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Italie: comment l’hégémonie néolibérale se renouvelle par une révolution apparente

Italie

Lien publiée le 28 novembre 2018

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

http://www.contretemps.eu/italie-hegemonie-neoliberalisme-salvini-lega-m5s/

Les politiques du gouvernement Ligue/5étoiles, présenté comme le protagoniste d’une rupture dans la dynamique européenne, prolongent celles du Parti démocrate. L’expérience italienne montre que la structuration du champ politique sur la base du clivage Europe/nation, qui remplace l’opposition droite/gauche, permet au néolibéralisme de survivre à la crise du bloc bourgeois.

Nous reprenons ici un article de l’économiste Stefano Palombarini, , paru initialement sur son blog. Il est notamment le co-auteur avec Bruno Amable de L’Illusion du bloc bourgeois, dont nous avions publié la conclusion ici.

***

Le néolibéralisme, une expression de la souveraineté nationale

L’action du gouvernement italien est au centre de l’attention pour plusieurs raisons. D’abord, évidemment, à cause de sa « désobéissance » aux indications de la Commission européenne. Les déterminants du conflit entre les institutions européennes et la coalition qui s’est formée en Italie à la suite des élections du printemps dernier méritent réflexion. Mais remarquons tout de suite que l’affrontement a une valeur symbolique  d’autant plus forte qu’elle est parfaitement fonctionnelle au récit d’une souveraineté nationale étouffée par les traités communautaires : au-delà de sa connotation politique, l’alliance entre mouvement 5étoiles (M5S) et Ligue suscite la sympathie de ceux qui conçoivent l’Union européenne comme un carcan anti-démocratique qui empêcherait la traduction en actes de la volonté populaire. Ce récit est faux, au moins pour ce qui concerne un pays comme l’Italie.

On cite à tort le précédent de la Grèce, victime d’un véritable chantage qui s’appuyait sur la nécessité pour ce pays d’obtenir les crédits du FMI et de la BCE. L’Italie se finance sur les marchés, elle dispose toujours d’une forte épargne intérieure et ne court pas le risque d’un défaut de paiements. Que risque-t-elle en désobéissant à la Commission ? Tout au plus, l’ouverture d’une procédure de déficit excessif qui, au pire des cas, pourrait se conclure par une amende certes considérable mais qui ne pourrait pas dépasser 0,5% du PIB. Puisque le gouvernement italien prévoit un déficit de 2,4%, régler l’amende serait possible sans augmenter la pression fiscale, tout en restant en deçà du seuil de 3%… Dans un scénario de désobéissance cohérente au « diktats » de la Commission, le gouvernement pourrait aussi refuser de payer ; et dans ce cas, ce serait aux institutions européennes de réagir en prenant le risque de mettre en danger la construction de l’Union, donc leur propre existence.

La seule véritable arme à disposition de l’UE pour contrarier les plans du gouvernement italien, c’est une forme de persuasion à l’envers exercée vis-à-vis des marchés financiers : si la conviction se diffusait que l’Italie a une chance réelle de quitter l’euro, y compris contrainte et forcée, les taux d’intérêt sur la dette remonteraient rapidement, en posant un véritable problème budgétaire. Mais les recommandations de la Commission ne sont que l’un des paramètres, et probablement pas le plus important, que les marchés prennent en compte pour évaluer ce risque. On peut rappeler à titre d’exemple que le Portugal, un pays dont le pouvoir de négociation au sein de l’UE est bien inférieur à celui d’Italie, est sorti d’une procédure de déficit excessif par une politique relativement expansive et différente de celle que lui indiquait la Commission, qui – malgré une menace d’amende – n’a pas été en mesure de lui imposer grande chose. De même, si le gouvernement italien décide de passer un compromis avec l’UE, ce ne sera pas en y étant obligé, mais par choix délibéré.

