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La dynamique Mélenchon
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
La dynamique Mélenchon - Fondation Jean-Jaurès (jean-jaures.org)
À quelques jours du premier tour de l’élection présidentielle, Antoine Bristielle, directeur de l’Observatoire de l’opinion de la Fondation, et Laura Chazel, docteure en science politique, analysent la dynamique actuelle de la campagne de Jean-Luc Mélenchon.
Le 21 mars dernier, le journal Libération consacrait sa une au « Printemps Mélenchon » en affichant une large photographie du leader de l’Union populaire lors de son meeting, qui suivait la « marche pour la VIe République » à laquelle plus de 100 000 personnes ont participé. Il est vrai qu’à moins de deux semaines du premier tour de l’élection présidentielle, la dynamique de Jean-Luc Mélenchon dans les intentions de vote est indéniable. Mesuré à 7,6% des intentions de vote en janvier dans notre enquête électorale menée par l’institut Ipsos, il est désormais donné à 13,6%, soit une augmentation impressionnante de 6 points en l’espace de quelques semaines.
Plus encore, lorsque l’on étudie l’évolution de l’écart qui sépare Jean-Luc Mélenchon d’une qualification au second tour de la présidentielle, celui-ci n’a jamais été aussi réduit qu’aujourd’hui (graphique 1)1.
Graphique 1. Nombre de points séparant Luc-Mélenchon d’une qualification au second tour de l’élection présidentielle
Alors que plus de 8 points séparaient le leader de l’Union populaire du second tour en décembre dernier, ce ne sont plus que 3 points qui le séparent de Marine Le Pen et donc d’une qualification au second tour. La gauche donnée moribonde il y a encore quelques mois semble ainsi reprendre des couleurs dans ces dernières semaines de campagne.
Dans ces conditions, la dynamique Mélenchon mérite d’être analysée en profondeur. Sur quelle frange de l’électorat Jean-Luc Mélenchon capitalise-t-il ? S’agit-il d’une dynamique globale ou est-elle cantonnée à certaines franges restreintes de l’électorat ? Sur quelle stratégie de campagne cette dynamique s’appuie-t-elle ? Et, enfin, sera-t-elle suffisamment importante pour porter le candidat de l’Union populaire vers le second tour ?
De « l’union de la gauche » (2012) à « l’union du peuple » (2017, 2022) ?
Comprendre la « dynamique Mélenchon » nécessite un bref retour sur son parcours politique. Après avoir été membre du Parti socialiste (PS) pendant trente-deux ans, Jean-Luc Mélenchon fonde en 2008 le Parti de gauche (PG). Dénonçant le tournant néolibéral pris par le PS, il ambitionne désormais de rassembler la « gauche de la gauche ». En 2012, il se présente ainsi pour la première fois à l’élection présidentielle comme candidat du Front de gauche, une coalition de partis qui regroupe diverses organisations de gauche dont le PG et le Parti communiste français (PCF). À l’issue du scrutin, il obtient 11,10% des voix. Suivant cette élection présidentielle, et considérant l’échec de la stratégie d’union des gauches, Mélenchon se présente en 2017 comme candidat d’un mouvement plus transversal qu’il nomme La France insoumise (LFI). Son objectif n’est plus de « rassembler la gauche » mais de « fédérer le peuple ». S’inspirant de la stratégie de nouveaux partis politiques tels que Podemos en Espagne, le leader Insoumis décide alors de délaisser la symbologie de gauche (L’Internationale, le drapeau rouge) et l’axe « gauche-droite » au profit d’une rhétorique opposant le « peuple » aux « élites ». Cette stratégie a porté ses fruits puisqu’il obtient alors 19,58% des voix au premier tour de l’élection. Paradoxalement, il réussit ainsi à se présenter comme la principale force de gauche en France, devant le candidat socialiste Benoît Hamon qui n’obtient que 6,36% des voix au premier tour de cette même élection. En 2022, Jean-Luc Mélenchon a choisi de poursuivre cette même stratégie. En effet, il s’est déclaré candidat en dehors des partis sous la bannière de l’Union populaire affirmant que l’heure n’était plus à « l’union de la gauche » mais à l’union du peuple. Mais quel « peuple » Mélenchon peut-il espérer mobiliser pour atteindre le second tour de l’élection présidentielle de 2022 ?
Une évolution globale
Un point particulièrement intéressant dans la dynamique de Jean-Luc Mélenchon depuis janvier dernier est son aspect global. Le candidat de l’Union populaire progresse dans toutes les franges de la société, signe que cette dynamique ne s’est pas seulement appuyée sur une surmobilisation d’une partie restreinte de la société. Quelles sont les forces et les faiblesses de la base électorale de Jean-Luc Mélenchon ?
On constate tout d’abord que le vote Mélenchon prend un fort aspect générationnel (graphique 2), chose que l’on constatait déjà en 2012 et en 20172. Plus les électeurs sont jeunes, plus ils vont avoir tendance à voter pour Jean-Luc Mélenchon. Ce dernier obtient ainsi plus de 22% des intentions de vote chez les 18-24 ans, contre seulement 7% chez les 70 ans et plus.
