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Décès de Wije Dias, dirigeant trotskyste sri-lankais

Sri-Lanka

Lien publiée le 3 août 2022

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

Le camarade Wije Dias: combattant du trotskysme (27 août 1941 - 27 juillet 2022) - World Socialist Web Site (wsws.org)

Déclaration du Comité international de la Quatrième Internationale

C’est avec une profonde tristesse que le Comité international de la Quatrième Internationale (ICFI) annonce le décès du camarade Wije Dias. Le camarade Wije était le secrétaire général du Parti de l’égalité socialiste (Sri Lanka) et de son précurseur, la Ligue communiste révolutionnaire (LCR), de décembre 1987 à mai dernier, ou il a été élu au poste nouvellement créé de président du parti.

Wije, qui aurait eu 81  ans le mois prochain, est décédé hier matin à Colombo des suites d’une crise cardiaque. Il souffrait depuis longtemps d’une maladie coronarienne et avait subi un pontage en 2013. Il s’était pleinement rétabli et est resté intensément actif dans la direction du parti jusqu’au dernier jour de sa vie.

La vie politique du camarade Wije s'est étendue sur six décennies et a englobé pratiquement toute la période pendant laquelle la Quatrième Internationale a été dirigée par le Comité international. Il a consacré sa vie adulte à la lutte pour la libération de la classe ouvrière du besoin, de la guerre et de toutes les formes d'oppression capitaliste.

Wije était un protagoniste implacable du programme socialiste internationaliste de la révolution permanente et un combattant pour l’indépendance politique de la classe ouvrière. Il était inflexible dans sa défense des principes marxistes et trotskystes parce qu’il avait été témoin des conséquences catastrophiques – sous forme de désorientation politique, de réaction et de perte tragique en vies humaines – qui résultent de leur abandon et de leur trahison.

Wije faisait partie d’un groupe remarquable de jeunes gens qui, sous la direction politique du CIQI, l’organisation des trotskystes orthodoxes fondée en 1953 pour défendre le programme de la révolution socialiste mondiale contre l’opportunisme pabliste, ont tiré les principales leçons politiques de la trahison historique de la classe ouvrière sri-lankaise par le Lanka Samaja Sama Party (LSSP).

Après être entré à l’Université de Ceylan à Perideniya en 1962, Wije a rejoint le mouvement de jeunesse du LSSP, qui, tout en s’appuyant sur le long héritage de la lutte pour le trotskysme au Sri Lanka, avait adopté une position ambivalente sur la scission de 1953. Il a refusé d’approuver la «Lettre ouverte» publiée par le trotskyste américain James P. Cannon et dirigeant du Socialist Workers Party (SWP), qui a fondé le Comité international.

Le LSSP était la force dominante dans la classe ouvrière. Mais avec les encouragements d’Ernest Mandel et de Michel Pablo, il répudiait de plus en plus ouvertement la politique socialiste en faveur des manœuvres parlementaires et de front populaire, et du syndicalisme, et il capitulait rapidement devant la politique chauvine cinghalaise de la classe dirigeante.

Le pablisme était une tendance liquidatrice petite-bourgeoise, apparue dans la Quatrième Internationale dans les conditions de la nouvelle stabilisation du capitalisme après la Seconde Guerre mondiale, et qui a cherché à le transformer en auxiliaire du stalinisme, de la social-démocratie et, dans les pays moins développés, du nationalisme bourgeois.

En 1964, le LSSP a trahi une puissante poussée de la classe ouvrière, le mouvement des «21  revendications», qui ébranlait les fondements du pouvoir bourgeois sur l’île. Il a assumé le rôle de principal soutien social de la bourgeoisie sri-lankaise en entrant dans un gouvernement capitaliste dirigé par le Sri Lanka Freedom Party (SLFP), défenseur de la politique des «Cinghalais d’abord».

Cette trahison représentait une répudiation ouverte de l’internationalisme socialiste et de la théorie de la révolution permanente de Trotsky, qui démontrait l’incapacité d’une quelconque section de la bourgeoisie des pays à développement capitaliste tardif comme le Sri Lanka à répondre aux aspirations démocratiques et aux besoins sociaux des masses.

Les actions du LSSP ont coïncidé avec la dégénérescence du SWP (Socialist Workers Party) au milieu des années  1950 et au début des années  1960. En 1963, le SWP proposa de se réunifier avec les pablistes. Une minorité au sein du SWP s’est opposé à une réunification sans principe et a publié en 1964 une lettre exigeant une discussion sur la «grande trahison» du LSSP au Sri Lanka. Ils ont été expulsés du SWP et ont formé le Comité américain pour la Quatrième Internationale (ACFI) et, en 1966, la Workers League, le prédécesseur du SEP (Socialist Equality Party - Parti de l’égalité socialiste aux États-Unis).

La réponse de Wije à ces événements allait s’avérer être le tournant crucial de sa vie. Repoussé par la trahison du LSSP, Wije faisait partie d’un groupe de jeunes trotskystes qui, après une période d’intenses discussions entre 1964 et 1968, en sont venus à reconnaître que le CIQI avait raison d’insister sur le fait que l’effondrement du LSSP en tant que parti trotskyste était un produit du pablisme.

Ces discussions ont abouti à la création de la Ligue communiste révolutionnaire (Revolutionary Communist League – RCL) comme section sri-lankaise du CIQI. Le rôle principal dans cette lutte a été joué par Keerthi Balasuriya, qui fut élu secrétaire général de la RCL lors de sa fondation en 1968.

