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Loi Travail: Les cinq points dont les députés vont le plus débattre
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
SOCIAL « 20 Minutes » passe en revue les mesures du projet de loi Travail qui devraient être les plus discutées par les députés…
Le très chahuté projet de loi Travail arrive ce mardi à l’Assemblée nationale. Les députés ont jusqu’au 17 mai pour se prononcer sur ce texte qui a déjà été modifié début avril par lesdéputés siégeant à la commission des Affaires sociales. Les discussions s’annoncent animées puisque près de 5.000 amendements ont été déposés – soit autant que lors de l’examen du projet de loi sur le mariage pour tous. Les débats seront d’autant plus vigoureux que le gouvernement a engagé la « procédure accélérée » pour ce texte, obligeant les députés à l’examiner en une seule lecture, contre deux habituellement. 20 Minutes revient sur les cinq points qui font le plus débat.
1) Licenciement dans les PME
Ce que prévoyait le projet de loi : Il voulait préciser dans quelles conditions une entreprise peut procéder à un licenciement économique en donnant une définition à la difficulté économique. Le gouvernement n’avait pas fait de distinction entre les petites et les grandes entreprises : il donnait la même définition à la difficulté économique, à savoir enchaîner « une baisse des commandes ou du chiffre d’affaires » pendant « plusieurs trimestres consécutifs, en comparaison à la même période de l’année précédente ». Il confiait aux syndicats le soin de définir, dans chaque branche, le nombre de « trimestres consécutifs » à retenir et, à défaut d’accord, souhaitait que le quota de quatre trimestres s’applique.
Ce que la commission des Affaires sociales a changé : Ses députés ont introduit des distinctions selon la taille des entreprises. Ainsi, pour procéder à des licenciements économiques, une entreprise devra avoir subi une baisse de ses commandes ou de son chiffre d’affaires pendant un trimestre si elle compte de moins de 11 salariés, pendant deux trimestres consécutifs si elle dénombre moins de 50 salariés, pendant trois trimestres consécutifs si elle a moins de 300 salariés, et pendant quatre trimestres consécutifs au-delà. Le tout étant comparé par rapport à l’année précédente.
Ce qu’en pense l’expert : Pascal Lokiec, professeur de droit social à l’université Paris Ouest-Nanterre-La Défense : « Cette évolution peut conduire à des effets pervers. J’en note deux. Primo, une difficulté économique étant désormais caractérisée par une simple baisse du chiffre d’affaires, une entreprise pourra procéder à des licenciements si ses résultats sont bons mais qu’ils se révèlent moins exceptionnels que ceux de l’année précédente. Secundo, une start-up de quatre salariés pourra plus facilement licencier qu’une PME de 30 personnes même si la première réalise un chiffre d’affaires trois fois plus conséquent que la seconde. Il me semble plus pertinent de conserver la souplesse du système actuel qui donne au juge le pouvoir d’apprécier, au cas par cas, la difficulté réelle d’une entreprise. En outre, il est probable que le Conseil constitutionnel revienne sur ces dispositions, les jugeant inconstitutionnelles puisqu’elles créent des différences de traitement entre petites et grandes entreprises. »
2) Licenciement dans les groupes
Ce que prévoyait le projet de loi : Il voulait qu’une multinationale rencontrant des difficultés économiques en France puisse licencier même si ses autres filiales à l’étranger se portent bien.
Ce que la commission des Affaires sociales a changé : Rien. Toutefois, le député PS Christophe Sirugue, membre de la commission des Affaires sociales et rapporteur de la loi Travail à l’Assemblée nationale, a déposé un amendement pour revenir au système actuel, c’est-à-dire à l’appréciation des difficultés économiques d’une entreprise au niveau international.
Ce qu’en pense l’expert : Pascal Lokiec, professeur de droit social à l’université Paris Ouest-Nanterre-La Défense : « L’amendement de M. Sirugue est une bonne chose car la proposition du gouvernement va à l’encontre de toute la jurisprudence française. Elle relève également du contresens historique : puisque les entreprises se mondialisent, n’est-il pas pertinent d’apprécier leurs difficultés sur tous les territoires plutôt que sur un seul ? Si le gouvernement fait une telle proposition, c’est parce qu’il estime que le droit du travail français est un frein à l’investissement étranger. Or, ce n’est pas le cas : les étrangers continuent d’investir en France comme le prouvent les enquêtes ».
3) Taxation des CDD
Ce que prévoyait le projet de loi : Rien. Mais le Premier ministre Manuel Valls l’a assuréaux organisations de jeunesse mi-avril : le gouvernement introduira un amendement visant à surtaxer les contrats courts lors de l’examen du projet de loi à l’Assemblée nationale.
