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R. Garaudy, ancien philosophe officiel du PCF, devenu négationniste, est mort

Lien publiée le 15 juin 2012

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

(Le Monde) C'est le site d'un mouvement d'extrême droite, Egalité et Réconciliation, animé par Alain Soral, qui a été le premier à diffuser en France et sur le mode du deuil, la nouvelle de la mort de Roger Garaudy, le mercredi 13 juin à 8 h 30, à l'âge de 98 ans à son domicile en banlieue parisienne. Il n'y pas de hasard dans l'apparition de cette annonce aux marges sulfureuses de la politique française, sur un site où, entre autres particularités, l'on vole au secours du régime syrien "agressé" : Roger Garaudy, avait, depuis son adhésion en 1996 aux thèses négationnistes, bel et bien disparu du paysage national. A l'inverse, ce choix lui valait une impressionnante et préoccupante popularité dans le monde arabo-musulman.

Il fut pourtant une époque, longue, où Roger Garaudy, titulaire de la Croix de guerre 1939-1945 et de la Médaille de la déportation et de l'internement pour faits de résistance, était tout à fait "fréquentable".

NÉGATION DU GÉNOCIDE HITLÉRIEN

Avant de sombrer dans la négation du génocide hitlérien, il avait effectué un brillant parcours : intellectuel, homme politique, ancien dirigeant du Parti communiste français dont il avait été exclu en 1970, il s'était converti par la suite au catholicisme puis, en 1980, à l'islam.

Il fut un temps où, déjà auteur d'une quarantaine de livres, il jouissait de la pleine respectabilité accordée aux intellectuels en vue. Où, comme en novembre 1978, il était l'invité de Jacques Chancel dans l'émission Radioscopie. Où le chorégraphe et danseur Maurice Béjart, en 1973, préfaçait son ouvrage Danser sa vie...

Né le 17 juillet 1913 à Marseille, dans une famille athée, d'ouvriers et de marins, Roger Garaudy se convertit au protestantisme à quatorze ans et, sans cesser d'être chrétien, adhère au parti communiste à vingt ans en 1933. Agrégé de philosophie, il enseigne à Albi, la ville de Jaurès.

Arrêté en septembre 1940, il ne sera libéré que six mois après le débarquement américain. André Marty, haut dirigeant du parti, l'appelle alors à ses côtés. Il entre au comité central en 1945, sera député du Tarn en 1945 et 1946 lors des deux assemblées constituantes, puis élu à la première Assemblée nationale. Il est alors selon sa propre expression, "stalinien de la tête aux pieds", n'hésitant pas à dénoncer les prétendus mensonges supposés de ceux qui tentent de faire connaître la réalité du goulag.

ISOLER UNE DÉVIATION THÉORIQUE STALINIENNE

En 1951, il perd son mandat parlementaire, qu'il retrouve en 1956 comme député de la Seine. Dans l'intervalle, il passe un doctorat de philosophie à Moscou, où les circonstances le mettent en présence des débuts de la "déstalinisation".

Vice-président de l'Assemblée nationale de 1956 à 1958, il siège ensuite au Sénat d'avril 1959 à novembre 1962, date à laquelle il abandonne son mandat pour se consacrer à l'enseignement de la philosophie.

Entré au bureau politique du PCF en 1956, il est titularisé dans cette fonction en 1961. En 1960, il devient directeur du Centre d'études et de recherches marxistes. Comme Louis Althusser à la même époque, il tente d'isoler une déviation théorique stalinienne qui laisserait Marx et Lénine intacts. Mais, à l'inverse d'Althusser, sa démarche vise à concevoir un nouvel humanisme, ce qui lui vaudra d'être traité de "révisionniste" (au sens marxiste du terme) et accusé de faire une "critique de droite" du stalinisme.

Au fil d'une série d'ouvrages commencée en 1965 avec De l'anathème au dialogue, il s'élève contre tout athéisme rigide et veut ouvrir entre chrétiens et communistes de nouvelles perspectives de dialogue.

EXCLU DU PCF

Mai 1968, puis l'invasion en août de la Tchécoslovaquie par les troupes soviétiques accentuent son évolution critique. Il publie coup sur coup deux livres, Peut-on être communiste en 1968 ? et Pour un modèle français du socialisme, qui rendent inévitable la rupture avec le parti. Quelques mois après le congrès du PCF en 1970, il est exclu.

Cette décision libérera en même sa recherche philosophique et son retour à la foi chrétienne, qu'il exprime alors dans une nouvelle série d'ouvrages.

Sa pensée prendra un nouveau tournant avec sa conversion l'année suivante à l'Islam, qui donnera lieu à la publication en 1981 de Promesses de l'Islam (Seuil). Il crée une fondation à son nom, en Espagne, à Cordoue où, dans une sorte de musée, il célèbre l'âge d'or de l'Islam en Espagne à la fin du Moyen Age. Il amorce le parcours qui va, en quelques années, le mener vers un "antisionisme" de plus en plus radical. Enfin, en minorant le nombre des victimes juives du nazisme et en mettant en question l'existence des chambres à gaz, il deviendra une figure du négationnisme.

La guerre du Golfe, qu'il dénonce comme "une guerre coloniale" marque une étape dans sa radicalisation. En 1992, pourtant, c'est encore un intellectuel reconnu qui publie Avons-nous besoin de Dieu ? aux éditions Desclée de Brouwer. Avec une introduction de l'Abbé Pierre, avec qui il s'était lié d'amitié dans les années 1950.

LA POLÉMIQUE ÉCLATE

En 1996, c'est le coup de tonnerre, avec la publication de son livre Les mythes fondateurs de la politique israélienne. Un ouvrage diffusé une première fois en décembre 1995 par la librairie La Vieille Taupe, éditeur des négationnistes, puis réédité, au printemps 1996, à compte d'auteur. La polémique éclate.

"Le judaïsme n'est pas mis en cause, mais la politique israélienne", affirme-t-il. Mais il ajoute : "Je révise simplement les conclusions du procès de Nuremberg et les principes qui l'ont fondé." Le doute n'est pourtant pas permis. Tout au long des deux cent trente-sept pages du livre, l'auteur, citant notamment l'anglais David Irving, connu pour ses relations avec les néonazis allemands, il nie le projet d'extermination de Hitler à l'encontre des juifs, nie l'existence des chambres à gaz, nie le génocide...

Affaire dans l'affaire, l'abbé Pierre vole au secours de son ami et dénonce le "lobby sioniste international" avant de se rétracter du bout des lèvres. Interdit en France, le livre vaut à Roger Garaudy, défendu par Jacques Vergès, une condamnation en 1998 à une peine d'amende et d'emprisonnement avec sursis pour "contestation de crimes contre l'humanité"

A partir de ce point de bascule, Garaudy entame une troisième vie, retracée dans un livre de Michaël Prazan et Adrien Minard, Roger Garaudy, itinéraire d'une négation (Calmann-Lévy, 2007). Du Caire à Téhéran en passant par Beyrouth, Damas, Amman, le Qatar et les territoires palestiniens, il est accueilli avec égards.

Il est reçu au Liban par le leader du Hezbollah, Hassan Nasrallah, en Syrie, par le vice-président Abdel Halim Khaddam - soutenu par le cheikh Yassine, chef du Hamas -, en Iran, par le président Khatami. Diffusé dans différents pays par des groupes militants, invité à de multiples conférences, il se montre un orateur brillant, jouant de sa considérable culture et de ses allures de doux savant. Son propos continue d'être répercuté sans fin sur Internet.

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VOIR AUSSI L'ARTICLE DE RUE 89

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