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Dans l’affaire Benalla, Macron est un "enfant-roi" irresponsable
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
Par Thomas Guénolé
Ceux qui voyaient en Macron un nouveau De Gaulle découvrent en lui un nouveau Nixon. Dans cette affaire où tout remonte à lui, il y a escroquerie politique
Emmanuel Macron est un menteur. Nous le savons, parce qu'ayant connaissance des délits graves de son homme de main Alexandre Benalla, il les a cachés à la justice. N'en déplaise aux perroquets qui répètent en boucle les éléments de langage de l'Elysée, ce n'est pas une affaire secondaire: il est question d'usurpation de la fonction de policier, d'abus de pouvoir sur des policiers en leur donnant des ordres indûment, et de tabassage de manifestants. Ceci, sans oublier l'avalanche de privilèges choquants(appartement, voiture, salaire...) dont Benalla a bénéficié en toute opacité.
Emmanuel Macron est un menteur. Nous le savons, parce qu'il a fait savoir à la presse le 22 juillet qu'il trouvait ces faits "inacceptables" et qu'il n'y aurait "pas d'impunité". Or, il a lui-même couvert les méfaits de Benalla pendant plusieurs mois. Le niveau de mensonge se situe donc ici entre le ridicule et l'insultant.
Emmanuel Macron est un menteur. Nous le savons, parce que le 23 juillet, Alain Gibelin, directeur de l'ordre public de la préfecture de police de Paris, a révélé à la commission d'enquête de l'Assemblée nationale ceci: Alexandre Benalla n'avait "aucune autorisation de la préfecture de police" pour assister à la manifestation du 1er Mai où il a molesté deux manifestants. Or, l'Elysée a prétendu le contraire.
Macron est un lâche. Après avoir trouvé énormément de temps libre pour faire de la récupération politique à outrance avec la victoire des Bleus, le voici qui se tait, le voici qui envoie ses lieutenants à sa place, le voici qui se cache.
Emmanuel Macron est un menteur. Nous le savons, parce que le même jour, le même Alain Gibelin a révélé qu'entre le 2 et le 18 mai, période durant laquelle Alexandre Benalla était censé avoir été sanctionné par l'Elysée pour ses méfaits par une mise à pied, ledit Benalla a continué à assister à des réunions d'organisation de la sécurité du chef de l'Etat. Cela prouve que la mise à pied élyséenne est bidon. Par parenthèse, quand Alain Gibelin s'est rétracté le lendemain sur ce point, en prétextant avoir "mal compris la question", c'est évidemment un mensonge, puisque la députée qui l'a interrogé lui a répété deux fois les dates.
Emmanuel Macron est un lâche. Nous le savons, parce qu'à peine quelques jours après avoir trouvé énormément de temps libre pour venir faire de la récupération politique à outrance de la victoire des Bleus, le voici qui se tait, le voici qui envoie ses lieutenants à sa place, le voici qui se cache, face à une affaire où tout pourtant remonte à lui. Et quand il déclare le 24 juillet aux députés LREM: "S'ils cherchent un responsable, c'est moi. (...) Qu'ils viennent me chercher!", sa lâcheté demeure: car il sait bien qu'aucune institution n'a le pouvoir de le forcer à répondre à une convocation.
Ce dernier point est à souligner car il révèle une escroquerie politique. Des millions de Français ont cru au fantasme de "Jupiter" à l'Elysée: un nouveau De Gaulle, qui aurait le courage de tout affronter et de tout assumer. Ce fantasme, Emmanuel Macron l'éprouve d'ailleurs lui-même à l'évidence. Or, que voit-on dans l'affaire Benalla? Un lâche. Cet homme n'affronte rien, n'assume rien, ment, et se cache derrière des fusibles. Ceux qui voyaient en Macron un nouveau De Gaulle, découvrent ainsi en lui un nouveau Nixon. Jouir du pouvoir suprême tant que tout va bien, mais fuir au premier vrai coup de semonce: pareille attitude est indigne d'un président qui se veut "despote éclairé"; pareille immaturité politique est plutôt celle d'un "enfant-roi".
Dans une démocratie adulte, les contre-pouvoirs sont si forts que l'immaturité politique d'un homme, même chef du pouvoir exécutif, ne peut pas gangrener impunément la chose publique.
Dans une démocratie adulte, les contre-pouvoirs sont si forts que l'immaturité politique d'un homme, même chef du pouvoir exécutif, ne peut pas gangrener impunément la chose publique. L'affaire Benalla nous prouve qu'à cet égard, la Ve République n'est pas une démocratie digne de ce nom. Une information judiciaire a bien été ouverte; mais c'est par le parquet, qui n'est pas un pouvoir indépendant du gouvernement. Une commission d'enquête parlementaire a bien été créée; mais la majorité macroniste à l'Assemblée l'a sabotée en refusant d'auditionner plusieurs témoins-clés –et de toute façon, mentir en audition n'entraîne pas de poursuites. Une motion de censure pour renverser le gouvernement peut être déposée, mais il est impossible de l'adopter avec la majorité macroniste robotique actuellement en place. Le reste est à l'avenant.
Il est grand temps d'abolir la monarchie absolue présidentielle une fois pour toutes.
Ainsi, sous la Ve République française, l'homme de main d'Emmanuel Macron peut accumuler les privilèges les plus choquants, il peut usurper la fonction de policier, il peut donner des ordres indûment à des policiers, il peut tabasser lui-même des manifestants, l'Elysée peut monter une mise à pied bidon pendant laquelle il continue de travailler, l'Elysée peut cacher ses délits graves à la justice pendant des mois, et l'Elysée comme le ministère de l'Intérieur peuvent mentir en boucle sur cette affaire, sans qu'il y ait le moindre contre-pouvoir institutionnel pour les arrêter.
Au-delà de l'écume et des scandales à tiroirs, il est grand temps de se remémorer ces lignes de Montesquieu dans L'Esprit des Lois: "C'est une expérience éternelle, que tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser; il va jusqu'à ce qu'il trouve des limites. (...) Pour qu'on ne puisse abuser du pouvoir, il faut que, par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir". Face à l'enfant-roi Macron, ivre de lui-même, qui règne en toute irresponsabilité, il est grand temps de se mobiliser en masse pour une VIe République véritablement démocratique, enfin dotée de solides contre-pouvoirs –et qui abolisse la monarchie absolue présidentielle une fois pour toutes.