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Un monde en révolte
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
Le mois d’octobre a été marqué par une impressionnante série d’explosions sociales : en Equateur, au Chili, à Haïti, en Catalogne, au Liban et en Irak. Ces mobilisations révolutionnaires – et souvent même insurrectionnelles – allongent la liste des pays secoués par des révoltes populaires massives. Au Soudan, en Algérie et à Hong Kong, des processus semblables, avec leurs flux et leurs reflux, sont en cours depuis des mois. Bien sûr, on doit aussi ranger dans cette catégorie le mouvement des Gilets jaunes – qui, en décembre 2018, a placé la France au seuil d’une crise révolutionnaire.
Si l’on n’avait affaire qu’à un ou deux pays, on pourrait dire qu’il s’agit d’un phénomène accidentel, lié à telle situation nationale particulière. On ne pourrait pas en tirer de conclusion générale. Mais lorsque le même processus se développe dans de nombreux pays, on doit en tirer la conclusion que les mêmes tendances et lois fondamentales sont à l’œuvre.
Ce phénomène international s’enracine, précisément, dans la crise organique du capitalisme mondial qui a éclaté en 2008. Depuis, cette crise ne cesse de produire ses effets dévastateurs sur le niveau de vie des masses. Outre les effets « naturels » de la crise, des politiques d’austérité drastiques sont menées, partout, au profit exclusif des parasites richissimes qui contrôlent les principaux leviers de l’économie (les banques et les multinationales).
Les jeunes et les travailleurs ne peuvent pas indéfiniment tolérer qu’on s’attaque à leurs conditions de vie et de travail. Pendant toute une période, qui peut durer de longues années, la colère et la frustration s’accumulent silencieusement dans les profondeurs de la société. Trotsky parlait du « processus moléculaire de la révolution ». En surface, tout semble à peu près calme. Il y a bien telle grève et telle manifestation, mais la plupart des « experts » de la bourgeoisie – et même de nombreux militants de gauche – n’en comprennent pas la signification symptomatique.
Puis un beau jour, pour une augmentation de 30 pesos du ticket de métro, pour une taxe sur WhatsApp ou pour toute autre mesure de cet ordre, plus ou moins sévère, c’est l’explosion. La quantité se transforme en qualité, sous la forme d’un soulèvement de masse, qui fait remonter à la surface toutes les souffrances et humiliations passées. Alors, le gouvernement peut bien retirer la mesure qui a servi de catalyseur, c’est trop peu, trop tard : le mouvement développe sa dynamique propre. Le génie populaire est sorti de la bouteille. Ses mots d’ordre s’élargissent et se radicalisent. Très vite, il ne réclame rien de moins que le renversement du régime et « le pouvoir au peuple ».
L’impasse du capitalisme
La bourgeoisie mondiale observe ces événements avec terreur. Ses analystes les plus lucides se demandent : « si les peuples se soulèvent maintenant, alors que nous sommes encore en phase de croissance, qu’en sera-t-il lorsque la prochaine récession mondiale éclatera, provoquant de nouveaux et terribles dégâts sociaux ? » La réponse est dans la question : une nouvelle récession mondiale accélèrera la polarisation de classe et la radicalisation politique des masses, dans tous les pays.
Ainsi, nous sommes entrés dans la période la plus turbulente de l’histoire. Ce n’est pas une formule rhétorique. Dans les années qui viennent, les travailleurs du monde entier se lanceront dans des luttes titanesques pour tenter d’arracher l’humanité aux souffrances inouïes que lui inflige le système capitaliste. Les classes dirigeantes, bien sûr, résisteront de toutes leurs forces. Ce faisant, elles jetteront le masque de la « démocratie » bourgeoise. Au Chili, l’armée a tiré à balles réelles sur les manifestants.
La polarisation politique et sociale sera énormément renforcée par la crise environnementale, qui menace de plonger l’humanité dans une barbarie générale – non dans plusieurs siècles, mais dans les prochaines décennies. S’imagine-t-on que la jeunesse va rester les bras croisés, le sourire aux lèvres, pendant que les capitalistes ruinent son avenir et saccagent la planète ? La jeune génération va entrer avec fracas sur la scène de l’histoire, faisant valoir ses droits à une existence digne, à la liberté et au bonheur. On la voit déjà massivement mobilisée en Algérie, au Chili, au Liban, en Irak, en Catalogne et ailleurs.
