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Avec la démission de Lecornu, la crise politique est ouverte... Plus que jamais : Macron, démission !

Lundi matin, Lecornu a annoncé sa démission, quelques heures à peine après avoir nommé ses ministres. La crise politique, contenue depuis la dissolution de l’Assemblée nationale et les élections législatives de juillet 2024, est cette fois ouverte...
Après quatre semaines de tractations, le Premier ministre Lecornu avait annoncé dimanche soir la nomination de son « nouveau » gouvernement... qui consistait pour l’essentiel en une reprise des ministres précédents ! Avec en prime le repêchage de Bruno Lemaire, qui avait pourtant prétendu se mettre au vert en Suisse et déclaré ne plus vouloir être ministre... Or, parce qu’il a été ministre de l’économie et des finances de Macron pendant sept ans, jusqu’au gouvernement Attal inclus, Bruno Lemaire incarne la responsabilité du dérapage de la dette publique. Il n’en a pas fallu davantage pour que, le soir même de la saint-Bruno, la guerre des Brunos soit lancée : Retailleau, pourtant reconduit comme ministre de l’Intérieur, a soudain décide de ne plus faire partie du gouvernement et de lui retirer le soutien des LR... Pour se justifier, il a prétendu que Lecornu ne l’avait pas prévenu du retour de Lemaire... Prétexte consternant, qui cache mal les rivalités et tensions internes aux LR, dans la perspective de la présidentielle, mais aussi d’une attraction par le RN chaque jour plus inquiétante. Le gouvernement de Lecornu était en tout cas mort-né et il en a tiré les conséquences.
Une autre voie était pourtant possible : depuis un mois, le PS tendait la main à Lecornu (sans même remonter à sa capitulation aux débuts du gouvernement Bayrou), mais il a refusé de la saisir. Certes, cette voie était étroite, mais l’éphémère Premier ministre aurait pu faire quelques concessions au PS pour l’associer à sa politique, vu qu’Olivier Faure et ses ami-e-s n’attendaient que cela. Ils étaient manifestement prêts à se contenter par exemple de la promesse d’une demi-taxe Zucman pour ne pas censurer le gouvernement... Cependant, la pression des chef-fe-s du MEDEF a été plus forte et Macron sait quels sont ses maîtres : il a donc empêché cet accord possible entre Lecornu et le PS.
Canalisation de la mobilisation par les principales directions parlementaires et syndicales
Quelles que soient cependant les responsabilités respectives des macronistes et des LR dans leur échec, la fuite en avant de Macron est rendue possible surtout par la majeure partie de la gauche parlementaire et syndicale. Pendant que le PS suppliait Lecornu de lui offrir un minimum de raisons pour trahir une nouvelle fois, et que le PC et Les Verts semblaient prêts à lui emboîter le pas, les directions syndicales menaient à l’impasse le mouvement social pourtant prometteur qui s’était imposé en septembre. Or, si notre mobilisation a permis la chute de Bayrou, le renoncement à la suppression des deux jours fériés et la fragilisation de Lecornu dès sa nomination, elle aurait pu aller beaucoup plus loin en se dotant d’un objectif politique unificateur (la démission de Macron, voulue par deux tiers des personnes sondées) et d’une stratégie gagnante (un appel intersyndical national au blocage et à la grève jusqu’à la victoire)[1]. Au lieu de cela, les directions syndicales ont temporisé après le 18 octobre, lançant un ridicule « ultimatum » avant d’appeler pour le 2 octobre à une nouvelle journée de mobilisation sans perspectives, dont le relatif échec était dès lors prévisible[2]. La plupart des forces de la gauche parlementaire et des directions syndicales ont ainsi canalisé le mouvement en le subordonnant aux négociations institutionnelles, alors même que Lecornu refusait toute concession significative. Elles ont conduit à ce que le centre de gravité du rapport de forces rebascule de la rue aux institutions.
