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A Nuit debout, la guerre des activistes est déclarée
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
Plusieurs personnes mobilisées depuis le début de Nuit debout dénoncent l’appropriation des réseaux sociaux par un groupe “d’entrepreneurs de la démocratie 2.0”, et les velléités de certains d’utiliser le mouvement à des fins politiciennes. Enquête.
Est-ce un effet de la fatigue, après quelques 50 nuits passées debout depuis le 31 mars ? A l’enthousiasme de participer à un mouvement inédit de contestation de “la loi travail et de son monde” place de la République à Paris, a succédé le ressentiment entre certains activistes de la première heure. La polémique a éclaté au grand jour le 14 mai, lors de la lecture d’un texte collectif de plusieurs membres des commissions structurelles de Nuit debout devant l’Assemblée populaire. En cause : la gestion des outils de communication en ligne du mouvement – site internet, Twitter et Facebook.
“Messages apolitiques, inoffensifs, et pour tout dire démobilisateurs”
“Le relatif dépeuplement de la place depuis quelques jours peut être imputé en partie à la diffusion de messages apolitiques, inoffensifs, et pour tout dire démobilisateurs. La révolution des likes n’aura jamais lieu”, clament-ils. Et de jeter à la vindicte sans les nommer des “professionnels du marketing et du community management” qui se sont “accaparés” ces outils. Ce 19 mai, dans un nouveau texte collectif qui a circulé sur différentes listes des Nuits debout, les noms sont lâchés. Noémie Tolédano et Baki Youssouphou, co-fondateurs de l’agence de com’ Raiz, sont accusés d’avoir acheté le nom de domaine “nuitdebout.fr”, tandis que Benjamin Ball, hyper-militant et “community organizer” influencé par Saul Alinsky, et Joseph Boussion, ancien porte-parole de Nouvelle Donne, dont il a démissionné en juin 2015, sont accusés de “monopoliser” et de dépolitiser la communication en ligne du mouvement.
Pire encore, ils auraient l’intention de faire de Nuit debout “leur tremplin pour les élections” de 2017. En effet, le 3 mai dernier, une réunion à laquelle ont participé Benjamin Ball et Joseph Boussion portait sur l’”articulation” entre le processus Vogüé et Nuit debout. Le processus Vogüé, du nom d’une petite commune de l’Ardèche, consiste en des rencontres d’une quarantaine de mouvements “citoyens” dont une partie travaillent à construire un “label citoyen” en vue des législatives de 2017. Joseph Boussion est par ailleurs l’un des candidats “déclarés” sur le site LaPrimaire.org.
Les législatives en ligne de mire ?
Dans un compte-rendu de cette réunion qui a fuité, il apparaît que les participants réfléchissaient au moyen d’amener Nuit debout à s’intéresser aux élections. On y lit par exemple cette série de questions : “Comment faire pour que les élections législatives deviennent un objectif commun ? Comment aller aux législatives ? Quelle stratégie dans cette phase de politisation ?” Et l’une des solutions évoquée : “En créant une commission sur le thème des législatives à Nuit debout”.
Contacté par Les Inrocks, Benjamin Ball, membre du Media Center – qui s’est fendu d’une lettre ouverte en réponse à certaines de ces accusations -, précise que ce compte-rendu ne reflète pas l’ensemble de ce qui a été dit, et défend que leur intention n’était pas de manipuler le mouvement :
“Avant le mouvement, une partie des gens qui participent au Média Center avaient un passé militant. Joseph et moi sommes engagés dans le processus de Vogüe-Saillant. On travaille plus spécifiquement à la création d’un label citoyen, pour qu’un mouvement fort, qui parte de la base, se constitue sans se transformer en un Podemos, trop vertical. Cette réunion a beaucoup porté sur Nuit debout, car il est au cœur des débats à l’heure actuelle : Pourquoi les gens viennent ? Y a-t-il eu des tentatives de récupération ? Est-ce que la question électorale est posée au sein des Nuits debout ? Comment aider à ce que cette question se pose ? C’est tout. Ma réponse a été de dire qu’il y a peu d’endroits où la question se pose, en tout cas pas à République”.
