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Obama et le Congrès appuient une loi digne d’un État policier

Lien publiée le 23 décembre 2011

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

http://www.wsws.org/francais/News/2011/dec2011/etat-d23.shtml

L’approbation par le Sénat américain de la loi permettant la détention militaire pour une durée indéfinie de citoyens américains sans accusations ni procès marque un nouveau stade dans une décennie d'assaut ininterrompue sur les droits démocratiques et constitutionnels les plus élémentaires.

Le vote du Sénat à 86 contre 13 en faveur de la loi suivait son approbation par la Chambre des représentants mercredi. Il suivait aussi l’annonce par la Maison-Blanche selon laquelle le président Barack Obama n’exercerait pas son pouvoir de veto contre la mesure, qui est incluse dans laNational Defense Authorization Act (NDAA), une enveloppe de 662 milliards de dollars pour financer la machine de guerre américaine.

Le projet de loi stipule que toute personne accusée d’être terroriste soit « détenue sans procès jusqu’à la fin des hostilités » dans une prison militaire. Même s’il requiert un tel traitement pour des non-citoyens, il l’autorise pour les citoyens arrêtés en sol américain, si le président décide qu’ils méritent une peine extraconstitutionnelle.

Cet article de loi légalise les pires crimes commis sous l’administration Bush et sanctionne légalement un État policier et militaire américain. Le large appui bipartite qu’il a obtenu dans les deux chambres du congrès a fourni une preuve définitive qu’il n’existe pas de base pour la défense des droits démocratiques au sein de l’establishment politique américain et de ses deux partis de la grande entreprise.

À ce sujet, le passage d’une loi qui jette aux orties les principes fondateurs de la République américaine a soulevé à peine un murmure d’inquiétude de la part des médias de masse contrôlés par la grande entreprise. Ils n’ont aucune intention d'en faire un débat public. Pour les millions d’Américains qui travaillent, cependant, cette action est de la plus grave importance.

Le vote du Sénat est arrivé précisément 220 années après l’adoption de la Déclaration des droits, les dix premiers amendements à la Constitution américaine, le 15 décembre 1791.

Ces amendements énonçaient clairement des libertés démocratiques élémentaires, incluant la liberté d’expression et de presse, la protection contre des fouilles ou des saisies excessives, le droit à un procès juste et le droit de toute personne accusée d’un crime à un procès public fait avec diligence par un jury impartial. Ils ont été passés afin de codifier les gains démocratiques de la Révolution américaine et de protéger le peuple de la nouvelle république d’un retour aux abus qui avaient été commis contre lui sous le joug colonial de la monarchie britannique. Ils représentaient la concrétisation des droits « inhérents et inaliénables » proclamés par la Déclaration d’indépendance à la « vie, la liberté et la poursuite du bonheur ».

Sans pratiquement aucun débat, et au nom de la « guerre globale contre le terrorisme », le Sénat et la Chambre des représentants ont voté une loi permettant l'abrogation de tous ces droits par un président doté de pouvoirs d'État policier qui impressionneraient même le vieux roi George.

En effet, en dépit des tentatives des groupes libéraux et de la fausse gauche pour entretenir l'illusion qu'Obama allait opposer son veto au projet de loi, car il se préoccupe de l'assaut sur les droits démocratiques, la seule inquiétude du président démocrate était que ce projet de loi vienne remettre en question les vastes pouvoirs que lui et son prédécesseur, George W. Bush, s'étaient attribués. Ainsi, la Maison-Blanche est intervenue directement dans le débat pour s'assurer que l'on retire d'une version précédente du projet de loi les passages affirmant explicitement que les citoyens américains arrêtés sur le territoire des États-Unis ne seraient pas soumis à la détention militaire indéfinie.

Obama a déjà clairement fait savoir qu'il fera respecter le pouvoir du président à jeter quiconque en prison militaire sans accusation, ni procès. Il est allé considérablement plus loin que son prédécesseur à la Maison-Blanche en revendiquant le droit d'agir en tant que juge, jury et bourreau dans le meurtre d'État de citoyens américains que l'on a qualifiés de terroristes. Il a exercé ce supposé droit dans l'exécution extrajudiciaire d'Anwar Al-Awlaki et d'autres.