Délitement du camp présidentiel
Cependant, les institutions de la Ve République pourraient cette fois entrer en crise ouverte. Macron temporise une fois de plus en confiant à Lecornu la mission de trouver une solution d’ici mercredi soir. Il voudrait tenter la nomination d’un énième Premier ministre, peut-être un « gouvernement technique » dont la tâche se limiterait, outre la gestion des affaires courantes, à l’élaboration d’un budget. Mais cet acharnement ne pourra probablement rien donner, car la crise politique est désormais déclenchée et l’on voit mal comment elle pourrait se refermer ou même se réduire avec un nouveau cycle de négociations alors que tous les précédents ont échoué. En fait, Macron est de plus en plus isolé : son ancien Premier ministre, Édouard Philippe, qui incarne les débuts « triomphants » du macronisme, réclame des présidentielles anticipées et même Gabriel Attal, lui aussi ancien Premier ministre et naguère encore fidèle parmi les fidèles déclare partout qu’il « ne comprend plus » le président... Le délitement accéléré du camp macroniste est typique d’une fin de règne, où chacun cherche à limiter pour sa pomme les dégâts d’une déroute collective.
La dissolution de l’Assemblée est le scénario le plus probable
Le scénario le plus probable est la dissolution de l’Assemblée nationale. Macron tire ses dernières cartouches pour tenter de l’éviter, mais même si un « gouvernement technique » voyait le jour, il est peu vraisemblable qu’il tienne longtemps. Le président aurait probablement voulu ne pas dissoudre avant les municipales, car son inévitable défaite à des législatives le priverait de toutes chances de gagner des villes et donc de construire enfin vraiment son courant politique. Mais c’est sans doute trop tard désormais. Le blocage des institutions par les partis dits « de gouvernement », incapables de s’entendre, ne peut conduire Macron qu’à dissoudre plus ou moins tôt, car il préfère une victoire du RN plutôt que de démissionner. Cependant, rien ne dit que de nouvelles élections donnent une majorité claire à l’Assemblée. Même s’il est probable à la fois que le RN progresse de façon significative et que LR franchisse ensuite le pas d’une alliance parlementaire avec lui, il n’est pas sûr que cela suffise à dégager une majorité et à stabiliser la situation.
En cas de nouvelles législatives, il faut reconstituer le NFP, avec son programme de 2024
Si l’Assemblée est dissoute et que des élections ont lieu, il faut tout faire pour empêcher le RN d’arriver au pouvoir. Malgré la politique lamentable du PS, qui a refusé de censurer Bayrou jusqu’en septembre et négocié avec Lecornu en renonçant à défendre le programme du NFP, l’urgence est de reconstituer le Nouveau front populaire, sur la base de son programme de 2024, car il n’y a pas d’autres solutions, sur le plan électoral, pour éviter la catastrophe d’un gouvernement Bardela. En juillet 2024, nous avions exprimé nos réserves sur les limites du programme tout juste réformiste du NFP, mais avions apporté notre soutien critique à cette démarche, seule alternative possible à la peste du RN et au choléra du macronisme[3]. Or, dix-huit mois plus tard, quelles que soient les trahisons du PS, qui étaient prévues car elles n’ont rien de nouveau, la division électorale des partis de gauche ne serait pas compréhensible pour les travailleur/se-s et les opprimé-e-s qui veulent tout faire, à juste titre, pour éviter le RN au pouvoir tout en se débarrassant de la macronie. C’est d’ailleurs cette ligne qu’a défendue LFI avant même la démission de Lecornu[4]. C’est aussi ce qui permettrait à LFI de continuer à progresser dans sa conquête de l’hégémonie à gauche : alors que le PS ne cesse de trahir ses engagements et de calomnier les dirigeant-e-s de LFI, la ligne de l’unité sur la base du programme de 2024 permet de montrer que LFI a le sens des priorités qu’exige la situation concrète, tout en continuant à défendre son orientation propre avant, pendant et après les accords électoraux. Enfin, il ne devrait pas s’agir seulement d’un accord entre les partis de gauche, mais il faudrait aussi que les directions syndicales le soutiennent, comme l’avaient fait celles de la CGT et de la FSU à l’été 2024. Toute notre classe et toutes les organisations progressistes doivent s’unir pour parer aux dangers les plus immédiats, quelle que soit par ailleurs la profondeur de nos désaccords.