Ce que la commission des Affaires sociales a changé : Rien, le gouvernement ayant fait cette annonce trois jours après que la Commission des affaires sociales a fini d’examiner le texte. Toutefois, Christophe Sirugue prévient : il n’est pas favorable à la mesure et ne la défendra pas en séance.
Ce qu’en pense l’expert : Pascal Lokiec, professeur de droit social à l’université Paris Ouest-Nanterre-La Défense : « Rien, dans la mesure où les conditions de la surtaxation des CDD, c’est-à-dire les types de contrats courts concernés et le barème de la surcotisation, ne peuvent pas figurer dans la loi puisqu’elles doivent être négociées par les syndicats. La surtaxation des CDD fait d’ailleurs partie des discussions que les organisations conduisent actuellement dans le cadre de la réforme de l’assurance chômage. »
4) Accords offensifs sur l’emploi
Ce que prévoyait le projet de loi : De permettre aux entreprises, après avoir signé un accord avec leurs syndicats ou après avoir obtenu un « oui » à un référendum, de réorganiser les jours/horaires de travail et/ou d’augmenter le temps de travail de leurs salariés et ce, à rémunération constante, si elles affirment le faire en vue de « préserver » ou de « développer » l’emploi. Si un ou plusieurs salariés refusent de se plier à ces nouvelles règles, ils peuvent être licenciés pour « cause réelle et sérieuse ».
Ce que la commission des Affaires sociales a changé : Les salariés devront être licenciés non pas pour « cause réelle et sérieuse » mais dans le cadre d’un licenciement individuel pour « motif économique ». Ce qui leur permettra d’être mieux accompagnés dans leur reclassement. Christophe Sirugue affirme également, dans un entretien au Parisien-Aujourd’hui en France, avoir déposé un amendement prévoyant la création d’une « sorte de comité de surveillance » qui examinera « une fois par an » les accords d’entreprises passés et « fera des recommandations, y compris pour demander des corrections ».
Ce qu’en pense l’expert : Pascal Lokiec, professeur de droit social à l’université Paris Ouest-Nanterre-La Défense : « La correction apportée n’est pas du tout suffisante. Des entreprises florissantes vont pouvoir modifier le temps de travail de leurs salariés, changer leurs périodes de congés, revoir leurs astreintes ou encore instaurer le travail le dimanche à la seule condition qu’elles promettent de préserver ou de développer l’emploi… Juridiquement, il n’existe rien de plus souple comme formulation. De plus, les salariés qui ne seront pas d’accord n’auront pas la possibilité de contester leur licenciement devant les prud'hommes. Enfin, si plus de 10 salariés sont licenciés parce qu’ils refusent l’accord, l’entreprise ne sera pas tenue d’organiser un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) alors que ce dispositif est le meilleur en termes de reclassement. »
5) Référendum des salariés
Ce que prévoyait le projet de loi : De permettre la tenue d’un référendum dans l’entreprise sur tous les types de sujets. Concrètement, les salariés seraient appelés à valider ou à rejeter un accord proposé par la direction mais n’ayant pas trouvé de majorité, c’est-à-dire n’ayant pas été signé par des syndicats représentant plus de 50 % des salariés ayant voté aux dernières élections professionnelles, à condition qu’il soit défendu par des syndicats représentant plus de 30 % des salariés.
Ce que la commission des Affaires sociales a changé : Elle a ajouté deux précisions. Primo, les syndicats défendant l’accord disposeront d’un mois pour demander la tenue d’un référendum. Secundo, le référendum devra se tenir dans un délai maximal de deux mois.
Ce qu’en pense l’expert : Pascal Lokiec, professeur de droit social à l’université Paris Ouest-Nanterre-La Défense : « Le sujet est délicat. Le référendum offre une légitimité démocratique évidente, mais le proposer, c’est sous-entendre que les syndicats ne sont plus à même de défendre l’intérêt collectif des salariés. Il me semble très dangereux d’ouvrir cette voie. Par ailleurs, l’avis des salariés sera la plupart du temps sollicité dans un contexte de chantage à l’emploi, ce qui ne peut qu’inquiéter. »
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LOI TRAVAIL - Quarante voix. Il manque donc quarante voix à gauche pour faire adopter la loi Travail qui entame ce mardi son marathon parlementaire. Un parcours semé d'embûches puisque que l'opposition a d'ores et déjà annoncé qu'elle refuserait de voter un texte "vidé de sa substance" après les premières concessions accordées par l'exécutif socialiste.
