Mi-goguenard, mi-méprisant, le patron de l’information à France télévisions est apparu sur le field du rasoir ce dimanche 10 mars dans “Le Supplément” sur Canal+… Nommé en décembre avec pour mission principale de lancer une chaîne d’info pour le groupe (avec Radio France) d’ici à la rentrée, Michel Field fait face à des résistances à son projet, qui lui ont valu dans l’émission d’Ali Baddou un reportage justement intitulé “Michel Field bouscule France télé”.

Pas plus tard que ce jeudi 7 mars en effet, une grève a paralysé une partie du groupe (composé d’environ 1.200 salariés), suivie par près de 60% des salariés de France 3 et même par presque 100% de ceux de Francetv info, le site d'actualités de France télé. ”Pas énormément suivie”, balaie pourtant sur Canal+ Michel Field, qui s’en prend aussi, rigolard, aux reproches qui lui sont faits sur ses méthodes de direction : “Disons que ça fait partie d’un travail de propagande, d’agit-prop que je connais bien (...) pour l'avoir pratiqué dans ma jeunesse donc franchement, comme disait Jacques Chirac, ça m’en touche une sans bouger l’autre…”. Classe.

"Vous êtes un peu des têtes de noeud !"

Le patron n’aura pas une attitude plus ouverte face aux autres réserves qui sont exprimées à son endroit, par exemple sur son manque d’expertise dans le domaine du numérique (et ce, alors que la rédaction numérique est une partie importante du projet de fusion des rédactions avec Radio France). Après avoir pourtant admis lui-même que ce qu’il avait de plus à apporter au groupe était “25 ans de fréquentation du monde politique” (sic), il envoie valser les critiques d’une ironie sur ces “journalistes syndicalistes qui sont la grande conscience morale de notre métier”. Etrange posture de la part d’un homme qui, comme il le rappelle lui-même, a derrière lui un passé trotskyste. L’âge venant ne serait-il qu’un naufrage à tribord ?

Etonnés, les salariés de France télé doivent toutefois ne l’être qu’à moitié, eux qui assistent tous les jours, dans le dialogue qu’ils tentent d’instaurer avec leur directeur de l'info, au show empreint de condescendance et parsemé de grossièretés du sieur Field. Comme ce 7 mars dernier quand, venu leur présenter son projet, et parlant de la rédaction de de Francetv info, il a lâché : "Vous en êtes un peu la tête de noeud, pardon, la tête de pont" ! Lapsus qu’il n’a qu’à moitié corrigé :  "Mais en ce moment, c'est vrai, vous êtes un peu des têtes de noeud !" Ou encore lorsque, discutant du futur nom de sa chaîne info, il a lancé en réunion : “Moi je m’en tape, on prendra le nom qui foutra le moins la merde”. Rassurante vision…

Mais rien ne fait douter le boss, ni 100% de grévistes au sein d’une rédaction, ni les reproches qui lui sont faits sur son style. Lui qui approuve, au "Supplément" toujours, cet autre mot de Jacques Chirac : “Un chef, c’est fait pour cheffer”. Et envoie encore à l’un de ses salariés, Nicolas Poincaré, le présentateur de "Complément d’enquêtes" qui paraît en ce moment sur la sellette : “Nicolas si tu nous écoutes, ne te suicide pas tout de suite !”. Comme si le suicide au travail pouvait être un sujet de franche rigolade pour un dirigeant d’un groupe sous tension. Au terme de cette séquence gênante, et ayant remarqué dans le reportage qui lui était consacré que trois livres de la collection “pour les nuls” étaient étalés sur sa table, on ne peut que lui conseiller la lecture de celui-ci : “Le management pour les nuls”.