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Législatives: vers un déni de démocratie

Lien publiée le 31 mai 2017

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

http://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/legislatives-vers-un-deni-de-193553

Emmanuel Macron large vainqueur de la présidentielle face à Marine Le Pen, c’est maintenant vers les législatives que se tournent les regards. Mis à part Les Républicains qui devraient limiter la casse face à la vague attendue des candidats d’En Marche !, les autres partis sont menacés de se partager les miettes. Compte tenu des scores du 1er tour de la présidentielle et des rapports de force qui en ont découlé, ce serait un scandale électoral...

C’est un fait constamment vérifié lors des grands rendez-vous électoraux : les Français sont légitimistes et donnent au chef de l’État nouvellement élu les moyens de sa gouvernance. Dès lors, il semble évident que, sauf accident majeur bien improbable, Emmanuel Macron disposera d’une majorité législative à l’issue des deux tours de scrutin des 11 et 18 juin. La seule incertitude actuelle concerne l’ampleur de cette victoire de La République En Marche, le parti créé pour soutenir l’action du nouveau président. Les électeurs lui donneront-ils les moyens de ses ambitions pour le pays en le dotant d’une majorité absolue ? Ou choisiront-ils de tenir en laisse le chef de l’État en ne lui accordant qu’une majorité relative, synonyme de compromis de gouvernement ou d’alliances au cas par cas sur les textes de la mandature ? Réponse au soir du 2e tour.

D’ores et déjà, les instituts de sondage qui ont enquêté sur le scrutin législatif sont unanimes : l’alliance La République En Marche-Modem devrait arriver très nettement en tête du scrutin, avec à la clé une majorité pouvant atteindre, voire nettement dépasser, les 300 sièges* à l’Assemblée Nationale. Un score en l’occurrence acquis très nettement au détriment d’un Parti Socialiste en totale déliquescence, et clairement menacé de mort par ses graves dissensions internes. Derrière le parti présidentiel, Les Républicains – eux-mêmes très divisés – devraient également souffrir du renouvellement en cours de la classe politique, mais si l’on en croit les sondeurs, en limitant les pertes à quelques dizaines de sièges. Avec un effectif tournant autour de 150 députés, l’alliance LR-UDI se positionnerait par conséquent comme le premier parti d’opposition au « macronisme en marche ».

« Premier parti d’opposition », voilà un rôle que revendiquaient dès le lendemain de l’élection présidentielle les caciques du Front National et de La France Insoumise, forts de leurs scores du 23 avril et sur la base escomptée des succès à venir lors des législatives. Poussé par son goût de la provocation – au risque de passer pour un matamore –, Jean-Luc Mélenchon était même allé jusqu’à se projeter en « Premier ministre de cohabitation », à l’instar d’un François Baroin qui n’y croyait pas lui-même. Or, dans le système électoral français, la mécanique législative est implacable, et comme à chaque rendez-vous de ce type – les législatives couplées à la présidentielle –, la dynamique en faveur du chef de l’État et les logiques d’alliance de 2e tour dans les circonscriptions se traduiront par des gains modestes pour les partis les plus excentrés sur l’échiquier politique. 

Car les électeurs du FN et de la FI ne doivent pas se leurrer : malgré une large adhésion à leur projet le 23 avril, et en dépit d’un score assez proche de celui d’Emmanuel Macron, leur ambition devra se limiter à l’émergence d’un groupe parlementaire comptant au maximum une trentaine de députés. Principale difficulté pour ces deux partis : l’obligation de dépasser 12,5 % des suffrages exprimés au 1er tour de ce scrutin législatif pour ne pas être éliminé du 2e tour. En tenant compte de l’abstention prévisible, cela signifie que dans la grande majorité des circonscriptions, c’est entre 18 et 23 % des voix qu’il faudra recueillir pour se qualifier. Une contrainte qui limitera considérablement le nombre de triangulaires et a fortiori de quadrangulaires, plus favorables aux partis comme le FN et la FI que des duels favorisant le regroupement des voix sur les candidatures des partis traditionnels du système.