Graphique 2. Évolution du vote pour Jean-Luc Mélenchon en fonction de l’âge des répondants
Autre facteur particulièrement intéressant, celui du niveau de diplôme. Même si le candidat de l’Union populaire obtient des scores honorables au sein de toutes les catégories de diplômes, il surperforme au sein des plus élevées d’entre elles. Il obtient ainsi près de 18% des intentions de vote chez les personnes possédant au moins un bac + 5 (graphique 3). Notons que cet effet du diplôme est plus important que ce l’on observait en 2017, où il jouait finalement peu à partir du niveau bac. Le vote Mélenchon en 2022 est donc pour l’instant davantage un vote de catégories intellectuelles supérieures. Mais cela se constate-t-il également au niveau des revenus et des catégories socio-professionnelles ?
Graphique 3. Évolution du vote pour Jean-Luc Mélenchon en fonction du niveau de diplôme des répondants
De manière particulièrement intéressante, plus le niveau de revenu des électeurs augmente, plus les intentions de vote pour Jean-Luc Mélenchon ont tendance à baisser. Il obtient ainsi ses meilleurs scores (20%) chez les électeurs dont le revenu est inférieur à 1250 euros net par mois (graphique 4).
Graphique 4. Évolution du vote pour Jean-Luc Mélenchon en fonction du revenu mensuel net du foyer des répondants
C’est un phénomène assez semblable que l’on constate lorsqu’on analyse les intentions de vote en fonction des catégories socio-professionnelles (graphique 5). Alors qu’en 2017 il obtenait des scores assez similaires au sein des professions intermédiaires, des ouvriers et des employés en surperformant même chez ces derniers (29% des voix), les intentions de vote des ouvriers et des employés sont désormais inférieures à celles des professions intermédiaires. Plus encore qu’en 2012 et qu’en 2017, le vote Mélenchon n’est ni un vote de classe, ni un vote populaire.
Graphique 5. Évolution du vote pour Jean-Luc Mélenchon en fonction de la catégorie socio-professionnelle des répondants
Pour autant, on peut être frappé par la déconnexion existante entre les hauts niveaux de diplôme et les faibles revenus de l’électorat Mélenchon. Cette déconnexion, qui existait déjà d’une certaine manière en 20173, confirme que le candidat de l’Union populaire performe particulièrement au sein de cette frange de la population à fort niveau d’éducation mais dont le niveau de vie ne suit pas.
On comprend dès lors pourquoi les questions de pouvoir d’achat et de lutte contre les inégalités sont particulièrement citées par les électeurs de Jean-Luc Mélenchon comme les enjeux les plus importants. C’est d’ailleurs sur la montée des préoccupations concernant le pouvoir d’achat que Jean-Luc Mélenchon a construit sa dynamique des dernières semaines. Le programme « L’Avenir en commun » porté par l’Union populaire se compose à la fois d’un ensemble de mesures s’attaquant au libéralisme économique et financier, et proposant d’assurer davantage d’égalité et de justice sociale.
Entre vote utile à gauche et mobilisation de l’électorat potentiel
Comme nous le disions en introduction, Jean-Luc Mélenchon a gagné six points en l’espace de deux mois. Cette dynamique s’est construite de deux manières.
D’une part, Jean-Luc Mélenchon a réussi à mobiliser plus largement « son » électorat.
Graphique 6. Évolution de la certitude d’aller voter des électeurs de Jean-Luc Mélenchon
Alors qu’en janvier, seulement 58% de son électorat potentiel étaient certains d’aller voter (et étaient donc comptabilisés dans les sondages), c’est désormais le cas pour 70% d’entre eux, soit une augmentation de 12 points (graphique 6). C’est la même chose que l’on constate lorsque l’on se demande comment les électeurs de 2017 envisagent désormais de voter. Si entre janvier et mars, Jean-Luc Mélenchon a récupéré une partie plus importante des anciens électeurs de Benoît Hamon (de 6% à 20%), c’est surtout chez ses anciens électeurs que la dynamique est la plus importante. Alors qu’en janvier seulement 35% de ses électeurs de 2017 étaient certains de voter à nouveau pour lui, c’est désormais le cas pour 54% d’entre eux.
Graphique 7. Évolution des reports de voix vers Jean-Luc Mélenchon des électeurs de 2017
Note de lecture : 54% des électeurs ayant voté Jean-Luc Mélenchon à la présidentielle de 2017 déclaraient à nouveau vouloir voter pour lui fin mars 2022.
D’autre part, plus encore qu’avoir su mobiliser une bonne partie de son électorat, la dynamique de Jean-Luc Mélenchon se base également sur des transferts de voix en sa faveur à gauche depuis janvier (graphique 8).
Graphique 8. Part de chaque électorat en janvier 2022 déclarant désormais vouloir voter pour Jean-Luc Mélenchon
Note de lecture : 31% des électeurs qui déclaraient vouloir voter Philippe Poutou en janvier déclarent désormais vouloir voter pour Jean-Luc Mélenchon.