“Manœuvres politiciennes”
Qu’à cela ne tienne, la publication de cette information fait bouillonner le terreau militant de Nuit debout. Du côté du groupe des initiateurs proches ou membres de Convergence des luttes, la découverte de ce compte-rendu a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase :
“Ce sont les premiers à reprocher aux membres de Convergence des luttes d’être trop politisés, à nous suspecter de rouler pour Mélenchon par exemple [des soupçons de noyautage par le Parti de gauche ont circulé en avril, ndlr], mais on s’aperçoit que sous les apparences, ce sont eux qui font des manœuvres politiciennes, plaide Leïla Chaibi, membre de Convergence des luttes et par ailleurs encartée au Parti de gauche, qui n’a toutefois pas participé à la rédaction du texte collectif. Le problème c’est qu’ils n’en débattent pas publiquement, c’est fait de manière cachée”.
Concernant le nom de domaine “Nuit debout”, Benjamin Ball confirme qu’il a été déposé par Noémie Tolédano et Baki Youssouphou au nom de la société Raiz, “pour éviter que cela soit fait par des personnes mal intentionnées”. Les réseaux sociaux ont eux été créés collectivement : “L’un des principes à Nuit debout, c’est que celui qui propose fait, et qu’il est ensuite responsable. On a donc créé le Media Center. Au départ on était entre huit et dix. Maintenant nous sommes 27, dont certains ne sont pas forcément de Paris, il y a donc une forme de représentativité”.
Celle-ci ne satisfait pas certains de ses détracteurs, qui reprochent à certains animateurs du Media Center de prononcer des “arbitrages apolitiques, ou en tout cas peu représentatifs de la combativité de Nuit debout”. Camille, qui compte parmi les initiateurs de Nuit debout, et qui préfère garder l’anonymat, rapporte ainsi que “dès qu’on suggère des communiqués trop engagés, ils ne le diffusent pas, sous prétexte que cela nuit à une ‘narration positive’ du mouvement. Le Média Center définit sa stratégie de communication de manière autonome. Quand on voit que ces gens disposent du seul outil qui permet à Nuit debout d’exister en dehors de la place, c’est problématique”.
Où va l’argent des t-shirt “Nuit debout”
Enfin, le texte collectif dénonce la commercialisation sur la place de la République de T-shirt à l’effigie de Nuit debout, pour le compte de laBoîte militante, émanation de l’association des Désobéissants. Les profits, qui devaient être reversés au mouvement, sont soupçonnés d’être “entièrement privatisés”. Qu’en est-il vraiment ? Xavier Renou, meneur des Désobéissants, explique avoir vendu jusqu’à présent, grâce aux stands de l’association sur la place de la République et à la boutique en ligne, 33 T-shirt, qui ont rapporté environ 150 euros à l’association. Les Désobéissants auraient ainsi gagné davantage en vendant des crêpes sur la place, dont les bénéfices ont été reversés à la commission logistique. Il est vrai que le prix du T-shirt est dissuasif : 19,50 euros.“C’est du tissu écolo du label GOTS, le plus exigeant au monde, et nous les faisons confectionner dans un chantier d’insertion sociale en banlieue parisienne, la fabrication est donc locale”, précise Xavier Renou.
Au départ, les bénéfices de la vente des T-shirt, ainsi que les ressources tirées de l’Alter-JT – journal alternatif lancé il y a un an par les Désobéissants -, devaient servir à financer TV Debout. Mais la méfiance du mouvement vis-à-vis des étiquettes et autres drapeaux a eu raison de ce projet : “Les gens ont finalement souhaité garder une totale indépendance, y compris vis-à-vis de l’Alter JT. Ils ont lancé un pot commun sur internet qui a bien fonctionné”, relate Xavier Renou. L’argent de l’Alter JT et des T-shirt a donc servi à financer des stages de formation à la non-violence et à la désobéissance civile dans les villes qui ont répondu à l’appel “Nuits debout 100% non-violentes et désobéissantes”.
Si ces querelles internes témoignent de la vigilance de certains activistes qui ont à cœur que le mouvement ne soit pas récupéré, elles montrent aussi qu’il a en partie échoué à sortir du ghetto militant. Elles témoignent enfin d’un clivage politique profond entre deux camps, l’un dit “citoyenniste” – défendant une ligne “ni droite ni gauche”, et souhaitant concilier convergence des luttes et convergence de ceux qui ne luttent pas encore –, et l’autre qui souhaite surtout faire converger les collectifs en lutte, et qui n’a pas peur de se revendiquer de l’anticapitalisme. Nuit debout n’a-t-elle pas d’ailleurs failli s’appeler Nuit rouge ?