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"A bras ouverts": racisme à haute dose
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
Le réalisateur de « Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu ? » s’attaque aux Roms et à leur impossible intégration. Nauséabond.
Ça le travaille, Philippe de Chauveron, tous ces gens venus d’ailleurs (ou dont les parents sont venus d’ailleurs) qui vivent en France. A bras ouverts est le troisième film d’affilée qu’il consacre à cette préoccupation, et le plus déplaisant. Après l’exogamie dans Qu’est ce qu’on a fait au Bon Dieu ?, la nécessaire réimplantation des immigrés dans leur pays dans Débarquement immédiat !, le réalisateur s’attaque (et il faut entendre ici le terme au sens propre) aux Roms et à leur impossible intégration.
On aura compris, au vu des images de Christian Clavier en chemise blanche à col ouvert, chevelure grisonnante rejetée en arrière, que l’interprète de Jacquouille tient ici le rôle d’un personnage médiatique dont la présence sur les plateaux télévisés est justifiée par la publication d’essais. Comme le dernier ne se vend pas très bien, Jean-Etienne Fougerolle accepte de débattre avec un auteur de droite à succès (Marc Arnaud) que le scénario fait gay – personne n’est parfait dans le monde des frères Chauveron (le scénario est de la plume de Marc de Chauveron, frère du réalisateur). Au fil des échanges, Fougerolle clame haut et fort qu’il est prêt àaccueillir une famille rom dans sa villa de Marnes-la-Coquette.
Pendant ce temps, sur un terrain vague marseillais, un clan de mendiants, voleurs et chiffonniers, regarde la télévision. Sur les conseils d’un Provençal tombé dans la dèche (il leur est même refusé d’avoir tout seuls une bonne idée), Babik (Ary Abittan) et les siens se présentent devant la caméra de surveillance qui protège la résidence Fougerolle.
Dans les très pénibles soixante minutes qui suivent, on verra un jeune garçon voler du câble sur un chantier, des femmes mendier sur le trottoir, des hommes coiffer des bonnets péruviens pour chanter dans le métro. Pendant ce temps, l’intellectuel tombe dans les bras d’une étudiante de l’UNEF, à la grande fureur de Daphné Fougerolle (Elsa Zylberstein), une cruche qui occupe son temps libre à concevoir des œuvres que les Roms prennent pour le résultat d’une campagne de fouilles dans les poubelles – et hop, d’une pierre deux coups : l’art contemporain et les libertés que prennent les Roms avec l’hygiène et la propriété privée.
Quant à Lionel (Oscar Berthe), le fils de la maison, il enfreint l’oukase patriarcal édicté par Babik en conduisant la fille cadette du chef dans son lit. C’est que chez ces gens-là (il s’agit ici des Chauveron), les femmes ne valent pas les hommes, et quels que soient les défauts des Roms dans la représentation qu’en offre A bras ouverts, le scénario leur reconnaît le mérite de savoir tenir ces créatures inférieures à leur place.
On ajoutera à cette addition, déjà lourde, le personnage du domestique indien Ravi (Armen Georgian), qui refuse de servir les hôtes de ses « maîtres » (c’est ainsi qu’il les appelle). Philippe de Chauveron invoquera sûrement les mânes de Peter Sellers dans The Party pour justifier la présence d’un stéréotype racial supplémentaire. En fait, Ravi n’est là que pour souligner le désordre d’un monde où un honnête valet ne peut plus garder sa place.
Un parfum aussi désuet que nauséabond
Pour en revenir aux Roms : que, cent cinquante ans après la première exposition coloniale à Paris, on fasse encore parler un personnage étranger à la troisième personne du singulier, sans articles et avec un accent qui n’a qu’un lointain rapport avec celui de la communauté visée, par un interprète déguisé de tous les clichés y afférents (dents métalliques, barbe de trois jours…) baigne A bras ouverts d’un parfum aussi désuet que nauséabond, exacerbé par le jeu d’Ary Abittan. Les autres membres de familles, interprétés par des acteurs venus de Roumanie, ne sont que des silhouettes, à l’exception d’un cousin handicapé qui égorge des taupes avec ses dents et dont le visage balafré fait l’objet de multiples gros plans. Rien qui échappe aux définitions les plus restrictives du racisme.
Comme ses prédécesseurs distribués par UGC, le film de Philippe de Chauveron, qui est cette fois promu par SND, filiale du groupe M6, n’a pas été montré à la presse. Pour un film qui moque une figure publique prise au piège des médias, cette timidité est étonnante. Distributeur, producteurs, réalisateur sont certainement partisans de la livraison directe au consommateur, à la veille d’une série de scrutins nationaux. C’est maintenant à ce dernier de limiter les nuisances d’A bras ouverts, en se dirigeant sans hésitation vers une autre salle du multiplexe.
Film français de Philippe de Chauveron, avec Ary Abittan, Christian Clavier, Elsa Zylberstein (1 h 33). Sur le Web : www.facebook.com/ABrasOuvertsLeFilm.