L’« intellectuel » Luc Ferry raille bêtement « les gamins qui se la jouent révolutionnaire en occupant un centre commercial. » En effet, « c’est le capitalisme qui sauvera la planète », nous dit-il. La preuve ? La multinationale « Philips commercialise des ampoules électroluminescentes (LED) » [1]. Et ainsi de suite. Vraiment, quand on lit les niaiseries de Ferry, Zemmour et Finkielkraut, pour ne citer que ces trois « esprits », on prend la mesure de la déchéance intellectuelle de la bourgeoisie française – elle qui avait pris son élan vers le pouvoir, au XVIIIe siècle, en s’inspirant des idées de Rousseau, Voltaire et Diderot. Cette déchéance, bien sûr, n’est pas le fruit du hasard : elle reflète l’impasse du capitalisme et le rôle totalement réactionnaire que joue la bourgeoisie, désormais. Celle-ci est un obstacle absolu sur la voie du progrès. Dès lors, ses « penseurs » n’ayant plus rien de positif à penser, ils cuisent dans un jus de sottises et de mensonges. C’est vrai en France comme ailleurs.
Le 5 décembre
Pendant que la planète brûle et que des révolutions éclatent aux quatre coins du monde, de quoi nous parlent les grands médias français, jour et nuit, depuis des semaines ? De voiles et de foulards. Une fois de plus, les jeunes et les travailleurs musulmans de notre pays sont désignés à la vindicte populaire. Cette opération de diversion flagrante, menée sous couvert de laïcité, revient périodiquement, c’est-à-dire chaque fois qu’un gouvernement bourgeois redoute une explosion de la lutte des classes. Lénine, en 1905, le soulignait déjà : « La bourgeoisie réactionnaire a partout eu soin d’attiser les haines religieuses (…) pour attirer de ce côté l’attention des masses et les détourner des problèmes économiques et politiques réellement fondamentaux ».
Cependant, cette manœuvre sera dérisoire face au flot montant de la colère et des luttes sociales. Dans de nombreux hôpitaux, la grève des urgentistes a entraîné dans l’action d’autres catégories de personnels. Les pompiers sont mobilisés depuis des mois. Les enseignants ne supportent plus les mensonges et l’arrogance de leur ministre. L’ensemble de la Fonction publique est en ébullition. De nombreuses grèves éclatent dans le secteur privé. Enfin, les travailleurs de la SNCF et de la RATP ont fait clairement comprendre au gouvernement qu’ils sont prêts à une lutte acharnée contre la casse des retraites. Les débrayages spontanés des cheminots, en octobre, sont un signal sans équivoque : de grandes luttes se préparent.
Le 5 décembre avance à l’horizon comme un immense nuage lourd de menaces pour Macron et sa clique. Ce qu’ils redoutent le plus, c’est que le début d’une solide grève reconductible des cheminots et de la RATP entraîne la mobilisation d’autres secteurs. Voilà précisément ce qui doit être préparé de façon systématique, sur le terrain, par les structures et militants syndicaux de tous les secteurs.
Soyons clairs : si les cheminots et les agents de la RATP restent seuls le 5 décembre et les jours suivants, si la grève ne mobilise pas d’autres secteurs, le gouvernement aura deux options en main : soit jouer le pourrissement en tablant sur l’épuisement des grévistes, soit faire des concessions aux seuls cheminots et agents de la RATP, comme Macron en a déjà suggéré la possibilité. Dans les deux cas, la masse de la population serait perdante. Pour l’éviter, il faut qu’un maximum de secteurs vienne renforcer les grèves du 5 décembre et des jours suivants. Les bases syndicales doivent exiger de leurs directions fédérales et confédérales qu’elles poussent dans ce sens, de tout leur poids.
Seul le développement d’une grève reconductible dans un nombre croissant de secteurs nous permettra de faire reculer le gouvernement. Mieux : cela ouvrira la possibilité de renverser ce gouvernement. Nous n’y sommes pas encore ? Certes. Mais comme on le voit chaque jour dans ce monde en révolte, tout peut très vite arriver. Et en France, c’est le moment !
[1] Le Figaro du 31 octobre.