La démission de Macron doit rester le but de notre lutte politique actuelle
S’il dissout l’Assemblée, quitte à ce que le RN arrive au pouvoir, c’est qu’il veut s’accrocher coûte que coûte à son poste jusqu’en 2027. De fait, il pourrait alors vivoter en se concentrant sur quelques coups au niveau de la politique internationale, comme l’autre jour avec la « reconnaissance » de l’État palestinien à l’Assemblée générale de l’ONU, même s’il s’agit en fait surtout de pétards mouillés[5]. Il fera sûrement tout pour ne pas démissionner, mais il n’est pas sûr d’y arriver, comme le montre le fait que, même chez les LR et dans son propre camp, un nombre croissant de voix commencent à demander son départ. Cependant, son principal point d’appui reste le soutien dont il bénéficie de la part des partis de gauche au Parlement (hors LFI) et des directions syndicales, qui ont tout fait pour négocier avec Lecornu en septembre, alors que les manifestant-e-s exigeaient à une échelle large la démission de Macron et que deux tiers des Français-es interrogé-e-s la souhaitent. Même aujourd’hui, alors que la crise politique est ouvete et qu’Édouard Philippe demande cette démission, les dirigeant-e-s du PS, du PC et des Verts martèlent sur les plateaux que ce n’est pas ce qu’ils veulent et continuent de supplier Macron de nommer un Premier ministre de gauche – comme s’il pouvait céder aujourd’hui ce qu’il a refusé depuis 18 mois et alors qu’il n’a même pas voulu d’une demi-taxe Zucman pour éviter l’échec de Lecornu... Les ambitions politiciennes et la peur d’être de nouveau laminés en cas de présidentielle anticipée conduisent le PS, le PC et les Verts à protéger le président et, à travers lui, la Ve République, au lieu de profiter de la crise politique pour y mettre fin. Tout au contraire, nous devons, avec LFI, continuer à nous battre pour exiger la démission de Macron, car c’est là que se trouve la centre névralgique de la situation immédiate. Dans le système politique actuel, une présidentielle anticipée permettrait en effet que chaque parti défende son programme, que les gens se saisissent massivement des enjeux et des discussions et que LFI apparaisse comme la meilleure solution électorale à celles et ceux qui veulent une véritable alternative politique à la macronie et au RN.
La pause imposée aux mobilisations par les directions doit permettre d’en tirer les leçons
Cependant, nous savons que la voie électorale en général n’est pas favorable à notre classe, étant donné les conditions de la campagne, dominée par les médias des milliardaires, le mode de scrutin, le dégoût de la politique qui progresse dans la population à cause des manipulations de Macron et des autres politicien-ne-s de la bourgeoisie, des trahisons du PS, etc. D’ailleurs, Macron ne démissionnera pas sans une pression énorme de la société et tout particulièrement sans une mobilisation intense des travailleur/se-s. Et, même si la macronie et le RN étaient battus électoralement, et même si LFI gagnait la présidentielle, seule la lutte de classe, mettant en mouvement des masses de travailleur/se-s pourraient imposer une véritable alternative, faire plier le patronat, arracher des acquis – et a fortiori engager un processus de transformation révolutionnaire de la société.
Dans l’immédiat, les principales directions parlementaires et syndicales ont réussi à rendre la main aux politicien-ne-s, alors que le mouvement de septembre pouvait permettre d’aller vers une grève générale qui seule aurait pu imposer une défaite à la macronie et au patronat. Il faut donc que les travailleur/se-s en tirent les leçons. Il faut continuer à chercher le chemin difficile, mais nécessaire, de l’auto-organisation et du dépassement des obstacles que les principales directions mettent en travers de nos mobilisations. Notre lutte de classe n’est pas encore assez forte pour imposer nos solutions, mais le mouvement de septembre doit servir de point d’appui pour que nous progressions en ce sens. La canalisation du mouvement vers de vaines « négociations » et finalement vers une probable tentative de résolution par des élections doit conduire à réfléchir aux voies que peut emprunter la lutte de classe directe et, pour cela, à nous réapproprier notamment nos organisations syndicales pour en changer l’orientation, donc aussi les directions. Enfin, il est nécessaire de construire un grand parti politique des travailleur/se-s, dont LFI pourrait être le creuset et qui inclurait dans un cadre démocratique les différents courants et les différentes sensibilités des partisan-e-s de la lutte de classe et des anticapitalistes, y compris des révolutionnaires.
[1] Voir nos articles précédents, notamment https://tendanceclaire.org/article.php?id=2018 et https://tendanceclaire.org/article.php?id=2020
[2] Voir https://tendanceclaire.org/article.php?id=2023
[3] Voir https://tendanceclaire.org/article.php?id=1940
[4] Voir l’interview de Manuel Bompart, coordinateur de LFI, sur la chaîne LCP : https://tendanceclaire.org/breve.php?id=46252







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