Le recours à l'article 49-3 n'est pas (encore) à l'ordre du jour: El Khomri vient de répéter au Parisien que "nous avons déjà fait largement évoluer ce projet de loi. La Constitution prévoit cet outil. Mais je refuse de faire planer la menace". En attendant, le premier ministre Manuel Valls est donc condamné à faire le plein de voix dans son propre camp pour espérer imposer cette réforme. Problème: les frondeurs ainsi qu'une frange non-négligeable du groupe socialiste s'estiment incapable de voter "en l'état" une loi accusée de "favoriser les licenciements", et ce malgré l'introduction de droits nouveaux, comme le compte personnel d'activité. Dans une tribune publiée dans Libération, plusieurs parlementaires dont beaucoup sont proches de la maire de Lille Martine Aubry appellent ainsi à de nouvelles concessions pour trouver "une voie nouvelle" pour réformer le code du travail.
Des concessions, la ministre du Travail Myriam El Khomri se dit prête à en faire et promet que le débat parlementaire va pouvoir "enrichir" le texte avec des propositions émanant "de droite et de gauche". Mais le premier ministre Manuel Valls demande également de respecter "les grands équilibres" scellés avec les partenaires sociaux. Objectif: faire vaciller les dernières hésitations, au risque de mécontenter plus encore les organisations patronales.
Préciser le périmètre des licenciements économiques
Parmi les dispositions les plus contestées figure le périmètre d'appréciation des difficultés des groupes en cas de licenciement économique. Afin de pouvoir licencier, une entreprise est tenue de motiver sa décision auprès de l'administration en apportant la preuve d'une difficulté économique (baisse du carnet de commandes, difficulté structurelle...). A l'origine, le gouvernement voulait restreindre le périmètre d'appréciation de ces difficultés au seul territoire français. Ce qui a été interprété par les élus (et les syndicats) comme une autorisation à licencier alors même que l'entreprise continue à engranger des bénéfices à l'international.
A en croire le rapporteur de la loi Travail, Christophe Sirugue, cette question du périmètre est "une ligne rouge pour beaucoup de (ses) collègues". Ce dernier a déposé un amendement pour ramener ce périmètre "à l'échelle internationale" et jure qu'il le maintiendra même sans l'accord du gouvernement.
Même le hollandais Bruno Le Roux, président du groupe socialiste, indique qu'il est lui-même favorable à un changement de périmètre. "Il y a assez d'atouts en France pour attirer les investissements étrangers sans y ajouter cette question là. Nous sommes pour un périmètre pour le moins européen", a-t-il indiqué ce lundi sans exclure d'aller plus loin.
Une concession de l'exécutif sur ce point épineux de la réforme serait salutaire, pense-t-on au Parti socialiste. Car si le texte est si contesté dans la rue, c'est parce que le gouvernement a laissé entendre "dès le début que cette loi allait faciliter les licenciements", pense Christophe Sirugue.
Encadrer le référendum d'entreprise pour éviter le "dumping social"
C'est un autre point qui fait grincer des dents à gauche. Le projet de loi El Khomri prévoit que, faute de majorité, les syndicats minoritaires (représentant plus de 30% des salariés) pourront demander un référendum pour valider un accord d'entreprise. En cas d'adoption par une majorité de salariés, cet accord pourrait s'imposer au code du travail.
Outre le fait qu'il remet en cause leur pouvoir de négociation, ce référendum inquiète les syndicats qui redoutent que les entreprises d'une même branche se livrent à une course à l'échalote pour réduire leurs coûts et faire pression sur leurs employés. "Si l'on n'y prend pas garde, il peut avoir comme conséquence de laisser s'engager une forme de dumping social entre les entreprises", met en garde le rapporteur Christophe Sirugue. Celui-ci a déposé un nouvel amendement mettant en place un "comité de surveillance" de ces référendums d'entreprise. Les branches pourraient ainsi garder "un oeil" sur les accords d'entreprise pour éviter les dérives.
Il assure avoir obtenu le feu vert de Matignon sur ce point qui pourrait rassurer les députés hésitants.
Vers un compromis sur la question des CDD?
Autre sujet de discorde, la concession accordée aux organisation syndicales de surtaxer les CDD ne passe toujours pas. Beaucoup de députés, à droite mais aussi à gauche, estiment cette mesure "contreproductive" et même contraire à l'esprit de la réforme. "On est dans une économie où on a besoin des CDD. Ce dont on ne veut pas, ce sont des CDD extrêmement précaires, qui camouflent des renouvellements de contrats", prévient le rapporteur socialiste Christophe Sirugue.
Surtaxer tous les CDD pénaliserait en premier lieu les petites et moyennes entreprises au moment même où les embauches repartent à la hausse. Les déclarations d'embauches pour des contrats de plus d'un mois, hors intérim, ont bondi de 4,8% au 1er trimestre, atteignant un niveau inédit depuis 2011, une hausse qui coïncide avec une nouvelle aide aux PME, selon des chiffres provisoires publiés mercredi par l'Acoss.
Toujours réservé sur le principe, le député Sirugue espère au moins "une clarification" du gouvernement sur les visées de la surtaxation des CDD.