La dictature de Bruxelles, une construction idéologique au service du bloc bourgeois

La vision déformée de politiques nationales qui ne feraient que traduire les injonctions de Bruxelles est ancienne et répandue : elle concerne notamment les « nécessaires réformes » du marché du travail ou de la protection sociale qui ont caractérisé la dynamique italienne mais aussi française. Des réformes qui allaient bien évidemment dans la direction souhaitée et soutenue par les institutions européennes, mais sans que celles-ci n’aient le moyen de contraindre les gouvernements à les adopter : n’en déplaise aux souverainistes italiens, français ou d’ailleurs, ces mesures ont été autant d’expressions de la souveraineté nationale. Même la négation du résultat du référendum constitutionnel de 2005, qu’on peut à raison considérer comme une violence faite à une volonté populaire clairement exprimée, a été un choix délibéré du président Sarkozy et rien d’autre. Des choix différents auraient été possibles, si le pouvoir français de l’époque avait répondu à d’autres intérêts sociaux et décidé de suivre une autre stratégie.

La rhétorique qui voudrait que la politique économique et sociale soit imposée à des pays comme la France ou l’Italie par les institutions européennes, a été d’abord celle des partis se présentant comme européistes. Des éléments de langage de ce type étaient déjà présents dans les discours d’Alain Juppé ou de Romano Prodi il y a plus de vingt ans, et ont été sans cesse mobilisés depuis jusqu’à la présidence Hollande et au gouvernement Renzi. En réalité, il s’agissait d’acteurs nationaux qui poursuivaient souverainement un projet politique consistant à se dégager du clivage droite/gauche, producteur d’alliances sociales traversées par d’importantes contradictions et jugées comme fragiles : un projet qui a trouvé son expression accomplie en Italie en 2011 avec la formation du gouvernement Monti, et quelques années après, avec l’élection de Macron en France.

Dans le cadre de ce projet, les règles européennes (que les gouvernements en question ont d’ailleurs contribué à fixer) ont fonctionné à la fois comme point d’appui et comme source de légitimation, mais jamais comme une contrainte indépassable qui aurait obligé les pouvoirs nationaux à faire autre chose de ce qu’ils avaient choisi. Il est ainsi fondamental de prendre la mesure du caractère trompeur du récit souverainiste : le problème n’est pas, et n’a jamais été, de redonner la liberté à des peuples opprimés par la dictature des traités, mais de construire des alliances sociales cohérentes et majoritaires en mesure de soutenir une politique – en principe tout à fait possible et envisageable – de remise en cause radicale des traités. Ce sont les mécanismes de formation du soutien au niveau national qui, en passant par la fracture du bloc de gauche, sont à l’origine des politiques néolibérales ; et ça sera par la (éventuelle) constitution d’une alliance sociale différente et alternative au bloc bourgeois qu’on pourra en sortir.

Le clivage Europe/nation, un obstacle à la formation d’une alliance sociale de gauche

De ce point de vue, il est essentiel de souligner que l’émergence du bloc bourgeois a impulsé une restructuration profonde du champ politique. Un mouvement, heureusement inachevé en France et désormais complètement abouti en Italie, qui voit aujourd’hui la grille de lecture des partis européistes devenir progressivement hégémonique chez leurs adversaires. Ainsi, c’est autour du souverainisme – et non pas de l’opposition au néolibéralisme – que Ligue et M5S ont pu agréger le soutien des groupes sacrifiés par l’action des gouvernements Monti, Letta, Renzi et Gentiloni.

En France, la situation est plus nuancée pour l’essentiel en raison du poids politique de la France insoumise, un mouvement qui échappe au clivage Europe/nation ; mais le deuxième tour de la dernière présidentielle montre qu’une perspective à l’italienne, si elle doit être à tout prix évitée, n’est guère à exclure. La réduction de l’affrontement politique à ce clivage est en tout cas l’objectif partagé par Macron et Le Pen. Ainsi, la tentative du Président de se désigner en héros du progressisme opposé au nationalisme1 et l’ambition de Le Pen de se présenter comme le rempart d’une démocratie menacée par la construction européenne2, se renforcent mutuellement car elles relèvent de la même logique : celle d’un champ politique qui n’aurait plus dans la droite et la gauche, mais dans  l’Europe et la nation ses polarités structurantes.

