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Octobre chaud en vue pour Air France

Lien publiée le 21 septembre 2015

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

http://tempsreel.nouvelobs.com/economie/20150918.OBS6099/octobre-chaud-en-vue-pour-air-france.html

Air France va t elle réduire ses vols et annuler ses commandes d'avion? Oui, si son personnel refuse d'augmenter son temps de travail d'ici fin septembre.

La compagnie Air France va-t-elle se rétrécir volontairement, abandonner des avions, fermer une dizaine de lignes long courrier, et licencier du coup des milliers de salariés dès cet hiver ? Ce qui était en juillet une menace théorique est devenu une peur concrète pour l’ensemble des salariés qui viennent de déclencher un appel à la mobilisation  pour le 5 octobre. Mais que les passagers se rassurent : le mouvement ne devrait pas déboucher  - pour le moment - sur des annulations de vols ce jour-là.

C’est en effet le 5 octobre que se tiendra un CCE (comité central d’entreprise) qui sera informé des nouveaux projets d’Alexandre de Juniac, le président du groupe Air France-KLM.  Deux conseils d’administration, celui d’Air-France, puis celui de sa maison mère Air-France KLM, auront fait un choix les jours précédents : soit le maintien du plan de développement actuel  de la compagnie (le Plan A dans le vocabulaire maison), soit la réduction d’Air France : la fermeture de dix lignes importantes, puis le transfert de ses futurs avions en commande vers ses compagnies sœurs au sein du groupe : Transavia et KLM (le plan B redouté).

La direction le martèle au personnel depuis ce printemps :

On ne demande pas la lune, mais une réduction des couts de 10% d’ici 2017. On ne fera pas de croissance, on n’ouvrira plus de  nouvelles lignes si on n’est pas certains qu’elles seront rentables."

Cela veut dire : soit vous travaillez plus, sans augmentation de salaire, soit on volera moins et vous paierez la facture. C’est particulièrement cruel pour les pilotes, qui peuvent perdre leurs habilitations quand ils ne volent pas suffisamment longtemps dans l’année. La direction a un modèle : British Airways, qui a coupé violement son réseau en 2001, avant de rebondir et de re-ouvrir petit à petit toutes ses lignes, non sans avoir obtenu des gains de productivité élevés de son personnel au passage.

Partie de poker 

Le "plan d’attrition" a été mis sur la table cet été par Frédéric Gagey, le président d’Air France, pour mettre les pilotes devant leurs responsabilités. Entre Philippe Evain, le patron du SNPL Air France, principal syndicat des pilotes, et la direction de la compagnie, la partie de poker durait depuis des mois. L’enjeu, ce sont les coûts d’Air France, supérieurs selon la direction à la moyenne des grandes compagnies européennes comparables comme Lufthansa et très supérieurs à ceux des compagnie du Golfe ou des lowcosts européennes, qui prennent la compagnie en tenaille. Trop de vols ne sont pas rentables et la compagnie ne sait pas encore si elle sera profitable cette année, après plusieurs années de lourdes pertes.

Pour réagir, le groupe présidé par Alexandre de Juniac avait mis au point une stratégie : d’abord, abaisser les coûts unitaires de la compagnie grâce à une forte hausse de productivité du personnel : le plan Transform. Ensuite, développer sa filiale à bas couts  Transavia, pour remplacer les vols Air France déficitaires et mieux résister à Easy jet, Vueling ou Ryan air.

C’est contre ce plan que les pilotes s’étaient mis en grève pendant deux semaines en début d’année. Une grève impopulaire, tant auprès des clients que des autres salariés, qui s’est terminée par une déroute. Elle a  laissé des cicatrices et des incompréhensions : les négociations sont désormais difficiles entre les pilotes et la direction, alors qu’auparavant, ils travaillaient main dans la main. Le président d’AF, Frédéric Gagey, a décidé au printemps de pousser un peu plus loin l’avantage qu’il croyait avoir sur ses pilotes : il a affirmé que ses pilotes n'avaient pas rempli les engagements de productivité auxquels ils s’étaient engagés dans le plan "Transform", alors que le personnel au sol, les hôtesses et stewards avaient joué le jeu. Gagey veut donc remettre en cause les accords sociaux. La direction estime qu’elle a ce droit, en vertu du blocage de la situation. Mais le SNPL lui conteste ce droit. C’est la justice qui tranchera le 16 octobre.

Menaces

Mais entretemps, Frédéric Gagey a lancé un nouveau plan d’économies, le plan Perform, qui prévoit de nouvelles hausses du temps de travail. Il veut obtenir l’accord du personnel avant fin septembre… ou alors, il menace de réduire les vols longs courrier du groupe et d’annuler les commandes d’avions. Le groupe n’y perdrait rien à l’échelle globale, puisque KLM et Transavia en profiteraient. Par contre Air France deviendrait une petite compagnie sans avenir avec des couts élevés. Les pilotes ont refusé tout l’été de négocier ce nouveau plan, séchant six réunions. Et le reste du personnel se cabre. La direction voit s’approcher la deadline. Peuvent-ils négocier un préaccord en dix jours ? Cela semble impossible.

Pour autant, le reste du personnel ne condamne pas les pilotes. La direction a réussi à ressouder entre eux la plupart de ses salariés.

"Nous, les hôtesses et stewards, nous avions signé le plan Transform, et nous avons augmenté notre productivité de 20%, sans augmentation de salaire. La direction s’était engagée à maintenir cet accord jusqu’en 2016, et elle renie sa parole. Avec le Plan Perform, elle réclame déjà de nouvelles hausses du temps de travail ! Ce n’est pas possible. On dirait que toutes les compagnies européennes s’entendent pour réduire les salaires. C’est la course sans fin. Transavia va engager des hôtesses à 700 euros par mois au Portugal, ou à 900 euros à Munich. Chez Lufthansa et British airways aussi, les directions poussent dans la même direction. Mais on ne pourra jamais lutter contre les lowcosts et les compagnies du Golfe. Il faut des règles européennes qui empêchent cette dérégulation et ces réductions de salaires", estime un délégué du personnel  PNC de l’Unsa. Et comme cela semble hors de question, on en voit pas très bien comment le dialogue va se renouer entre syndicats et direction.

Si le personnel reste uni, et mobilisé, si la direction pousse réellement son plan B, la mobilisation du 5 octobre ne sera donc qu’un zakouski : l’automne promet d’être perturbé dans les aéroports français…