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Solidarité avec la grève de Radio France (communiqué d’Acrimed)

Lien publiée le 1 avril 2015

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

http://www.acrimed.org/article4624.html

Depuis le 19 mars, une grève paralyse les antennes de Radio France. 14 jours de grève (à l’heure où nous écrivons) qui confèrent un caractère historique à cette mobilisation, n’en déplaisent aux Cassandre qui prophétisaient, au bout de 24 heures, son essoufflement.

Une grève exceptionnelle pour répondre à une situation exceptionnelle. C’est le 13 mars que cinq syndicats [1] ont déposé un préavis de grève illimitée à partir du 19 mars : « face au désengagement de l’État, à l’étranglement budgétaire actuel, aux projets de restructurations de la direction de Radio France, qui portent atteinte aux emplois, aux métiers, aux contenus, à l’organisation du travail, les salarié-e-s manifestent leur refus de la démolition programmée de Radio France et de ses missions de service public » [2].

Radio France a en effet adopté en janvier dernier un budget en déficit de 21,3 millions d’euros, et s’est engagée par la suite à établir un plan de 50 millions d’euros d’économies d’ici 2019. Un plan d’économie qui s’opérerait notamment sur la masse salariale, avec la proposition du PDG Matthieu Gallet d’un « plan de départs volontaires » concernant 200 à 300 salariés, soit autant de suppressions de postes. Un plan qui, selon les syndicats, ne fera que dégrader encore un peu plus les conditions de travail des salariés de Radio France et la qualité des programmes de ses différentes antennes.

En effet, le mouvement en cours n’est pas, comme le rappelait l’intersyndicale le 24 mars dernier, une « grève préventive », évoquant notamment le fait que « les coupes ont déjà commencé et les plus touchés sont les précaires ». Une radio de service public déjà à l’agonie et à laquelle les pouvoirs publics, adeptes de l’austérité budgétaire, demandent toujours plus avec toujours moins de moyens. Or, ainsi que le souligne Ludovic Piedtenu, journaliste au service international de France Culture et président de la Société des journalistes de Radio France [3], « l’information ne se bricole pas » :

Alors que le PDG de Radio France annonce 50 millions d’euros d’économie d’ici 2019, notre métier est devenu de plus en plus compliqué, au quotidien. Savez-vous que nous mettons souvent de longues journées avant de prendre la décision de partir en reportage, le temps de vérifier si notre budget le permet ? C’est un frein à l’information.

Les budgets de reportages sont chaque année un peu plus contraints, la réflexion est à la fusion de services entre rédactions, une crainte pour les identités éditoriales de chaque chaîne. Nos sites Internet regorgent déjà de publicités intrusives, l’heure du bricolage et de la vision purement comptable approche. Sauf que l’information ne se bricole pas.

Et ce ne sont pas les déclarations de Matthieu Gallet, PDG adepte des dépenses somptuaires, qu’il s’agisse de rénover son bureau pour plus de 100 000 euros ou de s’offrir des « conseils en communication » pour 90 000 euros par an, qui pourront rassurer les salariés et les auditeurs. En témoignent ces propos, tenus sur l’antenne de Radio France : « Radio France n’a pas les moyens de financer deux orchestres symphoniques, un chœur et une maîtrise pour un coût de 60 millions, ne générant que 2 millions de recettes de billetterie ». En clair, pour faire des économies, supprimons l’un des deux orchestres de Radio France. Une conception toute particulière de la culture…

Face à l’entêtement du gestionnaire Matthieu Gallet et face au refus des autorités de prendre leur responsabilité, Acrimed tient à renouveler son soutien aux salariés en grève qui, à la différence despseudo-rebelles Pascale Clark et Patrick Cohen [4], ne se mobilisent pas pour des intérêts personnels ou corporatistes mais pour la défense du service public. C’est en effet l’avenir du service public radiophonique de l’information et de la culture qui est en jeu, service public déjà trop malmené et loin de remplir l’ensemble de ses fonctions.

Le gouvernement doit prendre ses responsabilités et entendre la voix de celles et ceux qui font vivre chaque jour Radio France et non de piètres gestionnaires, amoureux des boiseries de luxe, qui n’ont pas la moindre idée de ce qu’est la vie d’une radio : les coupes budgétaires doivent cesser ; les moyens doivent être mis sur la table pour que Radio France vive et ne se contente pas de survivre ; les salariés doivent pouvoir travailler dans des conditions décentes leur permettant d’offrir au public des programmes de qualité.

Plus largement, c’est la question du développement d’un véritable service public de l’information et de la culture (radiophonique, audiovisuel, presse écrite…) qui est posée [5] L’information et la culture, au même titre que la santé et l’éducation, sont des biens communs qui devraient être soustraits aux logiques marchandes : ne serait-ce pas la moindre des choses pour un gouvernement qui se prétend encore « de gauche » d’inverser les tendances à l’œuvre depuis plusieurs décennies plutôt que de les accompagner servilement ?

Notes

[1] Confédération française démocratique du travail (CFDT), la Confédération générale du travail (CGT), le Syndicat national Force ouvrière de la radio et de la télévision (SNFORT), l’Union syndicale Solidaires, l’Union nationale des syndicats autonomes (UNSA).

[2] Extrait du tract intersyndical, à consulter ici.

[3] Dans une tribune où, soulignons-le, il ne prend pas position en faveur (ou en défaveur) de la grève.

[4] Patrick Cohen qui s’est de nouveau distingué la semaine dernière en affirmantqu’un conseiller en communication à 90 000 euros n’était pas « très bien rémunéré »

[5] À propos du service public de l’information et de la culture, voir, entre autres :« Nous avons des propositions ».