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    "Plutôt Le Pen que Mélenchon" : quand le retournement du barrage républicain était prédit par Lordon

    Lordon

    Lien publiée le 9 juillet 2022

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    Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

    « Plutôt Le Pen que Mélenchon » : quand le retournement du barrage républicain était prédit par Frédéric Lordon - L'insoumission (linsoumission.fr)

    Marine Le Pen

    Plutôt Marine Le Pen que Jean-Luc Mélenchon ? Plutôt l’extrême-droite que la NUPES ? Nous assistons au retournement du fameux barrage républicain. Un retournement matérialisé par l’interview du nouveau ministre de l’Éducation nationale ce 7 juillet 2022 sur France inter : les députés du parti présidentiel peuvent voter pour le Rassemblement national mais la France insoumise est infréquentable, « limite du point de vue de l’arc républicain ». L’ennemi ce n’est plus l’extrême-droite mais la gauche. Pendant 5 ans, les ministres d’Emmanuel Macron ont préféré s’attaquer à l’« islamo-gauchisme » qu’à l’extrême-droite. Sans majorité à l’issu des élections législatives, le capital a choisi son camp. Une situation politique prédite par le philosophe Frédéric Lordon dès avril 2021. Notre article.

    Emmanuel Macron, élu grâce au barrage républicain à la présidentielle, transperce le barrage républicain aux législatives

    RIP, on a perdu le barrage républicain. Vous savez, ce fameux front républicain de toute la Nation pour faire barrage à l’accession du fascisme au pouvoir. Ce fameux chiffon rouge que le capital agite tous les 5 ans à chaque entre deux tours de la présidentielle. C’est même LA stratégie politique d’Emmanuel Macron : faire monter l’extrême-droite pour ensuite mieux se poser en barrage au second tour. Et ça a encore marché lors de cette dernière élection présidentielle, permettant à Emmanuel Macron de se faire réélire, alors même que son projet néolibéral est devenu ultra minoritaire dans la société (21% des inscrits du premier tour).

    Problème : aux élections législatives qui ont suivies, le barrage a pris l’eau de toute part. Pire, le barrage républicain n’e s’est contenté de s’effondrer, il s’est retourné contre la gauche au profit de l’extrême-droite. Emmanuel Macron, lui-même élu grâce au barrage républicain contre l’extrême-droite, a refusé d’appeler au barrage en cas de duels entre la gauche et l’extrême-droite aux législatives. Sur 61 seconds tours NUPES VS RN, les porte-paroles LREM ont refusé d’appeler à voter NUPES dans 55 cas. Les électeurs macronistes ont bien reçu la consigne et ont préféré s’abstenir ou voter pour l’extrême-droite que voter pour la gauche. Le barrage républicain est parti en vacances, très loin.

    L’alliance LREM & RN à l’Assemblée nationale

    Fait inimaginable il y a encore quelques années, une fois au pouvoir, le président de la République préfère tendre la main à l’extrême-droite plutôt qu’à la gauche. Après sa défaite aux élections législatives, déroute historique pour un président fraichement élu, Emmanuel Macron aurait pu faire un tout autre choix, entendre le plébiscite immense de la société française pour le programme social, écologique et démocratique de la NUPES. Non, le président a choisi une route nous rappelant les heures les plus sombres de notre histoire.

    Des députés du parti présidentiel ont voté à l’Assemblée nationale pour faire élire deux vice présidents du Rassemblement national. Des députés du parti présidentiel qui votent pour l’extrême-droite plutôt que pour la gauche. Il y a encore quelque mois, vous seriez tombés de votre chaise en lisant la phrase précédente. Sous nos yeux ébahis, nous assistons bien à une alliance de fait entre LREM et le RN à l’Assemblée nationale. Le RN s’abstient pour que la candidate LREM emporte la présidence de l’Assemblée. En échange LREM vote pour faire élire les vice présidents du RN. Une alliance capital-fasciste qui n’a finalement rien de surprenant tant les intérêts de deux partis politiques sont liés.

    Macron saison 1 : la chasse à l’ « islamo-gauchisme », et « en même temps » une drague appuyée à l’extrême-droite

    Pendant 5 ans déjà, les ministres d’Emmanuel Macron ont préféré s’attaquer à un « islamo-gauchisme » imaginaire, Frédéric Vidal et Jean-Michel Blanquer lançant une chasse à l’Université, plutôt qu’à l’extrême-droite. Pire, Emmanuel Macron n’a eu de cesse en 5 ans de faire monter l’extrême-droite (pour mieux se faire réélire face à elle en utilisant le barrage durant l’entre deux tours de la présidentielle).

