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Chapitre 1.4: « Une République permettant l’intervention populaire »

La Tendance CLAIRE a décidé d’« appeler à voter pour Jean-Luc Mélenchon tout en menant bataille contre les impasses réformistes de son programme » (https://tendanceclaire.org/article.php?id=1705). C’est pourquoi nous proposons une analyse critique du programme de l’Union populaire.

Billets précédents :

Chapitre 1.1

Chapitre 1.2

Chapitre 1.3

1. 4) « Une République permettant l’intervention populaire »... ou une République assurant vraiment la souveraineté populaire ?

Selon le programme AEC, « les citoyens ne doivent pas être tenus à l’écart de la vie publique en démocratie. C’est pourtant le cas aujourd’hui avec une forte abstention aux élections. L’intervention citoyenne est le cœur de notre programme et de notre projet politique pour la France. » Concrètement, la « mesure clé » serait d’« instaurer le Référendum d’initiative citoyenne (RIC), par lequel les citoyens qui réunissent suffisamment de signatures peuvent révoquer des élus, proposer ou abroger une loi et modifier la Constitution. » Nous soutenons aussi cette revendication, popularisée par le mouvement des Gilets jaunes. Toutefois, le programme AEC ne précise pas le nombre de signatures qu’il faudrait selon elle. Or, pour le « référendum d’initiative partagée » actuellement en vigueur, il est fixé à 10% du corps électoral (en plus de la très restrictive signature d’1/5e des parlementaires) et l’échec de la pétition pour un référendum contre la privatisation d’Aéroports de Paris a montré que ce seuil est trop haut : il faudrait le fixer par exemple à 1 million de signatures (soit près de 2% du corps électoral, comme en Suisse pour les référendums d’initiative populaire de niveau fédéral). Mais surtout, le référendum n’est nullement une panacée, contrairement à ce que semble croire le programme AEC : en soi, il n’est utilisable que pour une infime partie des lois et uniquement avec des questions très simples, qui présupposent de vrais débats dans l’ensemble de la société ; il ne suffit donc nullement pour que les citoyen-ne-s deviennent le centre de l’élaboration des lois. De plus, dans le système actuel, en cas de RIC (sans parler des référendums d’initiative présidentielle, qui sont les seuls à avoir été organisés jusqu’ici), les débats seraient biaisés par l’inégalité d’accès à la parole et à l’information fiable, à cause des monopoles médiatiques, des expert-e-s (ou prétendu-e-s tel-le-s) qu’ils sélectionnent, de la sur-représentation des policien-ne-s, de la méfiance généralisée (et ô combien légitime) des gens à leur égard, etc. Dès lors, on ne pourrait pas organiser de véritables référendums populaires, dans de bonnes conditions de débat, sans briser les reins du système politico-médiatique actuel et sans en reconstituer un qui soit entièrement au service de l’information et de l’expression des citoyen-ne-s (le programme AEC propose certes par ailleurs des réformes du système médiatique, mais elle ne les articule pas avec la question électorale et elles sont par ailleurs très insuffisantes, comme nous le verrons au point 6 de ce chapitre). C’est encore plus vrai quand elle propose de « rendre obligatoire le recours au référendum en cas de modification de la Constitution ou d’adoption d’un nouveau traité européen » : dans ce cas, aux objections précédentes s’ajoute le fait qu’il s’agit en général de référendums à l’initiative du pouvoir, avec un caractère plébiscitaire qui biaise d’autant plus les débats.

Le programme AEC prône également une réforme du droit de vote. Nous sommes d’accord avec le « droit de vote à 16 ans », car cela peut permettre une politisation plus précoce des jeunes et il n’y a pas de raison que l’on puisse travailler mais non voter à 16 ans. Nous ne sommes pas opposé-e-s à la proposition de « reconnaître le vote blanc », dans la mesure où, actuellement, cela peut permettre de mesurer le degré de défiance à l’égard des partis en présence – mais il est évident que cela ne sert pas à grand-chose du point de vue d’une véritable extension du pouvoir des citoyen-ne-s. En revanche, nous ne sommes pas favorables au projet de « mettre en place le vote obligatoire », car de manière générale la participation aux affaires publiques doit relever de la liberté et de la conviction et surtout, dans le système actuel, on peut comprendre le refus de voter d’une partie des citoyen-ne-s, qui manifestent par là leur écœurement : loin de faire progresser la citoyenneté active, l’obligation de voter ne pourrait être ressentie que comme une contrainte supplémentaire du système. Quant à la proposition (ajoutée dans la dernière version du programme AEC) d’« instaurer un seuil de votes exprimés pour valider une élection », nous y sommes favorables, car l’illégitimité d’un grand nombre d’élu-e-s, surtout au niveau national, est flagrante aujourd’hui ; mais force est de constater que cette mesure est quasiment contradictoire avec le vote obligatoire – et renforce par là même notre refus de celui-ci.

