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Travailleurs sans papiers. Plus de quatre mois de lutte à Alfortville
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
Mobilisés depuis le 11 juin, les grévistes manifestent ce jeudi à Créteil pour obtenir leur régularisation. Les autorités font toujours la sourde oreille.
Les saisons passent, le campement reste. Depuis le 11 juin dernier, 160 travailleurs sans papiers ont planté leurs tentes devant l’entrepôt Chronopost à Alfortville (Val-de-Marne). Plus de quatre mois de combat afin d’exiger des attestations de concordance et des Cerfa pour une trentaine d’entre eux, intérimaires dans l’entreprise de colis express. Le camping est désormais recouvert de bâches bleutées pour protéger de la pluie et du froid naissant. À quelques centimètres de son habitat de fortune, Amadou Fofana croit dur comme fer à la victoire : « On a déjà perdu notre emploi chez Chronopost, donc on ne partira pas sans rien ! explique-t-il. Je travaillais de nuit payé comme de jour, avec les heures supplémentaires gratuites, c’était de l’esclavage. » Alors que le haut-parleur crache une chanson de Johnny Hallyday, certains émergent péniblement d’une énième nuit de sommeil haché. Pendant ce temps, Chronopost (filiale à 100 % de La Poste), le donneur d’ordres, la société Derichebourg, le sous-traitant, et Mission intérim, l’agence de travail temporaire basée à Corbeil-Essonnes qui les recrutait, persistent à se renvoyer la responsabilité.
« On n’a pas revu la direction de Chronopost depuis le mois de juin, on a été accueilli par la police chez Derichebourg et chez Mission intérim quand on est venu discuter avec eux… », souligne Jean-Louis Marziani, secrétaire adjoint de Solidaires Val-de-Marne. Les grévistes ont rencontré deux fois la préfecture du Val-de-Marne les 11 et 27 septembre derniers. Un discours de bienveillance aurait été tenu, mais la situation n’a pas bougé d’un iota depuis. « Nous voulons la régularisation de 27 personnes de Chronopost et pas du cas par cas. La dernière fois, le préfet nous a fait comprendre qu’on n’obtiendrait pas tous des papiers, on ne sait pas pourquoi, s’interroge Amadou Fofana. Une partie d’entre nous ne répond pas aux critères de la circulaire Valls (une des conditions est d’avoir passé trois ans France – NDLR), la préfecture le sait, ils ont le pouvoir d’aller au-delà ! On est face à l’État désormais. »
Un autre point semble poser problème, celui du guichet unique pour enregistrer les demandes. La préfecture du Val-de-Marne accepte que celles-ci soient déposées mais ne veut traiter que les dossiers des habitants du département… « Si on transfère une demande de régularisation seule à Paris, elle ne sera pas examinée de la même manière, expose Jean-Louis Marziani. La préfecture doit prendre ses responsabilités politiques. » Mais la demande d’éclaircissements des grévistes sur ces points est restée lettre morte.
Une manifestation, aujourd’hui, à Créteil
Sur place, l’automne commence à glacer les os. Mais les travailleurs de Chronopost ont expérimenté la solidarité et pris goût à la lutte. Comme le raconte Amadou Fofana : « On a voulu faire quelque chose pour la centaine de camarades sans papiers d’autres entreprises qui campent avec nous. On a envoyé des courriers à leurs employeurs en leur demandant de les régulariser. Pour d’autres, on a manifesté devant le siège et ça a marché ! Ils ont obtenu des papiers. » Philippe Barre, militant de Solidaires 94, poursuit : « Ça marche mieux avec les entreprises privées. L’État essaie de les invisibiliser de deux manières. D’un côté, La Poste, dont il est l’actionnaire majoritaire, nie sa responsabilité dans cette histoire et, de l’autre, la préfecture refuse pour l’instant de tous les régulariser. » Soutenue par le collectif des travailleurs sans papiers de Vitry-sur-Seine (CNTSPV), par SUD PTT, Solidaires, la CNT-SO, mais aussi la CGT d’Alfortville et du département ainsi que le SNU-FSU, une manifestation est prévue aujourd’hui à 15 h 30 de l’église de Créteil jusqu’à la préfecture, où ils espèrent être reçus.