En effet, si Jean-Luc Mélenchon garde une très large partie de son électorat qui lui était acquis en janvier (87%), il bénéficie également de transferts de voix du reste de la gauche et ce autant de la part de la gauche radicale que de la gauche de gouvernement. Notons ainsi que 34% des électeurs qui pensaient voter pour Christiane Taubira envisagent désormais de voter pour Jean-Luc Mélenchon.
Conclusion : une possibilité réelle d’accéder au second tour ?
Trois facteurs pourraient contribuer à une dynamique de Mélenchon vers le second tour.
Une perte de vitesse de Marine Le Pen
Cette campagne présidentielle n’a pas été un long fleuve tranquille pour Marine le Pen. Il y a un an de cela, les sondages la mesuraient à 28% des intentions de vote et quatre points devant Emmanuel Macron, mais elle plafonne désormais à 17% dans les intentions de vote selon notre enquête électorale. À n’en pas douter, la candidature d’Éric Zemmour explique une large partie de cette dynamique négative. Mais un autre point rentre en ligne de compte : le Rassemblement national est structurellement mesuré plus haut en début ou en milieu de campagne que son score d’arrivée. Ainsi en 2017, à deux semaines du scrutin, l’institut Ifop donnait Marine Le Pen à 24%, devant Emmanuel Macron, alors qu’elle termina finalement à 21% et en seconde position. Jean-Luc Mélenchon peut ainsi espérer que ce phénomène se réalise de nouveau lors de cette élection.
Une mobilisation d’un électorat encore abstentionniste
Alors qu’un tiers des Français n’est pas encore certain d’aller voter le 10 avril prochain, beaucoup a été dit sur l’impact que pourrait avoir une mobilisation de dernière minute de cette partie de la population. Pour gagner les quelques points qui le séparent du second tour, Jean-Luc Mélenchon pourrait miser sur la mobilisation d’une partie de son électorat qui n’est, à l’heure actuelle, pas encore certain d’aller voter. Comme nous le disions plus haut, seuls 7 électeurs potentiels de Jean-Luc Mélenchon sur 10 sont certains de se déplacer au premier tour. Il lui reste donc à ce niveau une marge de progression substantielle. Néanmoins, dans ce duel avec Marine Le Pen, la candidate du Rassemblement national est dans une situation quasiment équivalente avec seulement 67% de son électorat certains de se déplacer (et donc comptabilisés dans les sondages d’intention de vote). Si l’abstention venait à reculer de la même manière dans les électorats des deux candidats, cela n’aurait donc que peu d’impact sur l’écart final entre les deux.
Vers un vote utile à gauche ?
Le motif d’espoir principal pour Jean-Luc Mélenchon réside peut-être finalement davantage dans le fait qu’il puisse apparaître aux yeux des autres électeurs de gauche comme le vote utile de cette famille politique. Si une telle dynamique de « vote utile » se consolidait dans les jours à venir, cela ne serait pas sans rappeler l’élection présidentielle de 2017 durant laquelle la « dynamique Mélenchon » s’était confirmée dans la semaine précédant l’élection.
À l’heure actuelle, les électorats de Yannick Jadot, Anne Hidalgo et Fabien Roussel sont fracturés entre deux lignes. D’un côté, 29% des électeurs de Fabien Roussel, 36% des électeurs de Yannick Jadot et 43% des électeurs d’Anne Hidalgo déclarent qu’ils ne pourront « jamais » voter pour Jean-Luc Mélenchon. Mais d’un autre côté, 29% des électeurs de Fabien Roussel, 21% des électeurs de Yannick Jadot et 13% des électeurs d’Anne Hidalgo font de Jean-Luc Mélenchon leur « second choix de vote ». Or comme on le constate dans le graphique suivant, ces trois électorats se caractérisent à l’heure actuelle par leur hésitation.
Graphique 9. Sureté du choix de vote pour le premier tour de la présidentielle
Note de lecture : 63% des électeurs déclarant vouloir voter pour Jean-Luc Mélenchon affirment que ce choix est définitif.
Plus que dans n’importe quelle autre partie du spectre politique, le choix des électeurs de Fabien Roussel, Yannick Jadot et Anne Hidalgo est loin d’être cristallisé. Si l’écart dans les sondages entre Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon reste faible jusqu’au premier tour, il peut espérer une mobilisation en sa faveur d’une partie de l’électorat de gauche, préférant un « vote utile » plutôt qu’un match retour entre Emmanuel Macron et Marine le Pen. Cette logique pourrait d’ailleurs être amplifiée par le fait que dans l’hypothèse d’un tel duel, la défaite de la candidate d’extrême droite est loin d’être assurée, elle qui était mesurée à 47% au second tour dans un récent sondage. Dans cette logique – et à contre-pied de l’idée d’un « vote de plaisir » au premier tour défendu par Yannick Jadot – nombre d’Insoumis rappellent désormais que donner sa voix à Jean-Luc Mélenchon dès le 10 avril prochain est le meilleur moyen de « faire barrage » à l’extrême droite.