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Crise au Venezuela : quelle issue pour les classes populaires ?
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
La crise au Venezuela s’aggrave de semaine en semaine...
Les premières victimes en sont les couches populaires qui souffrent déjà depuis longtemps de l’effondrement de l’économie, de la rareté des produits et médicaments de première nécessité, du marché noir et de la corruption généralisée. Ce sont aussi les travailleurs et les habitantEs des quartiers pauvres qui sont également les principales victimes de la violence armée, qu’elle vienne des corps de répression liés directement ou indirectement à l’État, des groupes armés de l’opposition ou des bandes mafieuses qui prolifèrent dans le chaos actuel.
Maduro, cœur de cible de la contestation
La crise économique et politique, qui ne fait que s’amplifier depuis des mois, a connu une nouvelle accélération avec l’annonce par le président Maduro (successeur élu de Chavez décédé en 2013), de la convocation d’une Assemblée constituante. Cette convocation vise à l’évidence à retrouver un crédit perdu et à remobiliser les classes populaires.
Cette convocation se heurte à une offensive de l’opposition regroupée au sein de la Table de l’unité démocratique (MUD), offensive relayée par les gouvernements et les médias des États-Unis et de leurs fidèles alliés dans le monde. La MUD, coalition très hétérogène, reste sous hégémonie des secteurs néolibéraux (tel que Henrique Capriles) et traversée par une frange insurrectionnelle fascisante : cette force politique s’appuie sur sa majorité obtenue en 2015 à l’Assemblée nationale, et cherche à alimenter les manifestations de colère dans les rues, y compris par des opérations de commando et du sabotage économique. Le but est d’en finir le plus vite possible avec le gouvernement et de liquider les acquis des années 2000.
Mais d’autres voix se sont élevées contre l’initiative de l’Assemblée convoquée par Maduro. Des partis et associations de gauche et d’extrême gauche, d’anciens responsables chavistes, la dénoncent comme étant contraire à la Constitution de 1999 que Chavez avait fait adopter par référendum et qui consacre nombre de droits de participation démocratique. D’autant que les modalités d’élection des constituants restent ambiguës et qu’en parallèle Maduro – au plus bas dans les sondages – a repoussé sine die les élections régionales et syndicales depuis fin 2016…
La gauche et l’extrême gauche divisées
Les affrontements et les troubles ont d’ores et déjà fait plus de soixante morts, les manifestations et contre-manifestations se succèdent, et un climat de « pré guerre civile » semble s’instaurer.
Dans cette situation, les groupes révolutionnaires prennent des positions opposées. Jusque-là, la plupart, tout en soutenant le processus bolivarien, en avaient dénoncé les limites, les contradictions, voire les reculs : la bureaucratisation, la corruption, la « boli-bourgeoisie », le « caudillisme », et surtout les orientations économiques qui ne s’attaquaient pas au racines du capitalisme dans le pays, maintenaient les alliances avec les transnationales, le « modèle extractiviste » rentier fondé sur le pétrole et la mine, tout en payant rubis sur l’ongle la dette extérieure.
Mais dans la crise actuelle, certainEs, comme nos camarades de Marea Socialista, se situent radicalement en opposition au gouvernement Maduro, qu’ils jugent autoritaire, et contre la convocation de l’Assemblée constituante, alors que d’autres, comme nos camarades de En Luchas, affirment qu’il faut au contraire s’inscrire dans cette convocation pour mobiliser les classes populaires, défendre leurs revendications, et surtout faire prioritairement barrage à l’offensive néolibérale et à la stratégie impériale contre le Venezuela.
Ce qui se joue en ce moment, c’est évidemment bien plus que le sort de Maduro. C’est soit la fin dramatique d’un processus qui a, pendant de longues années, représenté de nombreux espoirs dans toute l’Amérique latine, soit un sursaut des classes populaires pour défendre leurs intérêts et les transformations nécessaires contre tous leurs ennemis : les capitalistes, Washington, la droite revancharde, et les bureaucrates bolivariens.
Fabrice Thomas et Franck Gaudichaud