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À Forcalquier, Castaner promeut un supermarché destructeur de terres agricoles

Lien publiée le 17 décembre 2017

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

https://reporterre.net/A-Forcalquier-Christophe-Castaner-promeut-un-supermarche-destructeur-de-terres

En contradiction avec une politique plutôt écolo, la municipalité de Forcalquier, fief de Christophe Castaner, défend le déclassement de terres agricoles pour agrandir un Intermarché. L’opposition locale se mobilise.

  • Forcalquier (Alpes-de-Haute-Provence), reportage

Quand il veut démentir la rumeur qui le voudrait comme candidat aux municipales à Marseille, Christophe Castaner loue les charmes de sa cité-tremplin en politique, Forcalquier. Depuis 2001, il en était maire (PS), jusqu’à son ascension au sein de La République en marche (LREM). Aujourd’hui chef du parti d’Emmanuel Macron et secrétaire d’État chargé des Relations avec le parlement, il n’est plus localement que simple conseiller municipal. Mais d’inaugurations en commémorations, « Casta », comme on dit ici, reste tout de même très présent auprès des 5.000 habitants de la bourgade des Alpes-de-Haute-Provence.

Christophe Castaner, ancien maire de Forcalquier et toujours élu municipal.

Forcalquier s’affiche en paradis provençal. À l’écart des grands axes, son centre-ville se montre pourtant d’un dynamisme que n’ont pas les autres bourgs du département. En témoigne, l’imposant marché du lundi, réputé dans toute la région et la diversité des commerces. En périphérie, la municipalité défend l’agriculture locale. Depuis 2015, elle est partenaire de Terre de Liens, une association qui œuvre pour la préservation du foncier agricole. La convention inclut un engagement moral pour « la protection de l’environnement en assurant la promotion de l’agriculture biologique ». Dans le cadre du nouveau projet de plan local d’urbanisme (PLU) qui sera mis aux voix du conseil municipal ce jeudi 14 décembre, la part de terres laissées à la nature et à l’agriculture est plus importante qu’initialement prévu : « 3.920 hectares dans le PLU de 2007, contre 4.043 en 2017 », précise Alexandre Jean, adjoint aux finances et à la communication.

« Imperméabilisation des sols » et « recours à la voiture » 

Mais, depuis quelques semaines, l’inquiétude a repris chez des commerçants et des habitants à propos d’un projet de déménagement et d’extension de l’Intermarché. Un serpent de mer, qui date du premier mandat de Christophne Castaner (celui-ci est son troisième). Un temps attendu sur une parcelle proche du centre-ville, le supermarché restera finalement sur la zone artisanale des Chalus, en entrée de ville. Pour ce faire, le PLU de 2013 prévoyait le déclassement de 2 hectares de terres agricoles attenantes. En 2015, l’Union des commerçants et artisans de Forcalquier (Ucaf) parvient à faire casser le PLU de 2013 par la justice administrative. En sus, la Commission nationale d’aménagement commercial (Cnac) rend un avis défavorable au projet d’Intermarché. Selon ses termes, le projet engendrerait : une « imperméabilisation importante des sols », une consommation non économe de l’espace, un « recours à la voiture » pour la clientèle et une non-contribution « à l’animation de la vie urbaine ». Le tout en considérant « que l’insertion du projet dans un environnement rural et montagnard ne sera pas satisfaisante ».

L’actuel projet d’aménagement de la zone des Chalus (au 16 octobre 2017). L’Intermarché existant est sur la droite : le carré gris, à droite du rond-point rouge, sous la mention « création d’une traversée sécurisée ». Le nouveau centre commercial est en dessous : le trapèze violet et son parking attenant (rectangle marron piqueté de vert).

  • Pour voir le document avec plus de précision :

    L’aménagement de la zone commerciale des Chalus tel que présenté par la mairie le 16 octobre 2017.

