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    Retour sur la mobilisation «Stand Up for Science» 

    De la solidarité avec les universitaires aux États-Unis...  

    Comme nous le racontions dans l’article https://tendanceclaire.org/article.php?id=1991, c’est l'exubérance et la fanatisme de Trump qui ont permis un certain sursaut. En effet, les protestations aux États-Unis ont émergé suite aux changements de politique au cours des 47 premiers jours de la présidence de Donald Trump : arrêt des subventions liées à la recherche sur les transgenres et aux initiatives en faveur de la diversité aux National Institutes of Health, l'examen de milliers de subventions de la National Science Foundation contenant des mots-clés tels que « femmes » et « diversité », licenciements de centaines d'employé·e·s en période d'essai à la National Oceanic and Atmospheric Administration et au National Weather Service, proposition de plafonnement des coûts indirects au National Institute of Health, tentative de fermeture des installations abritant les observatoires volcaniques de l'Alaska et d'Hawaï, ainsi que le retrait des États-Unis de plusieurs initiatives en faveur du climat. 

    Des scientifiques, plutôt en début de carrière, se sont alors mobilisé·e·s sur place : il s'agissait notamment de s'opposer au gel des subventions scientifiques et au licenciement des scientifiques du gouvernement, de plaider en faveur d'un financement accru de la recherche scientifique, d'appeler au rétablissement des initiatives en matière de diversité, d'équité, d'inclusion et d'accessibilité au sein de la recherche scientifique financée par le gouvernement, et enfin d'exiger la fin de l'ingérence politique dans les processus scientifiques.

    Ce mouvement a eu un fort écho en France, et un collectif s’est monté faisant le constat que l’Université et la recherche font aujourd’hui l’objet d’attaques d’une ampleur inédite depuis la Seconde Guerre mondiale. Ce collectif s’est alarmé du fait que « l’offensive est particulièrement alarmante aux États-Unis, où les institutions de recherche, les agences de régulation, les droits civiques et les fondements mêmes de la démocratie sont mis à mal par l’administration Trump et le « Département de l’efficacité gouvernementale » (DOGE) de M. Musk. » Pour celui-ci : « la solidarité internationale s’avère d’autant plus indispensable que de semblables menaces pèsent sur l’Europe. » 

    Cette solidarité a pris puisque l’appel pour la journée du 7 mars a permi à plus de 15000 personnes de manifester un peu partout en France (https://standupforscience.fr/la-journee-du-7-mars/). 

    Une nouvelle journée de mobilisation a été organisé le 3 avril 2025 avec différents types d’évènemenents : des manifestations, des rassemblements, des conférences, des animations : https://standupforscience.fr/la-journee-du-3-avril/. La manifestation parisienne a été réussie puisqu’environ un millier de personnes s’est rassemblé à l’appel suivant :

    Cette marche est organisée conjointement par Stand Up For Science et par les étudiantes et les étudiants mobilisés en Ile-de-France pour une Université démocratique, ouverte à toutes et à tous, financée à hauteur de ses missions, et capable d’offrir des perspectives d’avenir face aux crises que nous traversons. A travers cette marche, la jeunesse s’adresse à nous toutes et tous – universitaires, personnels, chercheurs et nous demande de nous tenir à leurs côtés.

    ...Aux revendications sur la situation désastreuse française 

    Même si la mobilisation est née, en France, en soutien contre les attaques du gouvernement Trump aux États-Unis, la question de la situation de l’enseignement supérieur et de la recherche en France est venue s’introduire dans la mobilisation. La tribune parue dans Libération, du collectif «Stand Up for Science» français, est en ce sens salutaire :

    Enfin, si la France ne connaît pas aujourd’hui une offensive obscurantiste de l’ampleur de celle menée aux Etats-Unis, nul ne peut ignorer que l’Université et la recherche y font l’objet d’attaques : accusation du monde universitaire d’avoir «cassé la République en deux», atteintes contre la liberté académique, violation du principe millénaire de franchise universitaire, droits de scolarité dissuasifs pour les étudiants étrangers hors UE, appels à démanteler le CNRS, l’office français de la biodiversité (OFB) ou l’agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) et dégradation matérielle d’instituts de recherche comme Inrae. En clair, ni la France ni l’Europe ne sont actuellement les havres d’épanouissement scientifique et universitaire dont la société a pourtant besoin pour affronter les crises démocratique, économique, sanitaire, climatique et environnementale.

    Si cette analyse est faite depuis des décennies par les syndicats du secteur, elle est reprise et diffusée par des canaux différents, ce qui touche une population différente de l’ESR. Force est de constater que ces canaux, s’ils ne sont pas pérennes, touchent et mobilisent plus que les voies syndicales trop souvent ignorées dans la situation politique du secteur globalement paralysée, avec une crise de la lutte collective extrêmement profonde.  

