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Incidents à la manif de Toulouse du 28/04 : la CGT doit se questionner
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
[mise à jour 30/04 18h] Nous ne croyions pas si bien dire. Nous ajoutons en fin d'article le télégramme explicite de Cazeneuve incitant les préfets à collaborer avec les services d'ordre des manifestations... Information du Parisien de cet après-midi]
Nous avions été alertés par des lecteurs toulousains sur l'attitude assez suspecte de l'organisation des manifestations de la CGT à Toulouse, sous couvert d'une UD réputée "plutôt radicale"... Lors des manifestations de fin mars, son attitude à l'égard des jeunes et de la police semblait assez contestable. Voire pire. Faute d'éléments précis, nous avions gardé l'information "sous le coude", en attendant de voir l'évolution des choses.
Nous venons de découvrir un témoignage précis d'un militant CGT sur un blog de Mediapart, et nous le publions ci-dessous, car il va dans le même sens que nos lecteurs...
L'organisation d'une manifestation, sa protection dans des séquences où la violence policière est féroce est une question hautement politique. Le rôle du Service d'Ordre est bien sûr de protéger les participants qui ne sont la plupart pas préparés à affronter la violence policière. Mais de là à servir d'auxiliaire de police pour faciliter la répression des jeunes révoltés, il y a un gouffre !
Le violence aujourd'hui c'est celle des lois anti-ouvrières, celle de la précarité, de la souffrance au travail, celle morts de l'amiante, celle des licenciements, celle des syndicalistes menacés de prison. La violence c'est Rémi Fraisse tué à Sivens, c'est la chasse aux militants, la BAC dans les quartiers, les expulsions d'immigrés, la chasse aux migrants, la réduction de la protection sociale (retraites, santé), c'est les miliiards aux patrons, les parachutes dorés, les bonus et salaires mirifiques. Voilà la violence capitaliste, la violence que nous subissons tous les jours.
Voilà la source de notre révolte à tous, et de la révolte violente d'une partie des jeunes.
La CGT ne peut pas reprendre le discours pacifiste, renvoyer toutes les violences dos à dos, reprendre le discours sur les casseurs, et au final se faire auxilitaire des préfecures. Il y a un choix à faire, savoir dans quel camp on est, et c'est un choix de classe : le choix de la révolte de la jeunesse contre une société barbare et sans avenir, contre le système capitaliste, ou le choix de la préfecture et de ses robocops, celui de Valls et Cazeneuve. La polémique a démarré sur l'affiche d'Info Com' ("Violences policères : 100% avec Info Com'"), manifestement elle n'est pas terminée.
Le gouvernement a décidé de la manière forte pour faire peur et faire plier un mouvement qui est en train de s'ancrer dans la durée, même s'il ne s'élargit pas pour l'instant. A Paris, Rennes, Nantes, Strasbourg, Montpellier, la répression a été féroce. Des blessés, des inculpations, comme ceux qui ont comparus hier à Saint-Denis. L'heure bien à savoir dans quel camp on est : celui de Hollande/ Valls/El Khomri/Cazeneuve, ou celui de la révolte contre cette société-là, dont on ne veut plus !
Le témoignage du camarade toulousain
Ce 28 avril 2016, lors de la manifestation à Toulouse, comme à Paris et d’autres villes de France, des incidents ont éclaté entre les manifestants et les forces de l’ordre et on compte au moins un blessé parmi les manifestants.
Le manifestant blessé l’a été à la main par une grenade explosive lancée par les forces de l’ordre.
Je ne serai pas le nième commentateur regrettant que « quelques casseurs isolés aient gâché une si belle manifestation » par ailleurs, il est vrai créative, festive et très dynamique (12 000 manifestants selon les organisateurs).
Entre ceux qui se sont affronté aux forces de police et le reste du cortège, il n’y avait pas de différence de nature mais une différence de degré dans la colère exprimée.
Je fais partie de ces manifestants qui ont été très choqués que les organisateurs de la manifestation, aidée de son service d’ordre, décident de faire bifurquer le cortège, 2 heures après son départ, par une petite rue adjacente laissant le groupe placé à l’avant, sans doute plus déterminé, s’affronter avec les forces de police, et cela sur injonction de la préfecture de la Haute-Garonne comme indiqué dans son communiqué :
« Lors de la manifestation se déroulant à Toulouse dans le cadre de la journée nationale interprofessionnelle de mobilisation, de manifestation et de grève, contre le projet de loi Travail, des jets de projectiles très nourris ont eu lieu contre les forces de l’ordre, par des individus aux visages dissimulés situés en tête cortège. Deux policiers ont été légèrement blessés au crâne. Après contact avec les organisateurs, il a été décidé d’interrompre la manifestation à hauteur de la rue du Rempart Saint-Étienne. La dislocation de la manifestation est en cours. »
A ce moment-là, Il y a eu de violentes altercations entre certains participants à la manifestation et les membres du service d’ordre empêchant les premiers de rejoindre la tête du cortège. Le service d’ordre de la CGT doit-il être un supplétif des forces de l’ordre ? Est-ce le rôle de la CGT « d’encadrer » les mouvements jeunes et d’éviter tout débordement hors du cadre fixé par le syndicat lui-même ?
Après cela, une bonne partie du cortège a malgré tout décidé de rejoindre la tête et sans doute pour cette raison, par la masse critique atteinte, les forces de police ont décidé de ne pas déclencher d’offensive, décrédibilisant ainsi la mauvaise décision prise par les organisateurs du mouvement.
Au moment où dans notre pays, nous avons la formidable opportunité que la jonction se fasse entre la nuit debout, jeunes étudiants et lycéens, salariés, retraités, fonctionnaires de l’éducation nationale, de la santé, territoriaux, agriculteurs, intermittents du spectacle, cheminots, etc … (désolé pour ceux qui sont oubliés ici mais la liste peut être très longue …) pour refuser la loi El Khomri et le monde qui va avec, la CGT mue par ses forces conservatrices choisit une autre voie, la sienne propre.
Le syndicat se revendique pourtant une force de transformation sociale alors il faut que ses dirigeants se posent la question de comment mieux opérer la jonction avec les forces contestataires et d’écouter même (et surtout) celles les plus en colère. Ce n’est pas en s’opposant à elles, qu’elle gagnera la bataille contre la loi travail et bien d’autres batailles encore à venir qui peuvent, c’est vrai, la bousculer dans son héritage productiviste et pour la défense d’une industrie qui doit elle aussi évoluer face aux enjeux démocratiques et environnementaux.
Je suis syndiqué CGT parce que c’est un des rares syndicats qui n’est pas encore vendu au capital, capable encore de résister aux forces très puissantes patronales et de la finance. Cette force syndicale est indispensable sans quoi la casse parmi les salariés serait plus terrible encore, mais pour que le syndicat garde ses adhérents et qu’il en gagne plus encore, il doit se mettre à l’écoute et rester solidaire des citoyens ou des représentants de la société civile qui sont tout autant et voire plus encore pour certains révoltés par l’idéologie néo-libérale en train d’emporter toute notre humanité.