[RSS] Twitter Youtube Page Facebook de la TC Articles traduits en castillan Articles traduits en anglais Articles traduits en allemand Articles traduits en portugais

Newsletter

Ailleurs sur le Web [RSS]

Lire plus...

Twitter

Gilets jaunes: bilan du mardi soir par Vincent Présumey

Gilets-jaunes

Lien publiée le 21 novembre 2018

Tweeter Facebook

Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

https://aplutsoc.org/2018/11/20/20-novembre-2018-billet-du-mardi-soir/

Tranche de vie réelle.

 Voici une tranche de vie réelle, prise au camarade Laurent, militant syndical (CGT) et politique (NPA).

Ce matin, retour au taff (Je ne bosse pas le lundi). Je vais pointer en arrivant et je tombe sur mon chef: -"Bonjour Laurent, alors on a enlevé le gilet jaune?" -"Bonjour euh... non mais moi j'ai pas participé aux blocages." -"Ah bon? Ah c'est bien ça, tu te déradicalises (hahaha)" -"..." -"En tout cas, je suis content que tu sois là. J'avais peur que tu te mettes en grève. Avec l'arrivage d'aujourd'hui on aurait été dans la merde." -"Ah... euh... ben non, je suis là" Après ce premier échange gênant, direction le vestiaire. Je tombe sur un collègue... en gilet jaune. -"Salut Laurent! Je pensais te voir ce week-end, on a bloqué Auchan, on a fait fermer tout le centre commercial, c'était trop bien! On a dû leur faire perdre une tonne de fric à ces enfoirés. Moi, je garde le gilet jaune, j'y retourne après le boulot!" -"Salut euh... non mais moi j'étais à Paris ce week-end, je pouvais pas y être." -"Mais pourquoi vous les syndicats vous appelez pas à la grève ?" -"Euh... ben... c'est vrai tu as raison, on devrait." -"Franchement moi je suis prêt à partir en grève illimité jusqu'à ce que ce connard de Macron dégage. Y'en a marre, on s'en sort plus à la fin du mois" -"(enthousiaste) T'as bien raison! Si tu veux on peux en parler aux collègues ce matin et si on est plusieurs à être prêt à le faire, on pourrait partir en grève dès demain pour demander des augmentations de salaire!" -"Ouais mais ça va servir à quoi si on est seul à faire grève dans notre petite boîte ? On va gagner quoi ? 50 balles d'augmentation ? Pour que le gouvernement nous les bouffe aussitôt en augmentant les taxes ?" -"C'est déjà un début. Et si tout le monde fait comme nous dans toutes les boites on arrivera à un mouvement général." -"Moi je le sens pas. Il faut que ton chef, le moustachu, appelle à la grève partout en même temps. Là on pourra faire trembler les dirigeants." -"..." -"Tu lui diras hein?" -"Euh... J'ai pas son 06 mais ouais t'inquiètes, c'est déjà ce que je défends." La semaine va être longue...

Cela branle dans les syndicats.

 Le « chef moustachu » du camarade Laurent n’était pas au Bureau confédéral de lundi matin, lequel, avec 4 participants sur 10 membres, ne pouvait rien décider (« étonnant, non ? »). Dans de nombreuses structures CGT, l’exigence de « faire quelque chose » monte.

La FNIC-CGT, Fédération des Industries Chimiques, publie un communiqué dans lequel on peut lire :

 » … la mobilisation des travailleurs du 17 novembre a montré un raz-le-bol général. » Elle était pourtant mal partie, écrit la Fédération, en raison de l’orchestration « de la droite réactionnaire autour du seul sujet de la taxe sur le Diesel. » Mais elle salue « l’immense masse des salariés, retraités et citoyens rassemblés dans les centaines et centaines de blocages«  parmi lesquels, affirme-t-elle, « on retrouvait nombre de nos syndiqués et de nos militants. Les formes d’action ne sont pas « orthodoxes » ? » (…) Et alors ? Les mobilisations « saute-mouton » dites « journées d’action » sont de moins en moins suivies …«  car non saisies comme efficaces par les salariés. La FNIC-CGT appelle à la grève pour les salaires « à partir du jeudi 22 novembre«  les secteurs du pétrole et du caoutchouc, et déclare vouloir étendre cette mobilisation à l’ensemble de la chimie, des industries pharmaceutiques et de la plasturgie.