    Interview à Valeurs Actuelles, réhabilitation de Pétain et Maurras, Marine Le Pen qualifiée de « trop molle » par Gérald Darmanin, l’appel à Éric Zemmour parce qu’il s’était fait agressé dans la rue, laisser-faire face à la zemmourisation médiatique, chasse à l’islamo-gauchisme… Les appels du pieds macronistes ont été grossiers.

    Macron saison 2 : sans majorité, gouverner avec l’extrême-droite plutôt qu’avec la gauche

    Pour ce deuxième quinquennat Macron, privé de majorité, il faut donc s’attendre à ce que cette drague nauséabonde et appuyée de l’extrême-droite se transforme en alliance de fait pour gouverner. L’ouverture de la nouvelle mandature par un discours nostalgique de l’Algérie française applaudi sur les bancs de la minorité présidentielle a annoncé la couleur.

    Alors qu’Elisabeth Borne a refusé de se soumettre au vote de confiance du Parlement, humiliant la démocratie française, La France insoumise a déposé une motion de censure, soutenue par l’ensemble des groupes de la NUPES. Une motion de censure pour faire tomber le gouvernement, qui devrait être logiquement soutenue par l’ensemble des oppositions du pays. Marine Le Pen a fait annoncer qu’elle ne voterait pas la motion de censure du gouvernement. Une alliance capital-fasciste dans les faits. Une alliance prédite il y a un moment déjà.

    Quand Frédéric Lordon prédisait le retournement du barrage républicain pour Marine Le Pen contre Mélenchon

    Avril 2021, plateau de La Bas si J’y Suis. Le philosophe Frédéric Lordon est l’invité de Daniel Mermet pour présenter son nouvel ouvrage sur le communisme co-écrit avec Bernard Friot. Un passage de l’émission mérite d’être ressorti aujourd’hui. Il est d’une clarté éclairante. Le philosophe commence par décrire la haine des médias à l’encontre de Jean-Luc Mélenchon :

    « Mélenchon est celui qui l’objet du traitement de défaveur le plus appuyé de la totalité des médias mainstream. Il est l’objet d’un déferlement de détestation proprement viscéral. On lui choisit toujours la photo la plus désobligeante, on lui déforme ses propos. Au moindre écart de conduite ou de langage, il en a pour 3 jours. Je me dis que c’est un bon signe : quelqu’un qui s’attire, à ce point, une haine universelle de l’ensemble des institutions formelles et informelles de la démocratie bourgeoise ». Premier point.

    Frédéric Lordon au micro de Daniel Mermet en avril 2021

    Le deuxième point de Frédéric Lordon, sur le barrage républicain, est savoureux : « Je l’ai écrit il y a des années : cette connerie du front républicain pourrait se donner une nouvelle occurrence en se reformant contre Mélenchon. Je suis prêt à parier que Mélenchon contre Le Pen, d’une part, version faible, le front républicain n’est pas du tout garanti en faveur de Mélenchon, d’autre part, version forte, il se pourrait qu’une front républicain se reconstitue mais contre Mélenchon ». La situation politique de juin / juillet 2022.

    Plutôt Hitler que le Front Populaire dans les années 30, plutôt Le Pen que Mélenchon aujourd’hui : le capital préfèrera toujours l’extrême-droite à la gauche, pour assurer le maintien de son profit

    Léon Trotski disait que le fascisme n’est rien d’autre que la réaction du capitalisme. Le grand capital aujourd’hui à la tête de 90% des médias, choisira toujours le camp qui sauvegarde ses intérêts, sa liberté d’accumulation infinie de profit. Et entre l’extrême-droite de Marine Le Pen, pour le remboursement de la dette et contre la hausse des salaires, et la gauche de rupture de Jean-Luc Mélenchon, le capital sait où va son intérêt.

    Il n’y aurait donc rien de surprenant que le capital, et que les médias du pays, possédés par 9 milliardaires, choisissent comme favori Marine Le Pen pour 2027. Entre Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon, la question est vite répondue pour le capital.

    Résumé de Frédéric Lordon : « Les grands médias sont possédés par des milliardaires. Or, le capital fait très bien la différence du point de vu de ses intérêts entre Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon. Le capital sait parfaitement qu’avec Marine Le Pen : rien ne change. Pas le moindre problème pour le capital. Avec Mélenchon ? C’est pas le grand soir, mais dans la tête d’un capitaliste c’est déjà le grand soir ».

    Le retournement du barrage républicain contre la gauche, au profit de l’extrême-droite, peut paraître totalement fou, et il l’est, l’extrême-droite a déjà fracassé le plafond de verre de l’Assemblée nationale avec 89 députés. Le mouvement fasciste s’avance plus fort que jamais pour 2027, mais ce retournement s’explique facilement : par les intérêts du capitalisme.

    Par Pierre Joigneaux.