    La solidarité internationale doit être construite, et pas seulement avec les États-Unis. On peut penser aussi au Brésil sous Bolsonaro, ou encore en Hongrie sous Orbán. Les sciences, la recherche et l’enseignement supérieur sont intrinsèquement internationaux, et ce qui se passe dans un pays, en touche inévitablement d’autres. Sur un autre registre, l’enseignement supérieur et le recherche français manque cruellement de solidarité avec les palestinien-ne-s, même si, principalement grâce à quelques étudiant·e·s, ici et là, des « comités palestines » se battent pour faire exister cette solidarité. 

    Toujours est-il donc, que même sélective, même partielle, et minoritaire, la solidarité avec les universitaires des États-Unis existe, et il faut la consolider. Cependant, cela ne doit pas s’arrêter là, puisque la situation en France est loin d’être idéale. Les statuts sont ici aussi attaqués frontalement, la marchandisation des personnes et des sujets de recherche est en marche, qui plus est, à vive allure. L’état se désangage de plus en plus des financements pérennes, et la recherche, dîtes sur projets, bat son plein. Le manque de personnel est criant, tant du côté des enseignant·e·s chercheurs/ses que du côté du personnel administratif et technique. Malheureusement, les classiques revendications syndicales sont toujours d’actualité. 

    Risque de perversion de la solidarité  

    Les directions des grands établissements comme l’UDICE (regroupement de 13 grandes universités de premier plan : https://www.udice.org/2025/03/06/udice-soutient-linitiative-stand-up-for-science/) prennent position en soutien à « Stand Up for Science ». Quelle hypocrisie... Ces même dirigeant·e·s n’hésitent pas à bâillonner les mouvements en soutien à la Palestine (https://www.liberation.fr/societe/education/conference-sur-la-palestine-a-luniversite-dauphine-le-conseil-detat-rejette-la-demande-dinterdiction-de-la-direction-20240506_IIFBIOCLSFF4HO5B2GE2VYPE2I/), ces même dirigeant·e·s qui se sont jeter dans l’application de la LPR (loi permettant de recourir à encore plus de contrats précaires faisant par là un pas de plus dans la casse du statut de fonctionnaire : https://tendanceclaire.org/article.php?id=1722), et ces mêmes dirigeant·e·s qui propagent une vision élitiste et marchandisée de la recherche, favorisant les sujets et les disciplines rentables. 

    Il s’agit : 1/ d’une opération de communication moraliste et aveugle, ne défendant quelques acquis seulement lorsqu’ils sont attaqués ailleurs ; 2/ un moyen, à peine dissimulé, d’essayer de récupérer quelques stars (scientifiques) américaines cherchant à partir.  Là encore, une tribune du réseau «Stand Up for Science (fr)» éclaire un peu cela (https://www.liberation.fr/idees-et-debats/stand-up-for-science-et-apres-20250320_PAEXRBEBOFHK5FRZLAGXCUFUIM/) :

    Etre à la hauteur de ce moment de bascule planétaire ne peut consister à usurper le nom de «Stand Up for Science» pour accueillir une poignée de «stars» sur des contrats aux noms prestigieux – «chaires d'excellence» – reproduisant ainsi la gestion de la pénurie par la mise en compétition des scientifiques. Comme si, face à la crise climatique, on choisissait d'envoyer quelques élus sur Mars plutôt que de préserver les conditions de vie sur Terre. Accueillir des scientifiques menacés en exil est une nécessité, mais il faut commencer par appuyer tous les mouvements de résistance sur place. C'est la protection effective de l'écosystème scientifique mondial qu'il faut mettre en œuvre. Cela nécessite de réaffirmer certaines de ses valeurs fondamentales, à commencer par un attachement philosophique et politique à la vérité.

    Des étudiant·e·s de l’avant-garde rentrent dans la bataille  

    Parallèlement, une avant-garde étudiante se mobilise face à la dégradation accélérée des conditions d’étude, à la précarisation matérielle généralisée, et à la crise de sens profonde que traverse l’enseignement supérieur. Cette avant-garde, encore minoritaire mais résolue, refuse de se résigner au rôle passif auquel on voudrait cantonner la jeunesse. Elle conteste à la fois la transformation néolibérale de l’université — réduite à une fabrique de “compétences” calibrées pour le marché du travail — et l’asphyxie des aspirations critiques et émancipatrices au sein des savoirs. 

    Dans plusieurs universités, des assemblées générales s’organisent, des coordinations émergent, des ponts se tendent entre filières, entre universités, et avec d’autres secteurs en lutte. La mémoire des mobilisations passées (de 2006 à 2018) n’a pas disparu ; elle est réactivée et réappropriée par une nouvelle génération qui, dans un monde ravagé par les crises écologiques, sociales et géopolitiques, commence à tirer des conclusions politiques plus radicales.