Membre de l’Ucaf, Sylvain Roman cite à l’envie Comment la France a tué ses villes : ce livre d’Olivier Razemon analyse l’extinction du commerce et de l’activité des villes moyennes à cause de l’extension des zones commerciales en périphérie. « Ce n’est pas le moment de faire les erreurs qui ont été faites ailleurs quand on a 25 ans d’analyse de ce genre de phénomène », exhorte-t-il. « Les commerçants ne font pas que du commerce, ils rendent un cœur de village vivant. On est dans une situation de développement atone. L’administration ne crée pas d’emplois. Il n’y a pas d’emplois industriels. La distribution détruit des emplois plutôt que d’en créer par rapport aux commerces de ville », ajoute son collègue Éric Lieutaud. L’opticien de Forcalquier est aussi conseiller municipal d’opposition. Il a fait partie de la première équipe de Christophe Castaner de 2001 à 2005 comme adjoint aux finances avant de démissionner.

Sylvain Roman et Éric Lieutaud, de l’Union des commerçants et artisans de Forcalquier.

Depuis une dizaine de jours, le collectif Singularité Forcalquier s’est constitué pour que le village, « ne ressemble pas aux trop nombreuses communes françaises avec un centre-ville déserté et des entrées de ville défigurées par les hangars des grandes enseignes commerciales », affirme son manifeste. Il souhaite que le vote sur le PLU soit suspendu et qu’un débat spécifique sur la question du supermarché soit ouvert avec la population. « On reconnaît que le débat à eu lieu toute l’année sur la révision du PLU. Mais on souhaiterait que cette question soit plus particulièrement prise en compte », demande Vincent Baggioni l’un des initiateurs du manifeste. « Abolition de la publicité, soutien à l’agriculture locale, politique zéro-pesticides »… il reconnaît volontiers les pratiques écologiques de la municipalité, comme « autant de contradictions » avec la volonté affichée sur le dossier du supermarché.

Croire en Forcalquier est l’autre association historique mobilisée sur ce dossier comme sur tant d’autres concernant « la mauvaise gestion de la ville », affirme Richard Danaüs. Pour tenter de répondre à la communication des opposants, la municipalité s’est fendue d’une lettre aux habitants en date du 1er décembre. Elle y affirme que le projet de PLU « augmente de 24 hectares les zones agricoles et naturelles ». « 24 hectares de bois au sommet de la montagne qui ne sont même pas bons pour les biques. En face, ce sont 2 hectares agricoles déclassés pour un privé. À qui profite le crime ? » cingle Richard Danaüs.

La mairie de Forcalquier.

Ce mardi 12 décembre, Singularité Forcalquier remettra en mairie les 500 signatures de citoyens portées sur leur manifeste. L’initiative est soutenue par l’Ucaf, Croire en Forcalquier et par le groupe local de la France insoumise (FI). L’affaire est loin d’être terminée puisque la procédure de révision du PLU, si elle est actée par le conseil municipal, entraînera une enquête publique en 2018. Difficile de comprendre la cohérence et l’attachement de la municipalité à ce projet. Et s’il fallait chercher dans les pratiques politiques de l’ancien maire, Christophe Castaner ?

« On ne peut pas être d’un côté de gauche et écolo et libéral quant il s’agit de favoriser la grande distribution », juge Léo Walter (FI), qui a affronté le chouchou de Macron aux législatives. « La République en marche prétend renouveler la politique, mais Christophe Castaner a fait campagne sur sa personne en disant, si vous voulez les Alpes-de-Haute-Provence au gouvernement, votez pour moi. C’est une façon de dire “je suis votre baron, je parle à l’oreille du président” », tranche Léo Walter. Au sein même de la majorité, des élus sont vent debout contre le déclassement des terres attenantes à la zone des Chalus. Contactés par Reporterre, ils n’ont pas voulu répondre. De quoi poser question sur l’influence du conseiller municipal Castaner. Sollicité, Gérard Avril, le maire installé depuis juillet, n’a pas souhaité répondre à nos questions.


LE PARADOXAL « PLAN DE REVITALISATION DES CENTRES-VILLES » DUGOUVERNEMENT 

Hasard du calendrier, le vote au conseil municipal de Forcalquier (jeudi 14 décembre) se fera au même moment que l’annonce par le gouvernement d’un plan de revitalisation des centres-villes. N’étant pas à un paradoxe près, le gouvernement s’apprête à défendre la possibilité de supprimer l’obligation de faire valider l’installation de commerces de plus de 1.000 mètres carrés par la commission départementale d’aménagement commercial (CDAC).