La Commission Exécutive Confédérale de la CGT a sorti un communiqué dans la journée affirmant « comprendre » et « porter » la « colère légitime » qui s’exprime, sans nommer les Gilets jaunes, reproche au gouvernement de ne pas dialoguer, avance les revendications de SMIC à 1800 euros, prise en charge des transports pour le travail, TVA à 5%, et « fiscalité juste ». Mais attention : « Dans cette période de clair-obscur où peuvent surgir les monstres, la CGT appelle les citoyens à ne pas laisser dévoyer leur colère par ceux distillant des idées xénophobes, racistes, homophobes. C’est bien tous ensemble que nous pourrons infléchir la politique du Président des riches. »

C’est sur cette base – infléchir Macron – que la direction de la CGT appelle à manifester le 1° décembre, à un rassemblement déjà prévu contre le chômage et la précarité.

Au moment où « Macron démission », slogan déjà scandé par les manifestations intersyndicales, dans les cortèges CGT, le 9 octobre dernier, devient celui de couches entières de la population, il faudrait faire en sorte d’« infléchir« sa politique, tout en faisant en sorte que « les monstres » ne sortent pas du « clair-obscur ».

En voila bien, du clair-obscur ! On ne peut combattre « les monstres » si l’on craint de battre et de chasser Macron !

Du côté de la CGT-FO, la « junte » qui a pris le pouvoir suite à l’éviction-éclair de Pascal Pavageau (un comité spécial non prévu par les statuts, composé de Franck Bergamini, Gabriel Gaudy, Frédéric Homez, Yves Kottelat, Michel Le Roc’h, Hubert Raguin et Jacques Techer) n’a strictement rien communiqué à propos des évènements en cours dans le pays. Le Comité Confédéral National devant désigner son successeur commence demain. La « junte » voulait s’entendre préalablement à ce sujet, mais ceci a explosé en raison de la candidature de Patrice Clos, « hors junte », demandant que l’audit sur les permanents et les finances qu’aurait voulu faire P. Pavageaux, ait bel et bien lieu. Du coup, deux candidats issus de l’appareil confédéral se présentent, Christian Grolier (Fonction publique) et Yves Veyrier (présenté comme un pape de transition, le plus ancien de la direction actuelle). C’est la Fédération des Transports qui, dans cette journée du 20 novembre, vient de publier le communiqué suivant :

« La Fédération Nationale des Transports et de la Logistique FO/UNCP, en solidarité avec le mouvement citoyen « Gilets jaunes », appelle tous ses militants, adhérents et sympathisants à participer et organiser toutes actions visant à revendiquer l’augmentation du pouvoir d’achat. Au regard du mépris et de l’arrogance du gouvernement, la Fédération Nationale des Transports et de la Logistique FO/UNCP n’exclut pas de durcir le mouvement par un appel à la grève de l’ensemble des secteurs qu’elle représente.

Paris le 20 novembre 2018, le Bureau Exécutif Fédéral de la Fédération des Transports et de la Logistique FO. »

L’Union syndicale Solidaires, dans un communiqué diffusé hier soir, tout en justifiant l’absence d’appel syndical aux « barrages » par « les mots d’ordre racistes, sexistes et homophobes«  (en fait nullement généralisés sur ces barrages), propose à toutes les centrales syndicales de se réunir en urgence. Le Conseil délibératif fédéral national de la FSU avait lieu la semaine dernière et n’a pas adopté de position en raison des divergences existantes. Des sections départementales comme celle de l’Allier, qui constate que plusieurs de ses militants, notamment parmi les agents de nettoyage, sont présents sur les barrages, déclare « le syndicalisme ne peut pas rester l’arme au pied« , appellent à des intersyndicales et déposent des préavis de grève.