De nombreux démocrates que ont voté en faveur du projet de loi ont exprimé certaines réserves sur les clauses traitant de la détention militaire. La position du chef de la majorité au Sénat, Harry Reid, qui a reconnu que le projet de loi « n'était pas parfait », mais qu'il représentait « une grande réussite pour le soutien de nos troupes », était typique à cet égard. De tels arguments ont une logique bien à eux : les guerres d'agression sans fin des États-Unis à l'étranger sont intimement liées à l'attaque sur les droits démocratiques et sur les conditions sociales au pays.

Toutes deux émergent de la crise historique du capitalisme américain. Cette crise s'exprime de la manière la plus marquée dans la polarisation sociale sans précédent historique qui est devenue un élément déterminant de la société américaine. Le gouffre séparant l'oligarchie financière, qui monopolise la richesse ainsi que le pouvoir politique et économique, de la classe ouvrière, la très grande majorité de la population qui fait face au déclin de ses conditions de vie, au chômage de masse et à la détérioration des conditions sociales, n'a jamais été aussi apparent.

Basés sur ces fondations sociales en décomposition, les droits démocratiques et les formes de gouvernance démocratiques deviennent de plus en plus intenables. L'élite dirigeante est forcée d'établir un nouveau cadre à l'intérieur duquel elle pourra défendre sa richesse et ses pouvoirs, un cadre qui entrera nécessairement en conflit avec les principes établis par la Constitution et la Déclaration des droits des États-Unis.

La création de ce nouveau cadre est en cours depuis plus d'une décennie. Après une longue période caractérisée par le déclin de la démocratie américaine et la croissance des inégalités sociales, il y a eu l'élection volée de 2000, où la majorité de droite de la Cour suprême américaine a installé au pouvoir un président ayant perdu le vote populaire.

Ensuite, les événements du 11 septembre 2001, sur lesquels aucune enquête sérieuse n'a été menée et qui n'ont pas été expliqués convenablement par le gouvernement américain, ont fourni le prétexte pour déclencher deux guerres d’agression et promulguer, avec le soutien bipartite, une multitude de lois répressives, du Patriot Act au Homeland Security Act, à l’adoption de la torture, des assassinats ciblés, la restitution extraordinaire, l’espionnage domestique et la détention illégale en tant que politique officielle d’État.

Ces méthodes ont été poursuivies et intensifiées par Obama, qui a remporté sa victoire électorale de 2008 en grande partie à cause de la révulsion populaire pour les actions de son prédécesseur. Le fait qu'elles aient maintenant été ouvertement inscrites dans la loi par le Sénat contrôlé par les démocrates démontre qu'elles ne sont pas simplement les excès d'un seul président ou le produit d'une idéologie de droite particulière.

Elles sont plutôt le résultat des contradictions de classe à l’intérieur même de la société américaine et de la crise historique du capitalisme américain. Avec la crise financière de 2008 et l’approfondissement continu de la plus sévère crise de puis la Grande Dépression des années 30, le glissement vers des méthodes dictatoriales d’État policier n’a fait qu’accélérer.

Alors que les partisans des mesures adoptées par le Sénat jeudi ont invoqué la supposée menace terroriste omniprésente, leur insistance pour que les États-Unis (eux-mêmes) soit définis comme un « champ de bataille », a une signification plus profonde.

Le développement explosif des manifestations Occupons Wall Street et la campagne de répression policière coordonnée à l’échelle nationale utilisée afin de les disperser ne sont qu’un précurseur de luttes sociales bien plus grandes à venir. Des masses de travailleurs sont poussées dans la lutte des classes par des conditions de vie de plus en plus intolérables.

L’oligarchie dirigeante est consciente que ses politiques visant à faire payer la classe ouvrière pour la crise du système de profit donneront lieu à une opposition sociale révolutionnaire et elle se prépare en conséquence. La classe ouvrière doit faire de même, en mobilisant son pouvoir politique indépendant dans une lutte contre les menaces de dictature d’État policier et du système de profit capitaliste qui en est la source.