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Etat d’urgence: "La grande majorité des mesures prises ont touché des musulmans"

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Lien publiée le 4 février 2016

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

(Libération) Amnesty International et Human Rights Watch s'inquiètent des atteintes aux libertés sous ce régime d'exception et demandent au gouvernement ainsi qu'aux parlementaires de ne pas le prolonger.

Le Défenseur des droits, Amnesty International et Human Rights Watch (HRW) : en une journée, trois voix qui portent ont critiqué vertement l’état d’urgence et les risques que ce régime d’exception fait peser sur les libertés. En présentant son rapport annuel, jeudi matin, le Défenseur des droits s’est inquiété de la «restriction des libertés durable et permanente si l’exception devient la règle».

Après cinq rapporteurs spéciaux des Nations Unies, le secrétaire général du Conseil de l’Europe, la Ligue des droits de l’homme soutenue par 450 universitaires, deux des plus importantes organisations de défense des droits humains s’alarment à leur tour. «Nos conclusions sont concordantes», a souligné la présidente d’Amnesty en France, Geneviève Garrigos. Les deux ONG demandent au gouvernement de ne pas prolonger l’état d’urgence, sauf à «démontrer réellement que la situation constitue un danger public exceptionnel si élevé qu’il menace l’existence de la nation».

Pour la dirigeante d’Amnesty se pose la question de la proportionnalité. D’un côté, cinq enquêtes ouvertes par la section antiterroriste du parquet de Paris compétent sur l’ensemble du territoire. D’un autre, «des droits humains violés : le droit à la vie privée, à l’emploi, à la libre circulation et la liberté d’expression». Pour Amnesty, l’équilibre est rompu, de telles atteintes aux libertés ne peuvent donc pas s’inscrire dans la durée.

«Arbitraire de ces mesures»

L’ONG a interrogé 60 personnes touchées par les deux mesures phares, les assignations à résidence (400 depuis le 13 Novembre) et les perquisitions administratives (3 210 fin janvier). Un assigné devait être présent à la conférence de presse. Il en a été empêché : «Il a été placé en garde à vue hier soir parce qu’il n’avait pas pointé hier. Il assistait à son audience au tribunal administratif où il contestait son assignation», raconte Marco Perolini. Pour ce chercheur d’Amnesty, l’anecdote résume bien le caractère «arbitraire de ces mesures».

Issa a quant à lui pu intervenir par téléphone. Interdit de sortie du territoire début novembre, il a été perquisitionné puis assigné à résidence, la police le soupçonnant de nourrir des projets de départ en Syrie. Ce qu’il récuse formellement. «Stupéfait, abasourdi», il dit craindre la justice : «Je suis né en France, je vis en France, je suis de religion musulmane, d’origine algérienne et j’ai peur.» D’autres témoignages similaires parsèment le rapport d’Amnesty.

«C’est comme s’ils nous punissaient pour rien» a confié à l’ONG un membre de l’association de la mosquée d’Aubervilliers, perquisitionnée le 16 novembre. «Les mesures d’urgence suivent une stratégie aveugle. Elles tapent surtout sur les musulmans, sans éléments fondés. La plupart des cas ne donnent aucune suite judiciaire.» déplore Elias, qui gère un site Internet d’information et dont le domicile a été perquisitionné le 4 décembre.

Piège en deux phases

Amar, perquisitionné le 16 novembre, résume en deux phrases le piège dans lequel il se retrouve : «Il me semble que si vous affichez votre religion […], vous pouvez être considérés comme "radical" et donc pris pour cible. Si l’on s’efforce de ne pas trop afficher sa religion, ils pensent que l’on a quelque chose à cacher. Nous ne savons pas qui nous devons être, comment nous devons nous comporter.»

HRW met d’ailleurs en garde le gouvernement sur ce point précis. «La grande majorité des mesures prises ont touché des musulmans», indique la chercheuse Izza Leghtas, qui souligne le risque que prospère «le sentiment d’être des citoyens de seconde zone». Ce risque se double d’un autre, poursuit-elle : «Aliéner et humilier des alliés qui pourraient faire des signalements.» Un jeu perdant perdant, en somme. Moins de libertés et moins d’appuis dans la lutte contre le terrorisme, objectif premier de l’état d’urgence.