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Johnson et Corbyn s’annulent en face-à-face
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
https://www.liberation.fr/planete/2019/11/20/johnson-et-corbyn-s-annulent-en-face-a-face_1764447
Premier ministre britannique après les élections du 12 décembre se sont affrontés mardi dans un débat sans relief et sans vainqueur.
Ce sont les rires qui ont marqué ce premier débat de la campagne électorale entre Boris Johnson et Jeremy Corbyn. Les rires et pas les mots. Pas des réactions à un trait d’humour particulièrement fin mais les rires moqueurs et sarcastiques d’un public blasé, presque méprisant face à la vacuité des propos émis par les deux hommes politiques.
Ce duel télévisé d’une petite heure entre les deux seuls prétendants possibles au poste de Premier ministre britannique après le scrutin du 12 décembre n’a pas bouleversé les lignes de bataille. Il n’aura probablement pas ou peu d’impact sur les intentions de vote. Mais il a confirmé un peu plus les divisions de l’opinion publique et peut-être aussi sa désaffection.
Un sondage publié par YouGov quelques instants après la fin du débat sur la chaîne commerciale ITV donnait vainqueur le chef du parti conservateur Boris Johnson par une minuscule marge de 51% contre 49% au dirigeant du parti travailliste Jeremy Corbyn. L’institut de sondage précisait que le résultat était si proche qu’il se plaçait «largement dans la marge d’erreur possible». Le chef du Labour, en costume sombre et cravate rouge, des lunettes cerclées de noir perchées et penchées, vers la gauche, sur le nez, est sans doute rentré chez lui satisfait. Arriver à égalité avec le Premier ministre, alors que son parti est à la traîne dans les sondages (entre 12 et 17 points derrière le parti conservateur) constitue en soi un succès.
Curieusement, le même sondage a jugé Jeremy Corbyn plus convaincant (67%) que Boris Johnson (59%), plus digne de confiance (45% contre 40%) et plus en prise avec les gens ordinaires (59% contre 25%).
Peut-être est-ce parce qu’il a tenté de diversifier sa promesse électorale, parlant des inégalités, de la nécessité d’écouter chacun et de rassembler. Il a aussi insisté lourdement sur le National Health Service (NHS) et son intention d’investir lourdement dans ses services. Jeremy Corbyn a accusé Boris Johnson de vouloir brader le service de santé national, une institution outre-Manche, en le privatisant au plus-offrant et notamment aux firmes pharmaceutiques américaines à l’affût d’une bonne affaire dès le Brexit entériné. Il a aussi joué un peu plus la touche personnelle, en citant l’exemple d’une de ses amies, décédées la veille d’un cancer du sein après avoir attendu plus de huit heures aux urgences d’un hôpital sans être examinée par faute de personnel suffisant.
Boris Johnson était entré sur le ring avec une seule et même ligne en bouche : «get Brexit done !» (concrétisez le Brexit), qu’il a répétée ad-nauseam. En l’agrémentant d’accusations répétées contre, selon lui, l’absence de position claire sur le Brexit de Jeremy Corbyn. Ce dernier a détaillé ce que lui considère être une position parfaitement limpide. Si le Labour gagne les élections, il se fait fort de négocier en trois mois un nouvel accord de Brexit avec l’UE, avant de le faire entériner par le public britannique par un référendum organisé dans les six mois suivants. L’alternative à ce nouvel accord proposé serait le maintien au sein de l’Union européenne. Mais la solution qu’il favorise personnellement est restée mystérieuse.
Alors que le débat tournait en rond, une question a, un court instant, désarçonné Boris Johnson. «L’intégrité personnelle d’un candidat est-elle importante ?», a lancé la journaliste. Il a marqué une pause, presqu’interloqué, avant de bafouiller un maladroit «absolument», sous les ricanements du public. Depuis dimanche, l’Américaine Jennifer Arcuri s’est répandue dans tous les médias britanniques pour exposer leur très proche relation de quatre ans, qu’un documentaire d’ITV a simplement qualifié de «liaison», alors que Boris Johnson était maire de Londres et marié. La jeune femme et sa compagnie technologique ont reçu à l’époque des fonds publics (en 2014 et 2015) et une enquête est en cours sur de possibles conflits d’intérêts.
Une autre question a, un instant, animé le débat. «La monarchie est-elle adéquate ?». Jeremy Corbyn, qui n’a jamais caché ses penchants républicains, a esquissé un sourire avant de répondre «nécessite quelques améliorations». Boris Johnson, l’air pincé, a lancé un tonitruant «je pense que l’institution de la monarchie est irréprochable». Mais la question suivante concernait le prince Andrew, troisième enfant de la reine et mis en cause dans l’affaire de Jeffrey Epstein et son trafic sexuel de mineures. «Est-il adéquat ?», a demandé la journaliste. Jeremy Corbyn a alors habilement répliqué «qu’avant de parler du prince Andrew, il faut parler des malheureuses victimes de Jeffrey Epstein». Ce que n’a pas fait le prince lors de son interview-catastrophe samedi sur la BBC. Coincé, Boris Johnson n’a pu que renchérir maladroitement.
L’heure s’est terminée sur une rafale de questions anecdotiques comme le choix d’un cadeau de Noël à offrir à chacun. Jeremy Corbyn a proposé un exemplaire du célèbre «Conte de Noël» de Charles Dickens, le maître-peintre des miséreux de l’époque victorienne. Boris Johnson, toujours plus jovial, a suggéré une copie de son «formidable accord sur le Brexit». Puis, à la dernière seconde, peut-être inquiet que son présent soit jugé mesquin, il a promis de l’accompagner de quelques pots de confiture de prunes anglaises Damson.