    Ce réveil étudiant entre en résonance avec la dynamique militante portée par la campagne Stand Up for Science, née dans le secteur de la recherche publique. Chercheur·ses, précaires, ingénieur·es, ITA : tous et toutes dénoncent le démantèlement de la recherche indépendante, la logique de projet et d’appel d’offres, la mise sous tutelle des orientations scientifiques par des intérêts privés et gouvernementaux. Ce mouvement, qui revendique une science au service du bien commun et affranchie des logiques de rentabilité, trouve dans les mobilisations étudiantes un allié naturel. 

    La convergence entre cette avant-garde étudiante et les forces critiques issues du monde scientifique n’est pas un simple hasard de calendrier : elle traduit une nécessité objective de recomposition des luttes. Car ce sont les mêmes logiques capitalistes qui détruisent l’université, la recherche, la planète et les droits sociaux. L’enjeu, aujourd’hui, est d’unir ces foyers de résistance dans une lutte politique consciente, capable de dépasser le cadre défensif pour poser les bases d’un front anticapitaliste large, ancré dans les universités, mais tourné vers l’ensemble du monde du travail. Ce n’est qu’en reliant la bataille pour l’autonomie du savoir à la lutte pour une transformation révolutionnaire de la société que ce mouvement pourra atteindre son plein potentiel.

    Nécessité de reconstruire les structures syndicales de lutte et de proposer des perspectives révolutionnaires

    Comme nous le disions plus haut, la situation dans l’enseignement supérieur et la recherche est assez compliquée. D’un côté, comme tous les services publics, les moyens sont très largement insuffisants, les attaques visent à détruire les statuts, notamment ceux de fonctionnaires, et la liberté de débat et la liberté académique sont de plus en plus limitées. 

    En tant que militant·e·s révolutionnaires et plus largement comme simples travailleurs/ses du secteur, il nous faut construire les outils permettant la mobilisation du secteur. À la suite des mobilisations contre les retraites et la LPR, la tâche est rude, notamment du fait de la politique d’accompagnement des directions des grandes confédérations syndicales, puisque dans les années passées nous avons subit de lourdes défaites (LRU, retraites, LPR, etc.).

    Nous devons, dans le cas présent, investir la mobilisation en solidarité avec les universitaires aux États-Unis, participer à l’extension des revendications à la France, et à introduire dans le mouvement des revendications syndicales importantes de défence de ce service public. Malheureusement, les organisations syndicales du secteur n’investissent pas suffisament le mouvement «Stand Up for Science».

    Cependant, nous ne pouvons pas nous limiter à agir lors de mouvements spécifiques mais nous devons construire une résistance qui s’inscrit sur le long terme. C’est pourquoi, en tant que révolutionnaires et pour les classes exploitées, nous avons besoin de syndicats «lutte de classe» pérennes dans nos organismes et établissements, et pour cela il faut s’impliquer dans les syndicats existants, et peser le plus possible sur les revendications et leurs structures. 

    Nous revendiquons en particulier :

    • l'abandon de la LPR, de la LRU ;
    • l'augmentation drastique du nombre de postes dans l'ESR ;
    • la titularisation de tou·te·s les précaires ;
    • l’arrêt de la recherche sur projet ANR et autre ERC, avec financement pérenne à hauteur des besoins des laboratoires et organismes de recherche ;
    • la suppression de l'autonomie des universités au profit d'un plan de recherche national et sous contrôle des travailleurs/ses de l'ESR, à égalité (une personne, une voix), quels que soient les statuts (administratifs, techniques, enseignant·e·s-chercheur·e·s, doctorant·e·s).

    Plus généralement, il nous faut, en tant que révolutionnaires, pouvoir proposer une autre université et une autre recherche, ouvertes à toutes et tous, qui permettent l’émancipation. Si le sujet programmatique est vaste et nécessiterait beaucoup plus de développement, une meilleure université et une meilleure recherche passeront forcément par plus de moyens pour enseigner, faire de la recherche et étudier dans de bonnes conditions. Il est tout à fait injuste que les conditions d’études des élèves en classes préparatoires, élèves souvent favorisé·e·s, soient aussi bonnes par rapport à celles des étudiants des universités. Il faut étendre ces conditions à toutes et tous avec plus d’heures de cours, un vrai suivi par des classes de 40 maximum, et évidemment les bourses nécessaires pour que les étudiant·e·s n’aient pas à travailler en parallèle. Pour cela, nous avons besoin, comme dans de nombreux secteurs de la fonction publique, de moyens pérennes, de recrutements massifs de personnels administratifs et technique, d’enseignant·e·s et de chercheurs/ses. Pour un peu plus de détails, nous vous renvoyons à notre critique du programme l’Avenir en Commun, et notamment sa partie sur la recherche et l’enseignement supérieur (https://tendanceclaire.org/article.php?id=1823). 

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