À potentiel électoral égal, de 10 à 20 fois moins de députés !

Si l’on en croit le sondage Opinionway du vendredi 26 mai, ce sont 310 à 330 sièges qui devraient échoir à l’alliance LREM-Modem, et cela pour la seule France métropolitaine. Soit une majorité absolue très nette, supérieure à celle du PS et de ses alliés en 2012. En 2eposition, LR-UDI obtiendrait 140 à 160 sièges selon l’institut, loin devant le PS, la FI et le FN, aucun de ces partis ne paraissant en mesure de dépasser les 30 élus. À noter que la projection en sièges d’Opinionway est basée sur une part d’électorat LREM-Modem estimée à 28 % au 1er tour. Or, selon deux sondages publiés le mercredi 24 mai par l’Ifop et Elabe, LREM-Modem obtiendrait 31 % des suffrages pour l’un, et 33 % pour l’autre. Ce qui, en l’absence de projection en sièges de ces deux instituts, pourrait se traduire le 18 juin par un succès encore plus spectaculaire de la majorité présidentielle en nombre d’élus.

C’est donc bien vers une très nette victoire d’Emmanuel Macron et de son Premier ministre Édouard Philippe que l’on semble s’acheminer. Et cela malgré l’« affaire Ferrand » qui trouvera sans doute son épilogue dans la 6e circonscription du Finistère et obligera – espérons-le – le nouveau Garde des Sceaux François Bayrou à durcir encore plus son projet de loi sur la moralisation de la vie politique. Ce large succès annoncé de l’alliance LREM-Modem ne doit toutefois pas occulter l’un des effets les plus détestables de notre système électoral : avec respectivement 21,30 % et 19,58 % de suffrages accordés à leurs candidats en avril, le Front National et la France Insoumise ne disposeront probablement que d’un maximum de 20 sièges pour le FN et de 30 sièges pour la FI. Des nombres dérisoires comparés aux 300 sièges – voire plus ! – dont devrait disposer la majorité présidentielle.

Rappelons à cet égard que l’écart qui séparait le 23 avril Emmanuel Macron de Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon était de 2,71 % pour la candidate du FN, et de 4,39 % pour le candidat de la FI. Des écarts assez largement gommés, de l’avis même des experts, par le « vote utile » dont a bénéficié le nouveau chef de l’État relativement à ses adversaires qui, eux, ont massivement capitalisé des votes d’adhésion sur leur nom et leur programme. Dans de telles conditions, voir les partis de ces candidats hériter à l’Assemblée Nationale d’une représentation 10 à 12 fois moindre pour la France Insoumise, et potentiellement 15 à 20 fois moindre pour le Front National, que l’alliance présidentielle LREM-Modem relève d’un scandale électoral propre à la France. Dans nulle autre nation occidentale il ne serait en effet possible de constater un tel déni de démocratie.

Cela démontre une fois de plus l’urgente nécessité de remettre à plat notre système politique. Soit en instaurant une VIe République. Soit a minima en mettant en œuvre une ambitieuse réforme de la Constitution, enfin respectueuse des attentes de nos concitoyens et de leur droit à être justement représentés au parlement. Il est hélas ! à craindre que le quinquennat d’Emmanuel Macron ne débouche que sur des modifications cosmétiques destinées à brosser les électeurs dans le sens du poil sans nuire pour autant aux équilibres de pouvoir si favorables aux intérêts des grandes puissances financières et industrielles. Avec Nicolas Sarkozy et François Hollande, les Français ont été dirigés par deux chefs d’État souples avec les puissants et durs avec les faibles. En ira-t-il de même avec Emmanuel Macron ? La balle est dans le camp du président de la République. 

Pour mémoire, la majorité absolue est de 289 sièges.