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Deuxième #NuitDebout à Paris
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
A minuit ce vendredi soir, des centaines de personnes étaient présentes place de la République à Paris
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(Le Monde) A 18 heures, vendredi 1er avril, place de la République à Paris, quelques centaines de personnes commencent à se rassembler à nouveau, répondant à l’appel de la #NuitDebout. La veille, ils étaient plusieurs milliers à occuper la place, pour la première nuit. Après une journée de manifestation contre la loi travail, l’idée était simplement de ne pas rentrer chez soi.
Aujourd’hui, il s’agit de « tenir » cette place. A l’assemblée générale qui débute, alors que peu à peu les rangs grossissent, on discute des objectifs, assis en cercles. Chacun prend la parole et il faut parler fort. Ce soir, « on n’est pas sûrs du tout d’avoir une sono ».
« Hier, le but, c’était de lancer la dynamique », explique Kyllan, un étudiant de 24 ans, qui fait partie du noyau d’une dizaine de personnes chargées de la communication du mouvement. « A Paris, on était plusieurs milliers en début de soirée. Quand les CRS nous ont demandé d’évacuer, on était encore quelques centaines »,témoigne-t-il.
« Comment rassembler ? Comment occuper la place jusqu’à lundi ? On fait quoi après ?... », se demande-t-on. Puis un Espagnol prend la parole, il dit avoir participé au mouvement des Indignés : « A mon avis, il faut qu’on s’organise. Je propose le modèle qu’on avait suivi à Madrid. » Assentiment général.
« J’ai discuté avec nos camarades de Podemos, ils ont commencé encore moins nombreux et étaient rapidement cinq mille. Si on occupe toute la place, les autorités ne pourront plus nous déloger, sans être très violents », lance ensuite une femme à l’assistance, qui appelle à organiser des brigades dans le métro pour inciterdes gens à participer.
Plusieurs grandes banderoles colorées en tissu apparaissent, représentant deux scènes avec des poissons. « Il y a la situation aujourd’hui avec des petits poissons désorganisés qui se font manger par un gros mais aussi les petits poissons qui s’organisent pour chasser le gros », explique Corentin Vacheret, 25 ans, au chômage. La veille au soir, avec six autres personnes qu’il a rencontrées, ils ont décidé de fabriquer ces banderoles, à partir d’un symbole « qui représente bien ce qu’on voudrait qu’il se réalise à travers ce mouvement, et qui tombait aussi bien pour le 1er avril ».
S’organiser en direct
Il faut aussi être pratiques et organiser la nuit. Pour occuper la place, il faut de l’eau, se réchauffer, de la nourriture et aussi « ne pas offrir de raisons aux autorités de nous déloger ». Pas question de faire un feu donc, explique Loïc, qui raconte l’expulsion de la place vendredi matin, vers 5 heures, qui « s’est faite proprement ». La raison invoquée : un feu qui brûlait sur le parvis, allumé pour se réchauffer.
Nicolas Weiss, éducateur spécialisé, a lui aussi passé presque toute la nuit hier sur la place, après une journée de manifestation. Pour lui, « il faut réagir face à la misère sociale » : « On n’est pas des citoyens, dénonce-t-il. On est juste des électeurs ». L’ambiance était « conviviale et revendicative », décrit-il, en avouant avoir eu froid, trempé après la journée dehors à défiler.
Quels que soient les âges ou les professions, tous revendiquent leur autonomie par rapport aux partis politiques, syndicats, et autres organisations.
Après une heure de débats, des commissions se mettent au travail : communication, logistique, animation, assemblées citoyennes. Il y a même un « service d’accueil et de maintien de la sérénité », « c’est un service d’ordre mais avec un autre esprit », explique-t-on.
La première nuit avait été organisée plusieurs semaines à l’avance par un groupe de personnes : cette fois-ci, il faut se débrouiller en direct. L’infirmerie a besoin de produits de base, un stand commence à préparer des sandwichs et quelqu’un sert des cafés.
« Beaucoup plus nombreux qu’hier »
Un petit groupe d’intermittents discute. Pour Claire, « il faut rester, pas juste pour dire qu’on n’est pas d’accord. Il faut construire quelque chose ».
Rémi, 25 ans, le dit avec insistance, il n’est pas « seulement contre la loi travail ». « On avait une bâche avec “Info en continu, écran de fumée”, pour dénoncer l’information de mauvaise qualité », explique-t-il. Salarié dans une entreprise de business development, il fait remarquer à quel point le mouvement est mélangé, « pas spécialement des marginaux ». En début de soirée, tous les âges sont représentés, mais « à partir d’une certaine heure, ça se rajeunit, il fait froid », ajoute-t-il.
La température baisse effectivement peu à peu, à 20 heures, il fait déjà à peine 10 degrés. Plusieurs amis arriveront vers 2 heures du matin pour prendre le relais. Il espère que les policiers ne chargeront pas. Ils sont « beaucoup plus nombreux qu’hier » ce soir tout autour de la place, plusieurs dizaines sont disséminées sur la circonférence du parvis central.
Julien Kien, professeur d’histoire-géographie trentenaire dans un collège à Sarcelles, participait au « media center » de la première #NuitDebout. Ils se sont d’abord installés au Mc Do, sur le côté de la place, puis dans un restaurant « avec des prises ». Toute la nuit, ils ont animé le fil d’information sur Twitter. Ancien militant PS, il est « choqué par les positions que défend aujourd’hui le gouvernement : la déchéance de nationalité, les réponses uniquement sécuritaires... ». Par rapport à la loi travail, il se sent avant tout concerné pour ses élèves : « Je suis là pour eux qui vivent déjà dans des conditions difficiles et seront touchés de plein fouet par cette loi. »
Ce soir, à 20 heures, il ne sait pas encore comment ils vont s’organiser, mais avec son ordinateur et son téléphone dans son sac, il est prêt à reprendre du service.