Roussel et ses ambitions présidentielles.
La campagne du PS et de Glucksmann est donc portée par le système médiatique. La complaisance s’affiche sans complexes, et tout est fait pour mettre en valeur la tête de liste, sans la mettre en difficulté. Ainsi, on lui parle le moins possible du massacre à Gaza, car le sujet n’intéresse pas ce grand humaniste qui est incapable d’admettre la réalité du processus génocidaire en cours. Glucksmann a des indignations à géométrie variable, et sa conscience humaniste coïncide étrangement avec les intérêts de l’OTAN. Il prône la mise en place d’une « économie de guerre » qui mobilise l’épargne des Français pour augmenter considérablement les dépenses d’armement auprès des grands groupes de l’armement, pour « défaire » et « humilier » Poutine. Dans le passé, Glucksmann a soutenu Sarkozy, conseillé un dirigeant géorgien corrompu et ultra-libéral, et dans un passé plus récent, il n’avait rien à dire contre la réforme des retraites de Macron. Quand ce communicant prétend désormais s’attaquer au libre-échange ou aux riches, il est encore moins crédible que Hollande quand celui-ci prétendait à s’attaquer à la finance. D’ailleurs, la droite du PS ne s’y est pas trompée : elle adore Glucksmann (qui s’est toujours opposée à la NUPES) et se félicite que le PS renoue enfin avec sa vraie ligne social-libérale, tout en préservant – pour sa survie - l’unité de l’appareil du PS avec sa « gauche » (censée diriger le parti, mais qui semble en réalité avoir perdu la main), en ne proposant pas une personnalité issue de ses rangs ou directement liée au hollandisme. Sa relative percée s’explique avant tout par le fait qu’une partie de l’électorat de Macron ne se retrouve pas dans la dérive ultra-réactionnaire et préfère donner un signal « progressiste » qui ne rompt pas avec les fondamentaux du macronisme. Son succès éventuel dépendra du taux de participation : plus la participation populaire sera importante, plus le score de Glucksmann sera faible.
La campagne des écologistes tourne au fiasco. Au sein de la gauche bourgeoise, c’est Glucksmann qui rafle la mise, et les médias se désintéressent de leur campagne. Leur tête de liste, Marie Toussaint, n’arrive pas à convaincre largement autour d’elle alors même que cette élection est habituellement un vivier de voix pour les écologistes. Les défections (notamment vers la liste de LFI) se sont multipliées, Générations refuse de soutenir la liste (une partie soutient LFI, l’autre ne donne pas de consigne de vote), l’affaire Bayou rebondit et la dérive droitière est manifeste : soutien du philosophe ultra-libéral Gaspard Koenig, présence sur la liste de la chroniqueuse ex-macroniste des « Grandes gueules » Flora Ghebali… Il est désormais possible que la liste des écologistes finisse sous la barre des 5 %, ce qui ouvrirait une crise profonde dans ce mouvement… qui a officiellement toujours l’ambition de rassembler un million de sympathisants. C’est une situation qu’il faudra suivre de près car, malgré toutes les critiques que nous pouvons faire à ce parti bourgeois, une partie de la jeunesse politisée autour des questions écologiques et qui fait le lien avec les questions féministes et décoloniales s’y retrouve. Si un phénomène de division s’opère, l’aile gauche cherchera à exister politiquement et des convergences seront possibles avec LFI. Il sera donc nécessaire de convaincre ces militant.e.s de rejoindre LFI
La campagne de LFI : le pari de la participation populaire pour arriver en tête de la gauche
LFI a décidé de ne pas esquiver les questions internationales malgré les attaques répétées des médias bourgeois qui visent à la faire passer pour « pro-Poutine » et antisémite, et malgré la répression du gouvernement qui va jusqu’à interdire des meetings de campagne et à convoquer des figures de la liste (Rima Hassan) pour « apologie du terrorisme ».
