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Jacques Sapir : il est urgent de dissoudre la zone euro
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
La crise de la zone euro a atteint un point critique. Quelles que soient les solutions envisagées, qu'il s'agisse de la mutualisation de la dette ou des mesures dites "non conventionnelles" que la Banque centrale européenne pourraient prendre, elles ne peuvent apporter de solution durable. A cela une bonne raison : cette crise n'est pas une crise de la dette souveraine mais une crise de compétitivité aggravée par l'effet pervers de l'euro sur la croissance.
Les différentes mesures prises depuis le début de 2010 ont été globalement inopérantes. Elles n'ont pu éviter que, pays après pays, cette crise s'étende, de la Grèce à l'Irlande, de l'Irlande au Portugal, puis à l'Espagne et à l'Italie. La situation dans la plupart des pays va continuer à se dégrader sous l'effet de la conjonction de politiques mal avisées de déflation compétitives, qui sont l'équivalent des politiques de dévaluation compétitives que l'euro prétendait supprimer. Alors que le chômage recommence à fortement monter en France, il est temps de changer de politique, sinon nous nous imposerons l'équivalent d'une grande dépression par notre propre stupidité.
DES POLITIQUES INEFFICACES LIÉES À UNE ERREUR DE DIAGNOSTIC
Les dirigeants européens se sont persuadés que cette crise était liée à l'endettement, qui provoque des problèmes, bien réels, de liquidité. D'où la solution proposée : se désendetter par une virulente cure d'austérité. Mais, les politiques d'austérité provoquent un effondrement des recettes fiscales, visibles dans le cas de la Grèce, de l'Espagne et de l'Italie, qui reproduit le déficit et la dette. Cette crise de la dette n'est que la conséquence directe de la crise de compétitivité interne et externe structurellement issue de l'existence de l'euro.
Les écarts de compétitivité n'ont cessé de s'accroître ces dernières années. Aujourd'hui, ils imposeraient des baisses instantanées des coûts salariaux de l'ordre de 20 % en France, et nettement plus en Espagne et en Italie, sans même parle de la Grèce et du Portugal. En l'absence d'une telle baisse, les pays concernés sont condamnés à voir se creuser leur déficit commercial et à perdre massivement des pans entiers de leurs activités industrielles. Ils tentent d'y répondre par des subventions aux entreprises qui grèvent lourdement leur budget, et qui dans le cas de la France dépassent les 3 % du PIB. Cette crise de compétitivité induit aussi des destructions d'emplois importantes.
En France, ce sont au minimum 300 000 emplois industriels qui sont menacés d'ici à décembre, à la fois dans les grandes entreprises et les PME-PMI. Au premier semestre de 2013 ce sont encore 200 000 emplois supplémentaires qui devraient être détruits. La situation est bien pire en Espagne (avec 24 % de chômeurs) et l'on s'approche des niveaux espagnols en Grèce et au Portugal. A ces subventions aux entreprises viennent donc s'ajouter les coûts d'indemnisation des travailleurs licenciés. Il ne faut pas chercher plus loin la cause du déficit public et de l'accroissement de la dette.
Ceci est aggravé par l'anémie les pays de la zone euro depuis l'introduction de la monnaie unique. Le décalage de croissance est net avec les autres pays développés non membres de la zone euro.
Il faut donc s'attendre à une montée du chômage de 3 % à 4 % au minimum sur un horizon de douze mois. Dans ces conditions, parler de "redressement productif" pour la France est une sinistre fumisterie.
L'IMPÉRIEUSE NÉCESSITÉ DE BAISSER LES COÛTS SALARIAUX
Cette baisse des coûts salariaux peut, en théorie, se faire de trois façons. On peut imaginer qu'elle se fasse par l'accroissement des salaires, et de l'inflation, en Allemagne. Mais nous n'avons que peu de prise sur ces paramètres. De plus, pour obtenir rapidement le décalage nécessaire, il faudrait que l'Allemagne accepte sur deux ans des taux annuels d'inflation de 12 %. C'est, évidemment, parfaitement illusoire. De plus, si cette mesure ne règlerait en rien le problème de compétitivité vis-à-vis des pays extérieurs à la zone euro, qu'ils soient européens (Roumanie, République Tchèque, Pologne) ou non-européens.
Une deuxième solution réside dans la déflation salariale nominale. C'est la logique de ce que proposent tant le gouvernement que l'UMP. Mais, ses conséquences sur l'économie française seront dramatiques. La consommation baissera de 12 % à 15 % (suivant les effets d'entraînement), ce qui, sur une période de deux ans se traduira par une chute du PIB de 4 % à 5 % par an. Le chômage atteindra 20 % de la population active . Une telle baisse du PIB entraînerait d'ailleurs une réduction des recettes fiscales. La dette publique atteindrait, si le gouvernement s'en tenait aux objectifs de déficit annoncés, 99 % du PIB ! La déflation salariale ne ferait qu'aggraver la situation.
Reste une troisième solution, une dévaluation. Cette dernière pourrait se faire dans un cadre envisagé par un nombre de plus en plus important d'économistes dont le dernier en date est l'ancien ministre des finances du Brésil, Carlos Bresser-Pereira : une dissolution concertée de la zone euro. Les pays de la zone euro s'accorderaient pour suspendre le fonctionnement de l'euro et pour décider d'un retour aux monnaies nationales. Ceci rendrait possible une dévaluation, qui est en réalité la méthode la plus simple, la plus rapide et la moins douloureuse de faire baisser le coût du travail sur le territoire français.
Une décision concertée de suspension de la monnaie unique est donc la meilleure solution. Elle répond aux interrogations quant à l'avenir de l'Union européenne que suscite le délitement de la zone euro, et qui font craindre le retour aux égoïsmes nationaux. Elle permettrait en effet de présenter cette décision comme une décision européenne et non comme un retour à des politiques nationalistes et éviterait une dissolution progressive et désordonnée de la zone qui devient désormais une réelle possibilité. Déjà, nous voyons les crispations identitaires, produites par la montée du chômage et l'appauvrissement généralisé, se développer dans de nombreux pays. L'euro est en train de tuer l'Europe.
Une décision coordonnée permettrait de définir des niveaux de dévaluation et de se doter des mécanismes susceptibles de contrôler les mouvements de ces nouvelles parités.
Les dirigeants français ont communié depuis des années dans la religion de l'euro. On comprend que changer de politique soit difficile. Mais ils doivent comprendre que ce qui nous attend, tant en France qu'en Europe, sera incommensurablement plus pénible, et aura de tragiques répercussions, s'ils ne prennent pas cette décision. Gouverner, c'est choisir.
Jacques Sapir, directeur d'études à l'EHESS-Paris, directeur du CEMI-EHESS