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Etats-Unis : Alexandria Ocasio-Cortez et les socialistes vont-ils réveiller le Parti démocrate?

USA

Lien publiée le 10 août 2018

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

https://www.lejdd.fr/international/etats-unis-alexandria-ocasio-cortez-et-les-socialistes-vont-ils-reveiller-le-parti-democrate-3727880

Vainqueur d'une primaire à New York, Alexandria Ocasio-Cortez a donné espoir aux socialistes américains, qui espèrent faire bouger les lignes au sein du parti démocrate.

Alexandria Ocasio-Cortez ce week-end lors de la convention annuelle des progressistes à la Nouvelle-Orléans.

Alexandria Ocasio-Cortez ce week-end lors de la convention annuelle des progressistes à la Nouvelle-Orléans. (Reuters)

Les socialistes vont-ils insuffler un nouvel élan au Parti démocrate? Depuis la victoire surprise, fin juin, d'Alexandria Ocasio-Cortez, une jeune hispanique de 28 ans, lors de la primaire du parti dans la 14e circonscription de New York, c'est une des questions qui agitent le microcosme politique américain. Opposée à Joe Crowley, 56 ans dont 20 ans de mandat à la Chambre des représentants, cette fille de Portoricains, qui cumulait encore trois emplois il y a un an, s'est largement imposée (57% des voix). Sa victoire lors de l'élection de novembre semble désormais une formalité, dans cette circonscription qui a voté pour Hillary Clinton à 77% en 2016. Elle deviendrait ainsi la plus jeune femme de l'histoire à être élue à la Chambre des représentants.

Elle rappelle régulièrement que ses idées progressistes n'ont rien de nouveau, elles étaient défendues dans les années 1940 par le Parti démocrate quand Franklin D. Roosevelt était au pouvoir. "Notre campagne était ultra-concentrée sur un message de dignité économique, sociale et raciale pour les travailleurs américains", expliquait-elle en juin sur MSNBC. "C'est vraiment la voie à suivre (...). Nous devons présenter un plan et une vision à laquelle les gens puissent croire et je ne crois pas que ce soit en entrant dans des batailles sur Twitter avec le président que nous allons progresser en tant que pays".

Des candidats dans la lignée de Bernie Sanders

Bernie Sanders, qu'elle avait soutenu pendant sa campagne pour la primaire démocrate en 2016, a salué son succès : "Elle s'en est pris à tout l'establishment démocrate local de sa circonscription et a remporté une très ferme victoire." Comme l'avait fait le sénateur du Vermont face à Hillary Clinton, Alexandria Ocasio-Cortez a mis en difficulté Joe Crowley avec un message anti-élites et un programme prônant notamment une couverture de santé universelle, ce qui n'existe pas aux Etats-Unis. Elle "a démontré encore une fois ce que la politique progressiste de terrain peut faire", a salué Bernie Sanders, 78 ans en septembre, qui avait galvanisé une partie de la jeunesse américaine il y a deux ans.

Elle a démontré encore une fois ce que la politique progressiste de terrain peut faire

Dans sa bio Twitter, Alexandria Ocasio-Cortez l'assure : "Il y a des candidats comme moi partout", indique-t-elle. Et force est de constater que ces dernières semaines, être "socialiste" n'est plus un gros mot outre-Atlantique. Dans le Maryland, Ben Jealous a largement remporté la primaire devant un candidat soutenu par l'establishment, pour tenter de déloger en novembre le gouverneur républicain. En mai, Stacey Abrams, elle aussi soutenue par Bernie Sanders, avait remporté une victoire historique aux primaires démocrates en Géorgie, en devenant la première femme noire candidate au poste de gouverneur.

Le nombre de socialistes en nette augmentation

Depuis novembre 2016, le nombre de membres du DSA, le parti socialiste démocrate américain, est passé de 5.000 à 40.000 environ. Une progression exponentielle qui s'explique de diverses raisons :

  • Une forte défiance vis-à-vis de Donald Trump et de sa politique ;
  • Un rejet du capitalisme dans sa forme la plus dure et de ses dérives ;
  • Un décalage avec l'establishment démocrate, jugé hors-sol.

Un sondage conduit en 2016 a montré que chez les 18-29 ans, qui n'ont pas connu la Guerre froide, 33% des Américains soutenaient l'idée du socialisme et 51% ne soutenaient pas le capitalisme. Des résultats si étonnants que le directeur de l'institut politique de Harvard, qui a réalisé le sondage, a d'abord cru à une erreur, indique le New York Times. Mais une nouvelle enquête a apporté des résultats identiques.

Un progressiste face à Trump en 2020?

Depuis quelques semaines, Alexandria Ocasio-Cortez tente donc de surfer sur cette vague et sur sa nouvelle notoriété. Elle parcourt le pays pour soutenir les candidats "progressistes". Elle s'est notamment rendue dans le Texas, le Kansas et le Missouri avec Bernie Sanders. "Quand Alex a gagné, ça a tout changé", raconte au Guardian Cori Bush, candidate dans le Missouri. "Tout d’abord, cela nous a donné un nouvel élan et aidé à nous revitaliser, puis cela a immédiatement attiré l'attention nationale." Il n'en fallait pas plus pour que certains imaginent l'ancienne serveuse, pas encore élue au Congrès, affronter Donald Trump en 2020 pour la Maison-Blanche.

Les électeurs indécis ne votent pas pour la personne la plus modérée, la plus timide ou celle qui recule. Ils votent pour des candidats authentiques

Ce week-end, lors de la conférence annuelle des progressistes américains, ces derniers ont fait passer un message très clair : ils ne veulent pas d'un modéré pour affronter le milliardaire dans deux ans. Le maire de New York, Bill de Blasio, a appelé à "dire aux voix qui invoquent un faux pragmatisme et une modération bidon que nous ne croyons plus à leurs mensonges." "Les électeurs indécis ne votent pas pour la personne la plus modérée, la plus timide ou celle qui recule", a ajouté Alexandria Ocasio-Cortez. "Ils votent pour des candidats authentiques."

Paradoxalement, la victoire de l'outsider Donald Trump en 2016 a ouvert le champ des possibles. D'autant plus que selon un sondage, Bernie Sanders recueillerait 28% des voix si la primaire démocrate avait lieu aujourd'hui, seulement devancé par Joe Biden (30%), toujours très populaire. Et rien ne dit que les deux septuagénaires seront de la course à l'investiture dans deux ans. Pour Alexandria Ocasio-Cortez et les progressistes américains, il y a donc une place à prendre.

Les démocrates raillés par Trump

Mais l'enthousiasme des socialistes n'a pas encore conquis l'Amérique. "Des candidats à la Bernie continuent de perdre pratiquement toutes les primaires démocrates où ils se présentent", rappelait en juin le groupe de réflexion de centre-gauche "Third Way". "Si les démocrates regagnent effectivement le contrôle de la Chambre - ce que nous espérons fortement et estimons qu'ils vont faire - cela sera largement grâce à des modérés qui gagnent dans des circonscriptions difficiles."

En attendant, Donald Trump se félicite, lui, de la secousse qui agite l'opposition, et à chaque victoire d'un progressiste, salue la défaite du ténor démocrate tombé face à lui. Après le succès d'Alexandria Ocasio-Cortez, il avait tweeté : "Les démocrates sont dans la tourmente!" Dans deux ans, il pourrait pourtant faire les frais de ce débat interne, si jamais il permet au Parti démocrate de faire émerger un candidat et des idées crédibles.