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Mali: scènes de pillage et colère contre "les Arabes" à Tombouctou
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
L'heure des comptes semble avoir sonné à Tombouctou: des centaines d'habitants de la mythique cité du nord du Mali ont pillé mardi des magasins appartenant selon eux à "des Arabes", accusés d'être "des terroristes" alliés aux islamistes armés qui ont récemment fui la ville.
Les armées française et malienne ont repris lundi Tombouctou sans combat, les jihadistes qui l'occupaient depuis 10 mois ayant fui vers le Nord avant leur arrivée.
Les esprits ont commencé à s'échauffer mardi matin dans le quartier d'Abaradjou, près de la vieille ville.
Dans les misérables rues jonchées de détritus, des centaines de Maliens, hommes et femmes souvent jeunes, certains armés de bâtons, investissent une ancienne banque que les islamistes avaient reconvertie en "Centre de recommandation du convenable et interdiction du blâmable".
Un barbu d'une quarantaine d'années qui y logeait est sorti du bâtiment par la foule hystérique qui pille tout, jusqu'à la moindre chaise, aux cris de "Il faut le tuer!", "C'est un islamiste!", "Il n'est pas d'ici!" ou encore "C'est un terroriste!".
L'homme est rapidement arrêté par l'armée malienne désormais installée dans la ville, les Français s'étant repliés dans les faubourgs. "C'est un islamiste", affirme un soldat malien.
Avant de repartir à toute allure sur leurs pick-ups armés, les soldats sont obligés de braquer leurs armes sur la foule en furie pour éviter au prisonnier d'être lynché.
Les pillages ne cessent pas pour autant, aiguillonnés par la colère: dix mois de charia (loi islamique) dans son application la plus stricte, et la misère, le Mali étant l'un des pays les plus pauvres du monde, classé 175e sur 182 pays de l'indice de développement.
"Si on les trouve, on les frappe" à mort
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La population prend pour cible des boutiques proches. "C'est les magasins des Arabes", assure Bilal Traoré, couturier de 23 ans. "Ils ont pris du matériel dans des voitures et sont partis dans le Sahara", vers le nord, face à l'avancée franco-malienne.
"Si on les trouve, on les frappe jusqu'à mourir", promet Bilal Traoré, approuvé par les hommes qui l'entourent.
Dans une boutique, une dizaine de boîtes de cartouches de mitrailleuse lourde et légère et une radio militaire sont découvertes. Mais l'essentiel des pilleurs n'en a cure, occupée à se saisir de télévisions, antennes satellite, nourriture, meubles, vaisselle, tapis, jusqu'aux portes métalliques qui protégeaient les marchandises, démontées et emportées.
Certains se battent pour la possession d'objets, quelques-uns sont piétinés par la foule en furie, sans grand dommage. Chaque magasin est vidé en quelques minutes.
"Ces gens (les propriétaires des boutiques) sont les vrais terroristes, ce sont eux qui travaillaient avec Aqmi" (Al-Qaïda au Maghreb islamique), affirme Mohamed Dicko, 32 ans, selon qui "si on trouve des Arabes, on va les mettre à disposition des autorités. Maintenant, c'est vrai que s'il n'y a pas d'autorités, on va passer à l'exécution...".
L'ONG Human Rights Watch (HRW) a demandé lundi aux autorités maliennes de prendre "des mesures immédiates" pour "protéger tous les Maliens de représailles", évoquant "des risques élevés de tensions inter-ethniques" dans le Nord, où la rivalité est forte entre Arabes et Touareg la plupart du temps assimilées à des islamistes, et les Noirs, majoritaires au Mali.
Après une heure de chaos, l'armée malienne revient avec plusieurs véhicules et des dizaines d'hommes armés. Le pillage s'interrompt, des "Vive l'armée!" fusent de partout.
"On ne va pas laisser les gens piller. Mais il est vrai que des munitions ont été trouvées dans certains magasins", déclare un officier malien.
La trêve sera de courte durée: les soldats ne sont pas encore repartis que le pillage reprend avec entrain. Les militaires semblent dépassés ou désabusés, ne réagissant pas.