Rappelons que la CFDT a appelé à un « Grenelle »« relance du dialogue social », et à ne surtout pas se rendre sur les barrages, où l’on trouve sans aucun doute certains de ses adhérents. Même chose pour l’UNSA.

D’autre part, les camarades du regroupement Front social ont lancé un « évènement Facebook » : L’exaspération est générale. La riposte doit être générale, pour « une grande manifestation nationale à Paris de l’Élysée au MEDEF », le samedi 15 décembre.

 Lutte de classe.

 Soyons clairs : la voie à suivre, si elle se concrétise, est celle qu’indiquent les Fédérations Chimie de la CGT et Transports de la CGT-FO, c’est à dire la grève sur les lieux de production maintenant.

Il était évident que la poursuite des barrages se heurterait à cette question là. Les coordonnateurs de groupes Facebook « Gilets jaunes » soit n’ont pas encore la pratique de la grève soit sont des militants camouflés de droite et d’extrême-droite qui n’en veulent pas et mènent donc les autres Gilets jaunes dans le mur.

Une grande manifestation nationale à l’Élysée ce samedi 24 novembre, avec montée en masse dans les trains, comme cela circule, réussirait par la grève et l’association des cheminots – à moins qu’il ne s’agisse d’un baroud d’honneur, alors que les Gilets jaunes de base sont déterminés, eux.

L’enjeu est donc immédiat.

L’appel de la FNIC-CGT est à partir de jeudi. Mais dès demain la CGT Total/Raffinage Pétrochimie appelle à une journée de grève dans les raffineries. L’enjeu est la protection de la convention collective de branche menacée par les ordonnances Macron. C’est un enjeu central qui justifie la grève et justifierait sa poursuite au delà de mercredi, dans l’unité avec les autres industries chimiques.

Les infirmières et infirmiers ont manifesté en France ce mardi. L’Ordre des infirmiers, une institution corporative, a affirmé que les blouses blanches n’auraient rien à voir avec les gilets jaunes ! Ce n’est certainement pas ce genre de propos qui circulaient dans les rassemblements d’infirmières !

A Perpignan, au Canet et à Prades, des lycéens sont sortis pour faire comme les Gilets jaunes, c’est-à-dire comme leurs parents et amis un peu plus âgés, et des heurts avec la police ont eu lieu à Perpignan.

A La Réunion, le couvre-feu – le couvre-feu ! – a été instauré par la préfecture aux ordres de M. Castaner.

 Pas de lutte syndicale si l’on craint de défaire Macron !

 Dans toute la France la répression monte. Pendant qu’on trouve encore sur les réseaux sociaux des « militants de gauche » partageant à la chaîne tout fait censé attester du caractère « poujadiste », « raciste », etc., que doit à tout prix être pour eux le contenu de ce mouvement en tant que tel et dans son ensemble, la conscience de classe et le sens de leurs intérêts immédiat ont dicté aux deux organisations patronales représentatives de ce petit patronat dont on veut nous faire croire qu’il serait aux commandes, l’U2P (Union des Entreprises de Proximité) et CPME (Confédération des Petites et Moyennes Entreprises, l’ex-CGPME), un appel pressant à « l’apaisement » :  » … le pire serait d’organiser un blocage de l’économie et d’aggraver la situation générale. »

Pendant qu’on voudrait nous faire croire que « les patrons sont à la manœuvre« , les patrons ont peur ! … Et c’est à eux que M.M. Macron et Castaner obéissent en accentuant la répression.

Le but : fatiguer, disloquer, miser sur les accidents, d’ici samedi, pendant que les directions confédérales feraient garder l’arme au pied aux militants.

Quel en serait le résultat ?

Comme l’a dit un commentateur sur France Info, « le gouvernement craint que s’il recule sur les carburants, il devra reculer sur les retraites et sur les statut des fonctionnaires« .

Non seulement on ne peut pas combattre l’extrême-droite si l’on craint de renverser Macron, mais on ne peut pas gagner sur les revendications ni stopper la casse antisociale !

L’indépendance syndicale, c’est ne pas avoir peur de renverser Macron !

Les forces sont là.

VP, 20-11-2018 au soir.