Au-delà de la rébellion aux injonctions de la Commission, l’expérience italienne doit ainsi être étudiée attentivement car elle donne une image assez précise des conséquences d’un conflit politique organisé autour de l’opposition entre européistes et souverainistes. Le bloc bourgeois a un profil social et des fragilités désormais bien connus. En agrégeant les classes moyennes et supérieures, cette alliance est relativement cohérente dans le soutien à la construction européenne et aux réformes néolibérales. Son problème n’est pas simplement d’être socialement minoritaire, mais de produire par les politiques qu’elle impulse la précarisation et le déclassement d’une partie croissante de la population. La stratégie de médiation qui permet l’existence du bloc bourgeois est ainsi destinée à en éroder progressivement la base électorale et donc à en engendrer la crise.

Cette analyse, fondée sur sept années de gouvernement par le bloc bourgeois en Italie mais aussi sur la trajectoire de Macron en France, est désormais bien solide. De leur côté, les premiers mois du gouvernement M5S/Ligue en Italie permettent d’esquisser les réponses à des questions qui portent sur l’autre pôle du nouveau clivage, à savoir sur une coalition opposée au bloc bourgeois qui se construirait autour de la défense d’une souveraineté nationale qu’on présente comme menacée par la construction européenne. Quelle est le profil de cette nouvelle alliance ? Quelles classes y participent, et de quelles attentes sont-elles porteuses ? Quelle est la stratégie de médiation choisie par les acteurs politiques qui essaient de consolider ce nouveau bloc ?

Le compromis souverainiste en Italie : un néolibéralisme autoritaire et compatissant

L’analyse de la base électorale du M5S, fortement enracinée dans l’électorat de l’ancien bloc de gauche, et de celle de la Ligue, pour la quasi-totalité héritée de l’ancien bloc de droite et en particulier de Forza Italia, le parti de Berlusconi, conduit à identifier deux grandes catégories sociales au cœur de la nouvelle alliance3.

D’une part, les groupes directement sacrifiés par les réformes néolibérales et la politique austéritaire du bloc bourgeois. Plutôt concentrée dans le sud du pays, cette fraction de la base du nouveau pouvoir est directement touchée par la paupérisation : il s’agit de chômeurs, mais aussi de travailleurs précaires et à bas salaires, et aussi d’une partie des ouvriers de ce qui reste de la grande industrie, autant de groupes qui partagent la nécessité d’un soutien direct et rapide de leur pouvoir d’achat.

D’autre part, des classes moyennes menacées de déclassement, mais qui continuent de croire aux vertus du néolibéralisme, dont elles pensent qu’elles ne se manifestent pas à cause d’un ennemi extérieur4 qui peut prendre les formes les plus disparates ; ces classes ont principalement besoin d’être rassurées à la fois sur leur avenir et sur le bien-fondé de leurs convictions idéologiques, ce qui explique l’émergence sur la scène politique italienne d’un homme fort comme Salvini, en mesure à la fois de se présenter comme un rempart contre l’invasion migratoire, la dictature bruxelloise, la finance cosmopolite ou autre ennemi fantasmé, et de réconforter la croyance dans un libre marché source de promotion sociale.

On imagine aisément la difficulté d’identifier un espace de médiation entre des attentes aussi disparates : l’entente entre M5S et Ligue, qui n’avaient pas vocation à gouverner ensemble, est fragile et soumise à des compromis sans cesse renouvelés. Il est ainsi bien trop tôt pour affirmer qu’on serait en présence d’un nouveau bloc social, c’est-à-dire d’une alliance de fait entre groupes socio-économiques dont les intérêts seraient protégés par l’action publique, et non pas simplement d’une sommatoire hétérogène de mécontentements.

Cependant, les premiers actes du gouvernement, et en particulier le budget présenté en octobre, permettent de connoter la stratégie du nouveau pouvoir comme la tentative d’élaborer un compromis social qui porte la marque d’un néolibéralisme autoritaire et compassionnel. Autoritaire, bien évidemment, dans sa composante de la Ligue, et notamment contre des migrants privés de toute défense. Mais aussi dans la gestion du pouvoir par le M5S, qui menace d’expulsion les élus qui voteraient différemment de ce que leur dictent les dirigeants du parti, y compris quand la dissidence est motivée par le respect des engagements électoraux5.