- Pour le cessez-le-feu immédiat à Gaza et pour de véritables sanctions contre Israël : LFI est la seule force parlementaire à porter clairement cette politique et à refuser le discours officiel sur le fait qu'Israël avait le droit de se « défendre », alors qu'Israël est bien entendu l’oppresseur, le colonisateur, et que le droit de se défendre ne concerne que les Palestiniens en tant que peuple colonisé. La présence de Rima Hassan apporte énormément à la liste de la France insoumise, et elle a le mérite de poser (comme nous le faisons à la TC : https://tendanceclaire.org/article.php?id=1906 et https://tendanceclaire.org/article.php?id=1910) la perspective d’un État binational avec égalité des droits, à la place de l’entité sioniste, ce qui n’était initialement pas la politique de la FI. Cela montre que ces grandes orientations peuvent évoluer, malgré l’absence, pour l’instant, d’une réelle démocratie dans ce « mouvement gazeux » qui n'est malheureusemet pas un parti : cf. https://tendanceclaire.org/article.php?id=1921
- Pour l’ouverture immédiate de discussions autour d’un plan de paix en Ukraine, avec cessez-le-feu immédiat : LFI a le mérite non seulement de soutenir l'Ukraine agressée par la Russie, mais aussi de rompre avec la surenchère guerrière de Macron et de la gauche bourgeoise, même si LFI ne pointe pas suffisamment la responsabilité de l’impérialisme occidental dans ce conflit.
Par ailleurs, LFI s’oppose systématiquement aux positions réactionnaires du gouvernement en combinant le travail parlementaire et le soutien aux mobilisations sociales (réforme des retraites, loi Darmanin, lutte desenseignants…).
LFI a bien compris que l’enjeu électoral était d’arriver en tête à gauche : si ce pari est réussi alors que l’élection européenne est la plus compliquée pour LFI, cela permettra de propulser l’organisation et son programme aux présidentielles, tout la poussant à prendre enfin plus de responsabilités dans la lutte de classe. En revanche, si LFI fait un mauvais score, il y aura, immédiatement après l’élection, de grandes manœuvres pour lancer une nouvelle mouture de l’Union de la gauche, contre Mélenchon et le cœur de LFI, autour d’une politique d’accompagnement « social » du néolibéralisme. Il y a donc un enjeu majeur à ce que la « gauche de rupture » devance les forces de la gauche bourgeoise.
Les militant·e·s communistes révolutionnaires ne peuvent pas renvoyer dos-à-dos la France Insoumise et les partis politiques bourgeois. LFI n’est pas une force qui veut se donner les moyens de renverser le système capitaliste, mais elle tient bon sur toute une série de positions fondamentales face au cours réactionnaire qui entraîne toutes les autres forces politiques. Il est donc juste de se mobiliser pour le succès de la liste LFI, tout en pointant les limites de son programme, dont les principales sont de refuser de s’attaquer à la propriété des capitalistes sur les grands moyens de production et de semer des illusions sur la possibilité de changer le système par la voie électorale et institutionnelle.
De plus, les militant·e·s communistes révolutionnaires ont un intérêt direct à s’engager dans ce combat idéologique. Par la surface que couvre LFI, nous pouvons nous aussi défendre nos idées à une échelle bien plus large que celle à laquelle nous sommes habituellement cantonné·e·s. Cela ne doit pas être négligé : à l’heure ou les attaques antisociales et racistes vont encore se renforcer, nous devons participer activement à la structuration d’un bloc populaire capable de s’engager frontalement contre le bloc bourgeois. Les échéances électorales sont utiles pour défendre des idées au contact des personnes qui entreront, même partiellement, dans des phases de politisation. Nous devons nous en saisir pour y défendre nos idées révolutionnaires. Sans illusions sur les résultats du scrutin, notre objectif est de convaincre de la nécessité de la rupture révolutionnaire tout en soutenant de façon critique la campagne d’un parti réformiste.
Dans un capitalisme en crise profonde (au point que la productivité du travail baisse désormais), il n’y a pas de marge de manœuvre pour une réelle politique de redistribution. C’est la rupture avec le mode de production capitaliste qui doit être mise à l’ordre du jour, c’est-à-dire l'expropriation des grands groupes capitalistes, un gouvernement des travailleur/se-s et la mise en place de nouvelles institutions qui permettent aux travailleur/se-s de diriger l’économie pour satisfaire leurs besoins fondamentaux.