[RSS] Twitter Youtube Page Facebook de la TC Articles traduits en castillan Articles traduits en anglais Articles traduits en allemand Articles traduits en portugais

Newsletter

Ailleurs sur le Web [RSS]

Lire plus...

Twitter

Au bar identitaire de Lille

Lien publiée le 25 septembre 2016

Tweeter Facebook

Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

http://tempsreel.nouvelobs.com/societe/20160924.OBS8676/au-bar-identitaire-de-lille-on-n-a-rien-contre-l-islam-mais-en-terre-d-islam.html?xtor=RSS-13

Reportage auprès des identitaires de Lille, qui viennent d'ouvrir "Citadelle", leur nouveau QG.

Au 8 rue des arts, à deux pas de la Grand place de Lille, des tags "antifasciste" ornent la façade de l'agence immobilière. Le patron râle :

"On m'a gribouillé ma façade par erreur. Ils sont à côté. Au fond de la cour."

"Ils" ? Les voisins encombrants sont les militants du groupuscule Génération identitaire dans le Nord, dont le QG ouvre officiellement ce samedi 24 septembre , provoquant l'émotion à Lille : une pétition a été lancée pour demander la fermeture de leur "Citadelle", un bar associatif qui se définit comme une "Maison de l'identité".

Une "citadelle" ?

"C'est une métaphore de la France. Parce que soyons clairs, on assiste aujourd'hui à un génocide de substitution ! On est assiégés. Nous n'avons rien contre l'islam, mais s'il est pratiqué en terre d'islam, et pas chez nous. Nous, on veut défendre notre identité !"

C'est ce qu'explique Aurélien Verhassel, le patron de la branche Nord de Génération identitaire en nous faisant faire le tour des lieux. En l'occurrence un bar ambiance flamande avec des canapés profonds, des drapeaux jaune et noir avec le lion flamand, des statues religieuses, des affiches "on est chez nous". Il y a aussi des goodies. Des tee-shirts et le must : des porte-clés avec un chiffre. Le 732. C'est leur date fétiche : la bataille de Poitiers de Charles Martel, qui repoussa "l'invasion arabe".

 

Aurélien Verhassel, patron de Génération identitaire Nord. (ERIC FLOGNY)

Charles Martel, héros incontesté

Verhassel cite aussi souvent la bataille de Lépante, où les chrétiens ont vaincu les troupes de l'Empire Ottoman. Mais Charles Martel reste le héros incontesté des identitaires.

"C'est pour ça qu'on avait occupé la mosquée de Poitiers, en 2012. Un super souvenir."

L'un des thèmes de l'université d'été des Identitaires cette année, était d'ailleurs "La Reconquista" : la reconquête. Allusion à la reconquête du sud de l'Espagne par les chrétiens, qui s'achève par la reconquête de Grenade en 1492.

Dans la bibliothèque de la Citadelle, on trouve tout les "classiques" de la fachosphère : Jean Raspail et son camp des Saints, Dominique Venner, le "martyr" de la cause, qui s'est suicidé dans une église, Jean-Yves le Gallou...

La "Citadelle" offre aussi à ses membres des séances ciné-club. Au programme, "le Vent se lève" de Ken Loach, qui serait, on imagine, surpris de ce cousinage avec ces ultra-droites :

"Pourquoi vous dites ultra ? De toute façon, ça ne veut plus rien dire droite ou gauche. Nous, on est finalement très proche du combat altermondialistes. McDo, Starbucks, tout ça on déteste. C'est pour ça qu'on est bien ici, dans ce décor d'estaminet flamand. Enfin, on se sent chez nous !"

"A la Citadelle, on se sent chez nous". (ERIC FLOGNY)

Tournée de sécurisation "anti-racaille"

Dans le local, Aurélien a rassemblé ses troupes. Il y a un jeune couple qui pouponne un petit bébé, des jeunes filles et des jeunes hommes BCBG, pull foncé, polos sages. Cyprien, 22 ans, militant depuis quatre mois, Romuald 21 ans, en fac de médecine, Raphaël, qui travaille dans le social. La première fois qu'ils ont déposé un bulletin dans l'urne, c'était pour voter Marine Le Pen.

Aurélien Verhassel a lui aussi fait ses armes au Front national :

"Avant, j'étais aux Front national Jeunesse. Mais je voulais plus d'action. Tous les jeunes un peu pêchus, ils sont chez nous !"

