[RSS] Twitter Youtube Page Facebook de la TC Articles traduits en castillan Articles traduits en anglais Articles traduits en allemand Articles traduits en portugais

Newsletter

Ailleurs sur le Web [RSS]

Lire plus...

Twitter

Un extrémiste de droite nommé chef de la police de Kiev

Ukraine

Lien publiée le 18 novembre 2016

Tweeter Facebook

Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

https://www.letemps.ch/monde/2016/11/17/un-extremiste-droite-presume-nomme-chef-police-kiev

La chef de la police ukrainienne, Khatia Dekanoidze, a démissionné, remplacée par Vadym Troian, un proche de l’extrême-droite, alors que les réformistes disparaissent petit à petit du pouvoir

Un an après sa nomination comme numéro 1 de la police ukrainienne, Khatia Dekanoidze a démissionné de ses fonctions en dénonçant la corruption et le blocage des réformes qu’elle avait engagées. C’est son adjoint imposé, Vadym Troian, un proche de l’extrême-droite, qui va la remplacer, une promotion qui laisse entrevoir une porosité inquiétante entre la police et les milieux paramilitaires, entretenue par Arsen Avakov, le ministre de l’Intérieur lui-même.

Agée de 39 ans, Khatia Dekanoidze avait débarqué à Kiev à l’automne 2015, dans le sillage de son mentor, Mikheil Saakachvili, pour donner un coup de fouet aux réformes. L’objectif affiché: dupliquer à Kiev les bonnes recettes géorgiennes, alors que Khatia Dekanoidze avait dirigé de 2007 à 2012 l’académie de police du ministère de l’Intérieur de Géorgie, présidant à la transformation radicale d’une police affreusement corrompue.

Réformes à la police

La jeune femme est alors placée sous la tutelle d’Arsen Avakov, ministre de l’Intérieur, une personnalité clivante et affairiste, qui, dans le contexte de la guerre, a tissé des liens étroits avec plusieurs bataillons armés volontaires. Soutenue par l’ambassade des Etats-Unis, la Géorgienne nationalisée ukrainienne, a quant à elle une tâche précise: transformer la vieille «milice» post-soviétique honnie en «police» moderne.

A bien des égards, la réforme est un succès. Parfois qualifiée de «cosmétique», mais massivement plébiscitée par les Ukrainiens, ravis de voir des rangs de policiers racketteurs prendre le placard. En quelques mois, des patrouilles rajeunies, féminisées à près de 30%, sillonnent les rues de 32 villes et instaurent des relations plus sereines avec la population, avec un impact sur la délinquance routière et les violences aux personnes.

Dénonciation de la corruption

«Malgré la crise, la guerre, les mouvements d’armes incontrôlés, nous avons engagé un véritable changement du système, une re-certification des agents et créé un centre de recrutement indépendant», a plaidé lundi Khatia Dekanoidze, avant sa démission, expliquée partiellement par l’angle mort de la réforme: l’impossibilité de poursuites criminelles, sans parler des crimes économiques, sans réforme de la justice.

Froidement, Khatia Dekanoidze pointe les tribunaux achetés, le bureau du procureur du pays, inféodé à la présidence, et les interférences des hommes politiques. «Ceux-ci ne peuvent pas utiliser la force de la loi pour protéger leurs intérêts, dénonce-t-elle. Mon autorité et ma liberté ne suffisaient pas pour des changements drastiques: j’ai fait mon devoir et donc je démissionne.»

La fin des Géorgiens

Son départ était prévisible après la démission de Mikheil Saakachvili du poste de gouverneur d’Odessa, le chef du «clan géorgien» étant la bête noire d’Arsen Avakov, aux liens notoires avec les oligarques. Arsen Avakov, en un quart d’heure, a avalisé sur Facebook la démission et nommé premier flic d’Ukraine un certain Vadym Troian, 37 ans, au pedigree particulier.

Originaire de Kharkiv, fief d’Arsen Avakov, Vadym Troian gravite autour de «Patriotes d’Ukraine», une organisation xénophobe créée en 2005, à tendance racialiste, qui sous couvert de «sport et d’ukrainisation» ainsi que de «lutte pour les droits sociaux» fait la chasse aux migrants et aux étudiants noirs, tout en organisant des distributions de «Mein Kampf» et de symbolique nazie dans la seconde ville du pays.

Minorité néonazie

Selon plusieurs sources, Vadym Troian n’aurait été qu’un compagnon de route de «Patriotes d’Ukraine», mais le groupuscule sera la matrice du Bataillon Azov, lorsque cette formation naîtra au printemps 2014, après l’invasion de la Crimée. Quand la guerre éclate, Vadym Troian devient vice-commandant d’une troupe politico-militaire, dans les rangs desquels une minorité de néo-nazis tapisse les murs des casernes de svastikas.

Nommé chef de la police de la région de Kiev par Arsen Avakov fin 2014, Vadym Troian refuse de répondre à des questions sur ses affiliations idéologiques. Interrogé par la BBC sur la présence d’un tel profil à la tête de la police de la capitale, le président Petro Porochenko a gratifié Vadym Troian du terme de «grand patriote».

L’aval de Porochenko

«Les doutes reposent avant tout sur ses liens antérieurs plus que sur ses actions actuelles», commente Halya Coynash, du Centre de Kharkiv des droits de l’homme, critique de sa nomination. En janvier, pourtant, Vadym Troian engage une action policière contre des ressortissants étrangers à Bila Tserkva incluant des activistes du «corps civique d’Azov», un groupe politique issu du bataillon du même nom.

Avant d’être effective, la nomination de Vadym Troian doit encore être entérinée par le cabinet des ministres, c’est-à-dire par Petro Porochenko. Mais Vadym Troian n’est pas le seul personnage sulfureux – de la région de Kharkiv – à avoir rejoint le ministère de l’Intérieur. «Lorsque les paramilitaires, la police officielle et l’armée s’entremêlent, c’est la fin de la partie», commentait Timothy Snyder, historien à l’université de Yale, spécialiste de l’Ukraine.