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L’Express du 22 juillet 1968 : la chasse aux sorcières

mai68

Lien publiée le 24 juillet 2018

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

https://www.lexpress.fr/actualite/politique/l-express-du-22-juillet-1968-la-chasse-aux-sorcieres_2020575.html

A l'été 68, des arrestations ont lieu dans les milieux d'extrême-gauche pour prévenir toute reprise du mouvement étudiant.

L'arrestation, mardi après-midi, aux abords de la gare Saint-Lazare, du principal leader des ex-Jeunesses communistes Révolutionnaires (J.C.R.), M. Alain Krivine, 27 ans, diplômé d'histoire, marque une nouvelle phase dans la répression des activités politiques "subversives" décidée par le chef de l'Etat après la réduction des barricades étudiantes et l'extinction des foyers d'agitation.  

Alain Krivine, victime de la reprise en main du pouvoir, après Mai 68, dans L'Express du 22 juillet 1968.

Il ne s'agit plus seulement "d'assurer l'ordre public d'une façon complète" et de faire "qu'il ne se passe rien ni dans les bâtiments publics ni dans la rue", comme l'exigeait le général de Gaulle au premier Conseil des ministres du nouveau gouvernement, le 13 juillet. La centaine de mandats d'amener lancés par la Cour de sûreté de l'Etat contre les militants des mouvements d'extrême-gauche dissous depuis le 12 juin, le coup de filet contre le Comité d'action étudiants-ouvriers du XIe arrondissement, qui a notamment abouti à l'inculpation de M. Pierre Rousset, fils du député U.D.R. de l'Isère, la rafle du Palais-Royal (voir Notes politiques), la garde à vue de seize personnes appréhendées à Bordeaux à la suite des "explosions" du 14 juillet, l'interpellation de cinq colleurs d'affiches J.C.R. à Brest, et de cinq diffuseurs de journaux interdits à Rouen, la capture enfin de M. Krivine et de sa femme Michèle, fille de l'ancien dirigeant P.S.U., M. Gilles Martinet, montrent la volonté du gouvernement de prévenir, sans ménager aucun moyen, toute résurgence du mouvement de mai à la rentrée d'octobre.  

Ordre. "Ces torchons rouges et noirs, nous ne voulons plus les voir", s'est écrié mercredi soir, à la tribune de l'Assemblée nationale, M. Jacques Bouchacourt, nouveau député U.D.R. de la Nièvre, renchérissant sur les propos de son secrétaire général , M. Robert Poujade : "Certains des instigateurs des troubles de mai doivent s'estimer heureux que la République n'ait pas pris contre eux des sanctions plus sévères. Désormais, la provocation à l'émeute ou, le cas échéant, au crime, condamnée par l'opinion publique et le corps électoral, ne peut relever que des juridictions compétentes. La gendarmerie et la police ne disposent pas de tous les moyens nécessaires à l'accomplissement de leurs tâches."  

En termes plus politiques, le Premier ministre, M. Maurice Couve de Murville, venait d'ailleurs d'affirmer "sans équivoque" à cette même tribune que "l'ordre public était le premier souci du nouveau gouvernement." Mais ce ne peut être tout à fait celui du ministre de l'Education nationale, M. Edgar Faure, qui risque de voir compromettre par l'intensification des opérations policières contre ses interlocuteurs éventuels, le succès de l'opération séduction qu'il veut tenter auprès de la jeunesse universitaire.  

Quadrillage. Il n'aura pas trop de deux mois pour convaincre les étudiants, que les vacances ne semblent pas avoir démobilisés, de sa volonté de réforme : ce n'est pas celle qu'annoncent les grandes manoeuvres du ministre de l'Intérieur, M. Raymond Marcellin. La leçon des barricades de mai est que, dès l'origine, la répression des éléments révolutionnaires qui ne veulent rien de moins que l'effondrement de la société actuelle a fait "basculer" vers eux la masse des "réformistes", lesquels ne songent qu'à l'aménagement de l'Université et du système de l'enseignement 

Un début de "chasse aux sorcières" dans l'engrenage glissant du passage à la clandestinité des uns et du quadrillage policier des autres, compliquera pour le pouvoir la recherche d'interlocuteurs nécessaires et encore fuyants. Et la crainte de ne pas être solidaire, risque de l'emporter, alors, sur le désir de dialoguer.