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La réalité s’invite à la commémoration de Mai 68 au théâtre de l’Odéon
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
Toute l'obscénité de cette classe dominante répugnante, qui prétend célébrer Mai 68, tout en envoyant les flics réprimer les étudiants.
Des policiers ont plaqué au sol et gazé des étudiants, hier à Paris. (@T_Bouhafs) https://t.co/sdvy0S4nr9 pic.twitter.com/UC1im7pFXC
— Violences Policières (@Obs_Violences) 8 mai 2018
Lundi, un spectacle évoquait in situ l'occupation du théâtre parisien par des étudiants, il y a cinquante ans. Une cinquantaine de «dix-huitards» qui avait tenté en vain de s'y inviter ont été dispersés par les CRS appelés par la direction.
Dans la soirée de lundi, l’Odéon était très occupé. Au-delà des espérances des organisateurs : un spectacle mémoriel, concocté par l’historien Antoine de Baecque, entendait faire revivre in situ et devant une salle comble cet épisode de Mai 68, «principale tribune du "tout est possible"» et célébrer cette «communauté de jeunes gens qui tenta d’inventer une utopie et de la vivre», il a soudainement été rattrapé par le réel.
Haie d’honneur
Vers 20h30, une petite cinquantaine de trublions «dix-huitards» ni cagoulés ni armés, ont tenté de s’inviter à la fête. Devant le refus des appariteurs, quelques barrières métalliques ont volé par-dessus les grilles qui entourent le bâtiment pour le protéger (depuis 68 ?) de toute intrusion intempestive. Il n’en fallut pas plus pour que la direction du théâtre fasse appel aux autorités, qui dépêchèrent en un temps record (à peine cinq minutes) quelques bataillons de CRS lourdement équipés, pour disperser à coups de gaz les importuns (quatre interpellations, deux gardes à vue).
A l’entracte, les spectateurs ont eu la surprise de voir par les fenêtres du théâtre la place de l’Odéon encombrée par les agitateurs qui avaient repris position – après quelques courses-poursuites dans les rues adjacentes – face aux policiers en armes qui stationnaient, façon haie d’honneur de gardes républicains, sur l’escalier de l’entrée. Nombre d’entre eux, s’imaginaient que le spectacle continuait à l’extérieur par d’autres moyens, et louaient tant le sens du happening des organisateurs que le talent des comédiens, flics et gauchistes, tous – et pour cause – plus vrais que nature.
Malaise
La situation a provoqué un malaise grandissant dans la salle, tant parmi le public que chez les intervenants (certains comme le réalisateur Nicolas Klotz ou le philosophe Mathieu Potte-Bonneville ont préféré quitter les lieux), progressivement informés des incidents du dehors, tandis que le maître de cérémonie Antoine de Baecque continuait de distribuer la parole avec un gong. L’historien organisateur affirme cependant qu’il y a eu une vraie discussion dans la salle sur l’obscénité de poursuivre la soirée, qui du coup s’est étirée pendant cinq heures. «La moitié des témoins de l’époque ont tenté d’actualiser leur discours d’hommage au joli mai», certifie Antoine de Baecque. Les dix-huitards auraient-ils pu entrer et mettre le grain de sel et de poivre dans la discussion ? «Trop risqué pour la direction du théâtre», estime De Baecque, qui rappelle que l’occupation de l’Odéon (pendant un mois à partir du 15 mai 1968) s’est très mal terminée pour l’ancien directeur Jean-Louis Barrault, viré par le pouvoir en place.
Pendant ce temps, les intervenants qui quittaient par grappes le théâtre avant la fin du spectacle et passaient le cordon des policiers étaient accueillis par des «il est où, l’esprit de 68 ?» et autres «on veut voir Cohn-Bendit protégé par les flics !». Le compositeur et musicien Rodolphe Burger, intervenant prévu, s’est refusé à participer au spectacle et a tenté de faire entrer un manifestant pour qu’il explique sur scène les événements en cours à l’extérieur. En vain