Car Génération identitaire, bébé de la génération Twitter et Snapchat, est le pro des "actions" coups de poings très médiatique. Comme les tournées de sécurisation du métro avec des gilets "anti-racaille". Les maraudes auprès des SDF exclusivement blancs. Le blocage des autoroutes à Calais contre les migrants. Ou cet été, le mouvement "Défends ton église". L'objectif : se prendre en selfie de groupe, sur le parvis de la maison de Dieu... Et afficher les clichés sur les réseaux sociaux. Verhassel se réjouit :

"On avait raison avant tout le monde, regardez aujourd'hui, tout le monde nous copie. A droite comme à gauche, tout le monde parle d'identité !"

Dans la vie, il travaille comme consultant en communication. S'il fut un temps où on cachait son engagement identitaire, aucun des militants de la Citadelle ne semble trop gênés de ses convictions, que ce soit dans son milieu familial ou amical. "On est dans l'air du temps."

Il cite avec gourmandise les propos de Sarkozy sur les gaulois ("moi, je parlerai plutôt d'identité hélléno-chrétienne"), s'amuse de l'identité heureuse de Juppé : "Le multiculturalisme c'est une folie, on voit bien que ça ne débouche que sur des affrontements".

"Vous avez vu le slogan de Jean-François Copé ? 'On ne recule pas'. Repiqué sur le nôtre, mot à mot."

"Roubaix, ville colonisée"

Volonté de s'acheter une respectabilité ? Face aux journalistes, Verhassel prend garde à arrondir les angles. Il fait attention à ne pas dire "blanc", et même me corrige quand j'emploie le mot : "identité helléno-chrétienne, c'est plus précis", dit-il. Et m'explique, grand seigneur, qu'il peut y avoir des exceptions. "Il y a eu des apports extérieurs en France. L'Indochine par exemple". Une subtile allusion à mes origines ? Je lui demande s'il considère que je peux être une bonne française. Diplomate, Verhassel précise "qu'il n'y a pas de problèmes avec la communauté asiatique car elle n'est pas nombreuse et qu'elle ne se fait pas remarquer". Mauvais point pour moi, en revanche : mon prénom, pas français.

"Ça me semble logique d'avoir un prénom français si on veut s'intégrer dans l'identité française. Ce ne sont pas aux minorités de dicter leurs lois."

On comprend que pour les identitaires, tout le problème est là. Les étrangers, on ne supporte pas quand on les voit. Raphaël vient de Saint-Omer. Il a vu sa ville "changer en mal". Alors il a voulu "s'engager", agir, veut arrêter "tout ça" avant que ça ne soit irrémédiable. Quand il est arrivé à Lille, ça lui a fait un choc. "Dans certains endroits, on ne se sent plus en France."

Aurélien acquiesce :

"Vous êtes allée à Roubaix ? C'est une ville colonisée."

Des goodies Génération identitaire à la Citadelle. (ERIC FLOGNY)

Des cours de boxe pour "se défendre"

Alors c'est pour ça qu'à la maison de l'identité, on apprend à se défendre. Aurélien Verhassel y dispense des cours de boxe thaï. Pour les filles et pour les garçons.

"Il faut savoir se défendre, aujourd'hui quand vous marchez dans les rues de Lille. Avec toute la faune qu'il y a..."

Le militant identitaire est ainsi vivement incité à cultiver son corps, via des randonnées pour "découvrir notre beau pays". Aux universités d'été du mouvement, la journée commence par un jogging. Et ensuite une heure de boxe, encore et toujours. Fan d'alpinisme, Verhassel adore poster sur Instagram les clichés de ses exploits sportifs : "Un corps sain dans un esprit sain, c'est notre credo, chez nous" – à ce moment, je me souviens que j'ai entendu exactement la même chose dans le procès d'un djihadiste, qui faisaient des séances de centaines de pompes en prison...

Mais il faut soigner son physique quand on se sent "en guerre". En 2014, Verhassel avait été éclaboussé par une vidéo montrant un jeune homme faire le salut nazi lors du match Algérie-Allemagne, diffusée sur son compte perso Vine. "Je ne connais même pas cette personne. Mon compte a été piraté." Adrien Verhassel insiste, il est identitaire, pas raciste.

"On est anti-colonisation ! Mais on pense que chaque culture doit rester chez elle."

Et il cite Aimé Césaire. Malheureux Césaire...

Doan Bui