Compassionnel, ou du moins se présentant comme tel, en raison des ressources destinées à soutenir les classes les plus faibles. Sur ce point, il faut préciser que le montant prévu des transferts en direction des plus démunis demeure bien modique (7 milliards d’euros sur une année, divisés par 5 millions de pauvres6, c’est à peine plus de 100 euros par mois et par personne) ; et que la forme prise par le transfert, le revenu de citoyenneté, a été – de l’aveu même de Di Maio7 – calquée sur la loi Hartz IV allemande. L’obligation d’accepter l’une des trois premières offres d’emploi, dans le cadre d’un Jobs Act (équivalent italien de la Loi travail) pas remis en cause, retirera définitivement tout pouvoir de négociation au travail en faveur du capital, et aura donc assez rapidement un effet dépressif sur des salaires déjà fortement comprimés par l’action du bloc bourgeois.

Le caractère néolibéral et compassionnel de la stratégie du nouveau pouvoir se manifeste aussi en matière de retraites : contrairement aux promesses de campagne, la réforme Fornero (qui oblige à cotiser 38 années jusqu’à 67 ans d’âge pour bénéficier d’une retraite à taux plein) n’est pas abrogée. Simplement, on laissera à ceux qui auraient cotisé les 38 années prévues la possibilité de prendre une retraite anticipée à partir de 62 ans, mais avec une décote proportionnelle aux années d’avance et pouvant atteindre 34% du chèque8.  Avec le résultat paradoxal de permettre un départ anticipé aux travailleurs qui perçoivent des salaires corrects, alors que ceux qui sont engagés dans des métiers pénibles et en règle général mal rémunérés, ou qui ont connu des périodes de chômage, pour avoir le droit à une retraite qui leur permette de vivre, seront bien et bel obligés de rester à la tâche jusqu’à 67 ans.

Le financement du revenu citoyen et des mesures sur les retraites répond aussi à la logique néolibérale la plus stricte : alors que la fiscalité sur les entreprises sera baissée, le gouvernement prévoit une coupe aux dépenses sociales pour un montant de 7 milliards, à laquelle s’ajoutent des privatisations directement destinées à la réduction de la dette et dont le montant, si l’on veut bien croire la lettre envoyée par le gouvernement italien à la Commission européenne le 13 novembre, devrait atteindre le niveau faramineux de 18 milliards d’euros sur la seule année 2019.

Derrière une rupture de façade, la continuité des politiques néolibérales

Résumons-nous. Les très européistes gouvernements italiens du bloc bourgeois avaient ramené le déficit public à un niveau oscillant entre 2% et 3% du PIB ; le nouveau pouvoir, qui s’oppose frontalement à ces gouvernements et qui se veut en révolte contre la dictature UE, a prévu 2.4%. Ils avaient introduit le Jobs Act et une réforme draconienne des retraites ; le nouveau pouvoir ne remet nullement en cause le premier et amende seulement à la marge la seconde. Ils avaient coupé les dépenses sociales et beaucoup privatisé ; le gouvernement M5S/Ligue s’engage à continuer sur la même voie. Et pour être tout à fait complets, c’est le ministre de l’intérieur du Parti démocrate, Minniti, qui avait érigé les barrières contre l’arrivée des migrants, avec le financement direct de camps de rétention (et de torture) en Libye ; Salvini prolonge la même politique criminelle. Vous avez dit changement ?

Et pourtant un discours unanime, en provenance des médias qui soutiennent le nouveau pouvoir comme de ceux qui sont proches de l’ancien, valide l’image d’une rupture de continuité dans la politique italienne : le gouvernement serait le protagoniste d’une rébellion contre Bruxelles qui n’aurait pas de précédent dans un grand pays européen. Dans les faits, une telle rupture est inexistante. D’abord car l’austérité va se prolonger en Italie ; il est vrai que le déficit annoncé est supérieur à celui qui avait été prévu précédemment, mais il correspond toujours à un excédent primaire. Mais surtout car l’échange entre une toute relative flexibilité budgétaire et la poursuite des nécessaires réformes est désormais un grand classique dans la dynamique européenne.

