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Nathalie Saint-Cricq en mission politique

Lien publiée le 28 janvier 2019

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

https://www.acrimed.org/Nathalie-Saint-Cricq-en-mission-politique

Ce jeudi 24 janvier, Léa Salamé et Thomas Sotto animaient « L’émission politique » sur France 2. Pendant près de trois heures de direct, ce sont plus d’une vingtaine de personnes (« des membres du gouvernement, des représentants politiques, des syndicalistes, des responsables d’associations, des chefs d’entreprise, des élus locaux, des intellectuels et des représentants des "gilets jaunes" ») qui sont invitées à débattre « autour de deux thèmes : comment mieux répartir aujourd’hui les richesses ? comment recréer le lien distendu entre le politique et le citoyen ? »

Une émission intitulée « Quand la France se parle », qui laisse la conclusion (voir ci-dessous, in extenso) à Nathalie Saint-Cricq. « La France se parle », mais c’est l’éditorialiste qui a le dernier mot !

J’ai mis mon chronomètre. Je veux simplement dire : on a cru comprendre ce soir que tout le monde, le grand débat national... tout le monde avait envie que ça marche. On voudrait être sûr que ça soit bien vrai, et qu’il y en ait pas un certain nombre qui mettent de l’huile sur le feu comme on l’a vu dans les... les dernières semaines, et je pense notamment un peu à Jean-Luc Mélenchon ou à monsieur Ruffin.

Deuxièmement on a compris également que la symbolique était tout dans la politique, en entendant parler de l’APL et de... des APL et de l’ISF, et en comprenant en gros que si on ne bougeait pas de ce côté-là ça serait un péché originel qui ne s’arrangerait jamais.

Dernière chose, sur les gilets jaunes, par pitié essayez, non pas de faire le ménage dans vos rangs mais de... d’être sûrs que vous n’êtes pas... qu’il y ait pas un certain nombre de personnes qui sont dans vos rangs dont vous ne souhaiteriez pas qu’ils soient là [Coupée par Evelyne Liberal (gilet jaune) : « Ils sont là depuis le mois de novembre madame »] Oui mais d’accord, tout à l’heure on en a parlé avec Romain Goupil [Coupée : « On les a vus arriver ils sont toujours là hein »] eh ben d’accord mais faut peut-être faire quelque chose !

Enfin, finalement, euh... j’ai entendu le mot « politicien » et tout... alors il y a peut-être des hommes politiques absolument épouvantables, il y a aussi beaucoup de maires, de députés qui sont des gens qui sont... qui essayent de faire leur boulot ! « Politicien » vous l’avez dit tout à l’heure, pour vous ça veut peut-être dire qu’il y a des horreurs, mais globalement, alors c’est pas par corporatisme ou parce qu’on les fréquente... y a quand même des gens qui ont envie de faire le bien, et si ça marche pas ben c’est pas forcément leur faute. Mais on peut les soupçonner d’être un petit peu neuneus parfois, mais pas forcément de vouloir faire le mal !

Ou comment le dispositif de « L’émission politique » permet à Nathalie Saint-Cricq, en deux minutes chrono, de donner un énième exemple de la prétention des éditorialistes à s’arroger le droit de (re)cadrer le débat public et d’y adjoindre une interprétation qui se voudrait « au-dessus de la mêlée ». Alors même que cette première de cordée médiatique adresse là de véritables rappels à l’ordre : injonction à jouer le jeu du « grand débat national » (« On voudrait être sûr que ça soit bien vrai, et qu’il y en ait pas un certain nombre qui mettent de l’huile sur le feu »), injonction à faire le tri des manifestants (« sur les gilets jaunes, par pitié essayez […] qu’il y ait pas un certain nombre de personnes qui sont dans vos rangs dont vous ne souhaiteriez pas qu’ils soient là »), injonction à faire preuve de bienveillance à l’égard des politiques (« on peut les soupçonner d’être un petit peu neuneus parfois, mais pas forcément de vouloir faire le mal ! »).

Ainsi, en lui demandant d’en fixer la conclusion, « L’émission politique » charge Nathalie Saint-Cricq d’une mission (politique) : celle de décréter ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas, et de disqualifier celles et ceux (politiques ou manifestants) qui auraient l’outrecuidance de ne pas vouloir se soumettre : ni au jeu institutionnel, ni à l’ordre social établi.


Maxime Friot