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Roman: les Loups de Belleville

livre

Lien publiée le 27 mars 2018

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

https://npa2009.org/idees/culture/roman-les-loups-de-belleville

Roman de Sergueï Dounovetz. Collection « Les nouvelles enquêtes de Nestor Burma », French Pulp, 250 pages, 15 euros.

Ouverture somptueuse par une cérémonie funéraire au Père-Lachaise où le nombre de flics et de barbouzes présents laisse comprendre très vite que les coups vont être tordus. Rue de la Bidassoa, des Balkans, du Repos (la mal-nommée), des Vignoles, de la Réunion ou des Haies, nous ne sommes pas dans le vingtième arrondissement touristique mais bien au cœur d’un Paris contemporain où s’affrontent les révolutionnaires kurdes du PKK, menés par la commandante Mâlin Berbang, et les services secrets du Millî İstihbarat Teşkilat (MIT) accompagnés des « Loups Gris » (la milice fasciste supplétive).

PKK et Loups gris

L’histoire s’inspire beaucoup du triple meurtre survenu dans la nuit du 9 au 10 janvier 2013 au Centre d’information du Kurdistan, lorsque trois responsables femmes du PKK (dont une cofondatrice du parti) furent exécutées par un infiltré du MIT et des Loups gris. C’est donc sur fond de terrorisme, d’espionnage, de trafic de drogues et d’armes, ainsi que de prostitution, que le détective inventé par Léo Malet doit mener son enquête entre le double jeu de la DGSE et une police qui n’a pas les mains libres. 

En ouvrant le bal de cette nouvelle série, l’auteur Sergueï Dounovetz donne vie au cadre et aux personnages d’un cahier des charges voulu par le directeur de la collection, Jérôme Leroy, avec l’accord de Jacques Malet, qui permettra une écriture à plusieurs mains. Tous les personnages récurrents inventés par Léo Malet sont donc « actualisés », dans l’esprit même du créateur. Le journaliste éponge Marc Covet est remplacé par Nicky Java l’anisé, la secrétaire Hélène Chatelain par Kardiatou Chatelain (une métisse franco-sénégalaise), Zavatter par Mansour, un kabyle de Bondy surdoué en informatique, le commissaire Florimond Faroux par sa fille, Stéphanie Faroux beaucoup moins conciliante que feu son père, et si Nestor Burma n’est plus tout à fait le même, confronté à un monde qui n’a pas gagné en simplicité depuis les années 1950, il reste toujours aussi libertaire dans l’âme, rend hommage à Jean-Baptiste Clément au Père-Lachaise et essaie toujours d’écrire des poèmes sur la machine à écrire de Rudolf Klement (secrétaire de la IVe internationale assassiné par les staliniens en 1938). Signe des temps, la célèbre pipe à tête de taureau est toujours sur le bureau mais plus guère utilisée.

Les romans de Léo Malet, souvent rédigés selon la méthode dite « écriture spontanée », héritée des surréalistes, ne reposaient pas sur un scénario défini à l’avance et vivaient leur propre vie à un rythme échevelé. Ce premier opus respecte la méthode où le prétexte initial de l’enquête (une liste de responsables turcs appelée à déclencher un scandale si elle était publiée) se perd en cours de route pour rebondir encore plus fort dans un final où les causes féministe et kurde prennent une revanche éclatante. 

Enfin, le traitement de Paris (le 20e arrondissement pour ce premier opus) comme sujet vaut à lui seul le meilleur des guides, et vous donnera l’envie de visiter le cimetière du Père-Lachaise et de vous s’y faire enfermer pour la nuit. 

Prochain volume : Terminus Nord dans le 10e arrondissement. On l’attend déjà !

Sylvain Chardon