L’Italie, comme d’ailleurs la France, en a déjà été protagoniste par le passé, ce qui permet de souligner un point décisif : l’objectif politique de la Commission n’a jamais été l’austérité, mais la réforme néolibérale. L’austérité qui découle des traités n’est qu’un moyen de faire pression sur des pays qui s’écarteraient d’un projet visant à effacer les spécificités des capitalismes continentaux. La seule vraie nouveauté, du moins pour l’instant, est l’opposition frontale de la Commission à un gouvernement qui annonce sa complète disponibilité à respecter l’agenda bruxellois sur l’organisation de la relation salariale, de la protection sociale, des services publics.

L’objectif politique de la Commission : légitimer une révolution apparente

S’il y a une question qui mérite réflexion, elle est donc la suivante : pourquoi la Commission attise un conflit contre un pouvoir qui ne constitue nullement une menace par rapport aux intérêts fondamentaux qu’elle protège ? Une première réponse consisterait à voir dans les commissaires des bureaucrates qui appliqueraient les traités à la lettre et sans trop réfléchir. Mais c’est une réponse qui n’est guère satisfaisante : les commissaires, et notamment celui en charge des affaires économiques et financières, Pierre Moscovici, sont des responsables politiques de long cours, et la vigueur avec laquelle ils demandent le respect des traités budgétaires est à géométrie (très) variable en fonction des pays et des conjonctures.

La décision d’ouvrir un conflit avec l’Italie n’a rien d’un automatisme : c’est un choix politique, dont il faut se demander à quel objectif il répond. Bien évidemment, le conflit pourrait se composer prochainement par un compromis, mais il a d’ores et déjà produit des effets concrets : la Commission a contribué à légitimer l’alliance Ligue/M5S, dans laquelle l’extrême droite joue un rôle fondamental, comme l’adversaire principal en Italie de l’européisme néolibéral.

L’affrontement entre Bruxelles et le gouvernement italien participe ainsi au mouvement de restructuration générale du champ politique que j’ai évoqué plus haut : les deux protagonistes de ce (pseudo)combat partagent la même ambition de transformation néolibérale du capitalisme et visent exactement les mêmes « réformes » des institutions sociales, mais ils ont tout intérêt à s’afficher comme étant porteurs d’options politiques alternatives et à se désigner réciproquement comme les seuls véritables protagonistes du conflit politique.

Ce débat caricatural a un effet immédiatement perceptible : il oblige une gauche déjà fracturée à se diviser entre la dénonciation de l’irresponsabilité des gouvernants, s’alignant ainsi sur les positions du très macronien Parti démocrate, et l’appui à la rébellion contre l’agenda bruxellois, avec le soutien paradoxal à un pouvoir totalement aligné aux positions du néolibéralisme autoritaire9. L’enseignement fondamental qu’il faut tirer des événements italiens réside ainsi dans le caractère trompeur de l’opposition entre l’européisme du bloc bourgeois et la coalition souverainiste de tous ses ennemis : dans l’impossibilité de consolider sa base sociale, c’est par la production de révolutions apparentes que le néolibéralisme parvient à prolonger son hégémonie.

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références

1. Lire A. Cargoet : « ‘Progressistes’ contre ‘nationalistes’ : Macron et Salvini, meilleurs ennemis ? », Le Vent Se Lève, 2 septembre 2018.
2. Interview à RMC, 27 septembre 2018.
3. Voir mon article : « En Italie, une fronde anti-européenne ? », Le Monde diplomatique, novembre 2018.
4. Lire dans ce blog : « La percée de la Ligue et l’ennemi extérieur », note du 26 juillet 2018.
5. C’est le cas par exemple des sénateurs M5S qui tout récemment ont voté contre l’amnistie immobilière pour Ischia voulue par le gouvernement.
6. Cinq millions, c’est selon l’ISTAT le nombre de personnes vivant en Italie en condition de pauvreté absolue.
7. Lire « Il reddito di cittadinanza come Hartz IV », nextquotidiano.it, 9 octobre 2018
8. G. Cremaschi : « Salvini non conosce né capisce la legge Fornero. “Quota 100” sarà una fregatura », contropiano.org, 13 novembre 2018
9. Une lecture même rapide du « décret sécurité », approuvé début octobre, suffit à se rendre compte du degré d’autoritarisme réactionnaire du nouveau pouvoir.