Une autre mesure problématique a été ajoutée dans la dernière version du programme AEC. Elle propose ainsi d’« instaurer une procédure de parrainages citoyens pour l’élection présidentielle en alternative aux 500 parrainages d’élus ». Certes, ce serait moins antidémocratique, mais si l’on est pour la 6e République et notamment pour « abolir la monarchie présidentielle », et si la Constituante doit se réunir pendant deux ans, donc soumettre un projet de constitution bien avant la fin du prochain quinquennat officiel, pourquoi proposer un aménagement de l’actuelle élection présidentielle ?

Quant à la proposition, également ajoutée, de « présenter systématiquement au bureau de l’Assemblée nationale les propositions émises par les citoyens, dans le cadre de conventions citoyennes ou d’assemblées créées à cet effet », il faudrait savoir si elle suppose le maintien du système actuel (auquel cas nous la soutiendrions, précisément pour contester ce système où elle ouvrirait une petite brèche) ou si elle s’inscrit dans le cadre d’une nouvelle République (mais alors, comme il s’agirait de redonner le pouvoir au peuple, on voit mal à quoi serviraient des « conventions citoyennes » consultatives).

De même, dans le cadre du système actuel, nous ne sommes pas contre la volonté d’« affirmer les trois échelons d’organisation décentralisée (communes, départements, régions) », dans la mesure où cela peut « mettre fin à la superposition d’échelons technocratiques (métropoles, intercommunalité géantes...) qui éloigne les citoyens des prises de décision », et « rendre aux communes leur liberté de coopération » (alors que l’intercommunalité forcée sert souvent de prétexte pour liquider les services publics locaux). Cependant, là encore, cela ne suffirait absolument pas à fonder une nouvelle République, à réaliser une vraie démocratie ! Il faudrait au contraire que les gens puissent prendre part davantage à la vie politique municipale et cantonale, notamment par la mise en place d’Assemblées générales décisionnelles sur les grandes questions, contrôlant les décisions courantes des conseils municipaux et départementaux (au lieu qu’on se contente de voter tous les cinq ou six ans) et pouvant le cas échéant les destituer. Quant à l’échelon des régions, rien ne dit qu’il faille le garder : il a été instauré par Giscard non pour des raisons démocratiques (contrairement aux communes et aux départements, mis en place par la Révolution française), mais pour aggraver la concurrence économique entre les territoires et pour accompagner à la fois la promotion de l’Union européenne et le désinvestissement de l’État dans les services publics (notamment les transports), voire leur privatisation. En outre, cet échelon régional a été rendu encore plus éloigné des citoyen-ne-s par les réformes de Sarkozy et les « grandes régions » de Hollande (que le programme AEC remet en cause plus loin – dans le chapitre 3, point 2).

Nous sommes d’accord en revanche avec les autres mesures ajoutées dans la nouvelle version du programme AEC, d’ailleurs très disparates : « donner à la Corse le statut garanti par l’article 74 de la Constitution » (concernant les « collectivités d’outre-mer » qui ne sont ni des départements, ni des régions, et qui peuvent avoir une autonomie administrative), « rendre effectif le principe du non-cumul de mandats et des indemnités (un seul au même moment, deux mêmes mandats consécutifs maximum », « organiser la sortie du mandat : garantir un droit à la formation professionnelle pour les élus » et « faire voter une loi d’amnistie pour les syndicalistes, militants écologistes, associatifs et les Gilets jaunes qui ont été condamnés pour leur participation à la vie publique »... Mais il est clair que ces mesures, progressistes, ne sont pas centrales, alors que celles qui précèdent, concernant l’organisation même des pouvoirs aux différents niveaux, tendent plutôt à un aménagement du système actuel qu’à sa mise en cause fondamentale. En ce sens, « l’intervention populaire » que préconise le programme AEC reste bien loin d’une véritable souveraineté populaire.

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