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Comment le spartakisme fut défait
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https://www.monde-diplomatique.fr/2018/11/IRIGOYEN/59212
Aux premiers jours de 2018, la gauche radicale a rendu hommage dans les rues de Berlin à Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht, comme elle le fait chaque année dans le cadre des commémorations du 15 janvier 1919, jour de l’assassinat de ces deux dirigeants de la Ligue spartakiste par des corps francs, auxiliaires armés du pouvoir social-démocrate, déterminé à écraser les mouvements révolutionnaires qui travaillent le pays. À l’approche du centenaire de l’événement, plusieurs intellectuels européens étudient la pensée de Rosa Luxemburg (1). Dans un recueil de vingt contributions, parmi lesquelles celles du philosophe André Tosel, à qui l’ouvrage rend hommage, Michael Löwy et Pierre Musso, la philosophe Marie-Claire Caloz-Tschopp, codirectrice de l’ouvrage, s’intéresse à la théorie de l’« effet boomerang » imposé par l’impérialisme et s’inscrivant « dans la logique expansionniste du capitalisme qui, après avoir apporté “ses convulsions aux peuples non capitalistes”, revient vers son point de départ en imposant le nouveau “mode d’existence” ». L’historien Jean-Numa Ducange retient surtout la « radicalité politique » de cette pensée « avec un arrière-fond libertaire ou antiautoritaire revendiqué jusqu’à aujourd’hui par une fraction de la gauche radicale ». Cette spécificité doctrinale explique les divergences entre Rosa Luxemburg et Lénine, qui, selon Tosel, « avait une conception beaucoup trop dogmatique du parti ». Lénine « n’a pas répondu véritablement à la revendication de démocratie qu’elle formulait, notamment quand elle disait qu’il n’y a pas la liberté s’il n’y a pas la liberté pour ceux qui ne pensent pas comme nous, les opposants ». Le désaccord est encore plus manifeste à propos des conseils (soviets, en russe), conçus, selon les luxemburgistes, attachés à l’auto-organisation des masses, comme « les “embryons” des nouvelles institutions politiques et d’une nouvelle forme de gouvernement, ayant comme objectif d’éviter que le pouvoir constitué n’élimine de la scène le pouvoir constituant ».
Mais est-il possible qu’il y ait deux piliers pour un pouvoir révolutionnaire partagé, en l’occurrence les conseils et un gouvernement à dominante sociale-démocrate ? Certains États allemands en font très tôt le pari, explique l’universitaire Cécile Poncet dans un autre ouvrage collectif (2) : « Au matin du 8 novembre 1918, les Bavarois sont ainsi les premiers (…) à se réveiller (…) citoyens et citoyennes d’un “État libre”, lequel est dirigé d’une part par un gouvernement de coalition (…) et d’autre part par des conseils de soldats, d’ouvriers et de paysans. » Les premières semaines voient l’émergence de nouveaux droits (vote des femmes, journée de travail de huit heures, retrait de l’enseignement scolaire du giron clérical). En avril 1919, le conseil de Bavière tente un coup de force pour incarner, seul, l’autorité régionale. Il sera bientôt défait par le gouvernement central.
Cette défaite annonce la fin d’un large mouvement d’émancipation né à Kiel, dans le nord de l’Allemagne. Fin octobre 1918, des marins se mutinent. Ils refusent de livrer un ultime combat contre la Royal Navy. Ils savent que ferrailler contre les Britanniques signe leur arrêt de mort alors que la guerre est déjà perdue (3). L’historien Martin Rackwitz détaille chaque épisode de cette sédition, considérée comme le véritable détonateur d’un mouvement de contestation plus ample qui conduira à l’abdication de Guillaume II et, par extension, à la fin politique des Hohenzollern.
Ironie de l’histoire, ces soldats mécontents qui refusaient l’anarchie « mais voulaient une république sociale (4) » firent confiance à Gustav Noske. Ce député social-démocrate, tenant d’une ligne droitière, fut envoyé sur place pour apaiser les tensions. Certes, il empêcha un bain de sang dans la ville portuaire, mais il demeure celui qui, plus tard, fit écraser la révolution spartakiste à Berlin. Un symbole de la collusion entre une partie de la « gauche » et les forces de la réaction.
William Irigoyen
Journaliste.
(1) Marie-Claire Caloz-Tschopp, Romain Felli et Antoine Chollet (sous la dir. de), Rosa Luxemburg, Antonio Gramsci, actuels, Kimé, Paris, 2018, 392 pages, 29 euros.
(2) Alexandre Dupeyrix et Gérard Raulet (sous la dir. de), Allemagne 1917-1923. Le difficile passage de l’Empire à la république, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, Paris, 2018, 165 pages, 19 euros.
(3) Martin Rackwitz, Kiel 1918. Revolution - Aufbruch zu Demokratie und Republik, Wachholtz, Kiel, 2018, 302 pages, 19,90 euros.
(4) Traduction de l’auteur.