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La direction de l’AFP censure des infos pour servir Macron
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
(Arrêt sur images) Dans un communiqué publié aujourd’hui, le syndicat SNJ-CGT de l’AFP accuse la rédaction en chef de l’agence d’avoir “étouffé” des “informations gênantes” pour le président et son gouvernement. De quelles informations s’agit-il, et pourquoi l’AFP, qui de son côté dément toute censure, a laissé passer au moins deux scoops sur Richard Ferrand ?
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On ne touche pas à Macron à l’AFP ? C’est ce que laisse penser un communiqué SNJ-CGT de l’AFP adressé aujourd’hui à plusieurs rédactions. Sous le titre “Quand l’AFP étouffe des informations gênantes pour le nouveau pouvoir”, dix paragraphes assurent que la rédaction en chef de l’AFP a “étouffé” deux scoops sur Richard Ferrand, publiés ensuite par le Canard Enchaîné et Le Parisien. Une rédaction en chef qui aurait également refusé de publier une dépêche sur François Bayrou, alors garde des Sceaux.
Commençons par l'affaire Ferrand, révélée par le Canard Enchaîné dans son édition du 24 mai. Cette semaine-là, le palmipède racontait que les Mutuelles de Bretagne, dirigées de 1998 à 2012 par l’éphémère ministre de la Cohésion des territoires, avaient attribué un marché à sa femme en 2011. Sans préciser le lien entre celui qui était alors député socialiste du Finistère et sa femme, sur le procès verbal de la réunion du conseil d’administration des Mutuelles de Bretagne, quand l’offre a été retenue en 2011. Selon le communiqué du SNJ-CGT, les journalistes de l’agence - par ailleurs pas vraiment réputés pour faire la chasse aux scoops et préférant généralement s’abriter derrière un média ou la parole officielle - avaient toutes ces informations, mais la rédaction en chef France n’a pas voulu creuser.
Une du Canard Enchaîné, le 24 mai 2017
"ON N’EST PAS DU TOUT UNE AGENCE D’ETAT, MAIS IL Y A UNE GRANDE PRÉSENCE DE L’ETAT"
Pourquoi ? Selon le communiqué du SNJ-CGT de l’AFP, la rédaction en chef France n’a pas jugé le sujet “digne d’intérêt”. “Généralement, un média met les bouchées doubles pour enquêter sur ce type d’informations quand elles se présentent. Pas à l’AFP, où les courriels de journalistes adressés à la rédaction-en-chef France soit sont restés sans réponse, soit ont reçu une réponse peu encourageante”, lit-on dans le communiqué. Contacté par @si, David Henault, délégué syndical SNJ-CGT de l’AFP, précise l'expression “réponse peu encourageante” : “C’était des réponses du style : «On ne comprend pas très bien les informations». Et des demandes de précisions. Il n’y avait pas la volonté de vraiment creuser”.
Un excès de précaution que le délégué syndical impute au statut particulier de l'agence : “Il y a des représentants de l’Etat au conseil d’administration de l’AFP. Notre PDG est nommé par l’Etat ; et l’Etat contribue pour 40% au chiffre d’affaires de l’AFP. On n’est pas du tout une agence d’Etat, mais il y a une grande présence de l’Etat. C’est une société privée en droit, mais en pratique l’AFP est plutôt une société privée/publique”.
FERRAND : TÉMOIGNAGE EXCLUSIF REFUSÉ
Deuxième “scoop” refusé par la rédaction en chef de l’AFP selon le communiqué : le témoignage exclusif de l’avocat au coeur de la vente de l’immeuble litigieux des Mutuelles de Bretagne en 2010-2011, Alain Castel. “C'était pourtant la première fois qu'une source impliquée dans le dossier confirmait les informations du Canard et pointait la possibilité d'une infraction pénale de M. Ferrand”, s’étonne le SNJ-CGT. C’est finalement Le Parisien qui publiera le 29 mai l’interview de ce personnage clef de l’affaire. Ex-bâtonnier, spécialiste des recouvrements de créances, à l’origine de l’opération, Castel racontera au quotidien : “J'ai tout de suite compris la manoeuvre, et cela m'avait choqué à l'époque. Richard Ferrand allait louer l'immeuble à la mutuelle et il allait s'enrichir avec tous les travaux à la charge de celle-ci.” Un témoignage qui conduira à l’ouverture d’une enquête par le parquet de Brest, le 1er juin.
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Le Parisien, 29 mai 2017
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BFMTV.com, 29 mai 2017
Dernier “étouffement” évoqué par le communiqué : une dépêche annonçant le renvoi en correctionnelle du nouveau ministre de la Justice, François Bayrou, deux jours à peine après sa nomination. En cause : une plainte pour diffamation à l’encontre de Bayrou déposée en décembre 2015 par l’association paloise "El Sistema France". Cette affaire locale remonte à septembre 2015, lorsqu’en plein conseil d’agglomération, Bayrou avait accusé l’association de “vouloir faire de l’argent sur une expérience humaniste”. Un ministre de la justice renvoyé en correctionnelle deux jours après sa nomination, ce n’est pas commun -même si en matière de diffamation, la mise en examen est automatique-, mais la dépêche n’a pas été diffusée par l’AFP, la rédaction en chef trouvant son intérêt “trop limitée”.
Le Monde, 19 mai 2017
Pour le syndicat, cela fait beaucoup en peu de temps, d’autant, précise le communiqué que, “lors de la réunion mensuelle des déléguées du personnel, la direction de l’information de l’AFP s’est montrée incapable de justifier de manière argumentée les choix de sa rédaction en chef”. Contactée par @si, la directrice de l’information de l'AFP, Michèle Léridon, assure: "Non, il n’y a pas de censure ni d’autocensure à l’AFP. Nous revendiquons une indépendance totale vis-à-vis des pouvoirs". La directrice confirme que des infos ont bien été recueillies par un bureau de l'agence mais elle considère qu’"en l’état, ces informations n’étaient pas étayées, ni suffisamment recoupées". La directrice de l’information (invitée sur notre plateau au moment du raté Martin Bouygues) insiste par ailleurs sur le fait qu’en tant qu’agence qui alimente nombre de rédactions en information, "l’AFP a une responsabilité particulière, et ne peut pas se permettre de publier des choses qui ne sont pas complètement sûres"
(par Robin Andraca et Manuel Vicuña)