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Chapitre 4.2 : "Développer les transports publics écologiques"... mais pourquoi ne nationaliser que la SNCF et les autoroutes ?
La Tendance CLAIRE a décidé d’ "appeler à voter pour Jean-Luc Mélenchon tout en menant bataille contre les impasses réformistes de son programme" (https://tendanceclaire.org/article.php?id=1705). C’est pourquoi nous proposons une analyse critique du programme de l’Union populaire.
Billets précédents :
Chapitre 1.1, Chapitre 1.2, Chapitre 1.3, Chapitre 1.4, Chapitre 1.5, Chapitre 1.6
Chapitres 2.1 et 2.2, Chapitre 2.3, Chapitre 2.4, Chapitre 2.5, Chapitre 2.6
Chapitre 3.1, Chapitre 3.2, Chapitre 3.3, Chapitre 3.4
4. 2) « Développer les transports publics écologiques, repenser la mobilité individuelle »... mais pourquoi alors ne nationaliser que la SNCF et les autoroutes ?
La question des transports a déjà été abordée dans le chapitre III, point 4, mais c’était essentiellement sous l’angle des collectivités territoriales. Il n’est pas sûr que ce soit judicieux de séparer ces points, puisque « le transport ferroviaire a été abandonné au profit des camions et des bus Macron. La libéralisation empêche toute politique de bifurcation écologique. Il est urgent de relocaliser les productions et de réduire les distances entre bassins de vie et bassins d’emploi. » – et par conséquent un plan de reconstruction et de développement des transports publics devrait articuler les différents niveaux, du municipal à l’international.
Le programme AEC confirme qu’il ne propose pas la constitution de monopoles publics, puisque sa « mesure clé » est ici de « créer un pôle public des transports et de la mobilité », qui implique le maintien d’entreprises privées. Cependant, en ce qui concerne les trains, nous nous réjouissons qu’il soit proposé de « renationaliser la SNCF et refuser la mise en concurrence des lignes de transport » – ce qui revient à reconstituer le monopole public. Et bien évidemment, il est indispensable aussi, contrairement à ce qu’a fait la SNCF depuis des décennies, de « refuser la suppression des lignes ferroviaires du quotidien et en rouvrir, augmenter le nombre de trains et garantir des tarifs accessibles, maintenir des guichets physiques dans les gares ».
De même, nous sommes d’accord pour « renationaliser les autoroutes » – mais non avec la proposition de « reven[ir] sur les hausses de prix passées », qui semble indiquer un maintien des péages, alors que ceux-ci sont injustes (comme tous les impôts directs) et illégitimes : si les routes appartiennent à l’État, elles doivent être gratuites pour les usager/ère-s, qui paient alors par l’impôt leur entretien, les dispositifs de signalisation, de sécurité, etc. – même s’il faudrait aussi que les entreprises y contribuent par une taxe spéciale, puisqu’elles en profiteraient également.
Par ailleurs, on peut tout de même regretter que le programme AEC ne rappelle pas la nécessité de diminuer fortement le trafic automobile, source de pollution atmosphérique – mais aussi sonore et paysagère –, d’accidents et de gaspillages financiers pour les ménages. Certes, le programme AEC propose aussi de « développer les transports publics à la demande hors des zones denses de transport public » – mais il faut surtout densifier au maximum les lignes régulières de transports publics et imposer leur gratuité, afin que les gens renoncent à la voiture pour les déplacements de proximité. De plus, il est juste de « repenser la mobilité individuelle en développant les usages partagés de la voiture et les mobilités douces (comme le vélo) » – mais il faut ajouter que cela suppose aussi des investissements, en particulier pour les pistes cyclables sécurisées (en ville, mais aussi en parallèle des routes départementales, où ont lieu la plupart des accidents graves) et il faut donc en donner les moyens spécifiques aux municipalités et aux départements, à commencer par les plus pauvres.
Si le programme AEC prévoit de renationaliser la SNCF et les autoroutes, il ne prône cette mesure que pour les « aéroports stratégiques » – sans préciser lesquels. Mais pourquoi certains aéroports devraient-ils rester privés ? Si l’on veut planifier à la fois la bifurcation écologique, le développement économique et la baisse des inégalités territoriales, il faut que l’État ait le contrôle et donc la propriété de toutes les grandes infrastructures, avec la participation démocratique des citoyen-ne-s à la gestion comme à la planification.
Le programme ne prévoit pas non plus de renationaliser Air France, et encore moins de reconstituer le monopole public pour le transport aérien national. Certes, il est juste, pour des raisons écologiques, de « supprimer les lignes aériennes quand l’alternative en train est inférieure à quatre heures », mais on ne voit pas pourquoi il faudrait maintenir la concurrence sur ces lignes, avec les conditions de travail et de sécurité dégradées que cela implique. De plus, il faudrait en fait supprimer toutes les lignes aériennes intérieures à l’hexagone en réalisant les travaux nécessaires pour qu’aucune distance en train ne soit supérieure à quatre heures. (Quant aux transports aériens internationaux au départ et à l’arrivée du territoire national, il faudrait limiter la concurrence en substituant à celle-ci, autant que possibles, des accords équitables entre États – mais il est vrai que, sur ce plan, tout dépendrait de l’évolution politique de ceux-ci, notamment de leurs réactions face aux mesures qui seraient prises plus généralement en France...).
Par ailleurs, la proposition d’« adopter un plan de développement du ferroutage et de report modal (cabotage maritime, fluvial et dirigeable » est juste, mais malheureusement le programme AEC ne donne aucune précision (et il évite là encore totalement la question de la propriété, alors que certains ports fluviaux et surtout la plupart des entreprises qui les utilisent sont privés, certaines étant de grande taille, ou des filières de multinationales).