En fondant la RCL, Keerthi et ses camarades avaient compris qu’il ne suffisait pas de rompre avec le LSSP sur le plan organisationnel, mais qu’il était nécessaire de rompre politiquement avec le pablisme qui avait fourni la couverture politique de sa trahison. La RCL a accordé beaucoup d’attention à démasquer la politique centriste du LSSP (R), que les pablistes avaient hâtivement mis en place après avoir expulsé les principaux dirigeants du LSSP pour couvrir leurs traces.

La lutte de la RCL, puis du SEP dans les décennies qui ont suivi s’est largement concentrée sur la lutte pour surmonter les conséquences politiques de la trahison du LSSP. En enchaînant la classe ouvrière au régime capitaliste et en promouvant la politique ethnique communautariste de la classe dirigeante sri-lankaise, il a ouvert la porte à la montée d’une politique radicale petite-bourgeoise sous forme du JVP, un parti mêlant castrisme, maoïsme et chauvinisme cinghalais, et des LTTE (Tigres de libération de l’Eelam tamoul).

Dans ce qui allait devenir la marque de fabrique de la politique principielle de la RCL, celle-ci a démasqué en 1970 la faillite politique d’une rébellion isolée de jeunes ruraux dirigée par le JVP, tout en faisant campagne pour que la classe ouvrière défende les dirigeants et les cadres du JVP contre la virulente répression de l’État. Agissant ainsi, la LRC a également été soumise à la répression de l’État et fut contrainte d’opérer dans la clandestinité.

La deuxième coalition LSSP-SLFP de 1970-1976 est, dans des conditions de crise économique mondiale croissante, entrée dans un conflit acharné avec la classe ouvrière. Exploitant la confusion politique ainsi créée, J.R.  Jayawardene et son UNP de droite (United National Party) ont pris le pouvoir en 1977. Il a rapidement lancé un vaste assaut contre la classe ouvrière, ouvert l’île aux investisseurs internationaux, provoqué une grève générale en 1980 et instauré une présidence exécutive autoritaire, tout en attisant le chauvinisme cinghalais. Cela a finalement conduit en 1983 au lancement d’une guerre ethnique qui allait secouer l’île pendant un quart de siècle.

La LCR-SEP a été la seule à s’opposer à la guerre, à la bourgeoisie chauvine du Sri Lanka et à son État, du point de vue du défaitisme révolutionnaire et de l’internationalisme socialiste. Tout en demandant le retrait immédiat de toutes les forces de sécurité du nord et de l’est de l’île, à majorité tamoule, la LRC s’est opposée à la politique communautariste des LTTE, qui cherchaient à s’assurer le soutien de l’Inde et des puissances impérialistes. Elle s’est battue pour unir les travailleurs et les pauvres ruraux cinghalais et tamouls dans une lutte pour les États socialistes unis du Sri Lanka et de l’Eelam tamoul.

En 1985-1986, la LCR a joué un rôle crucial et décisif dans la direction du Comité international par son opposition à la dégénérescence opportuniste nationale du WRP (Workers Revolutionary Party) en Grande-Bretagne. L’opposition à la trahison des principes trotskystes par le WRP fut menée par la Workers League, la section américaine du CIQI, et son secrétaire national David North. Keerthi travailla en étroite collaboration avec North à la rédaction des principaux documents produits par le CIQI, élaborant la base politique de la rupture d’avec le WRP.

David North (à gauche) et Wije Dias (à droite), 1988

Dans un hommage à Wije Dias à l’occasion de son 75e  anniversaire, North a écrit que la «contribution exceptionnelle de Keerthi reflétait l’immense expérience et la fermeté politique de la direction et des cadres de la LCR, issues des décennies précédentes de lutte pour le trotskysme».

«C’est pour cette raison que la LCR a pu supporter la perte prématurée et totalement inattendue du camarade Keerthi en décembre 1987. Sa mort, à l’âge de 39  ans, a été une perte cruelle et tragique pour la Ligue communiste révolutionnaire et le Comité international. Le fait que la LCR ait pu résister à l’impact de la mort de Keerthi – au milieu de la guerre civile, des attaques des assassins du JVP et de la persécution continue du gouvernement – était, selon toute norme objective, une démonstration de l’extraordinaire force politique de la direction de la LCR. Mais il faut aussi reconnaître – et il n’y a pas un seul camarade de la LCR/SEP ou du Comité international qui contesterait ce jugement – que toi, camarade Wije, tu as joué le rôle décisif dans le maintien de l’unité du parti, dans le maintien de son orientation révolutionnaire internationaliste, et en le faisant progresser».

La défaite du WRP par le CIQI en 1985-1986 a marqué un tournant définitif dans la lutte pour défendre et développer le programme et la stratégie de la révolution socialiste mondiale, notamment en permettant une collaboration étendue entre les dirigeants de la section sri-lankaise et leurs co-penseurs et camarades internationaux.

La mort de Keerthi a coïncidé avec une crise politique massive provoquée par l’occupation du nord et de l’est tamoul de l’île par l’armée indienne, dans le cadre de l’accord indo-sri-lankais.

Le camarade Wije a relevé ce défi avec courage et fermeté politiques. Au cours des années tumultueuses de la guerre civile, de la répression de l'État, des attaques du JVP et de la crise politique chronique, Wije a largement remboursé la confiance politique investie en lui. En effet, il inspirait un énorme respect dans son propre parti et parmi les dirigeants et cadres de l'ensemble du CIQI.

Wije Dias avec sa défunte épouse, Piyaseeli Wijegunasingha

En 2010, le camarade Wije a souffert de la perte de Piyaseeli, son épouse et camarade qui était une figure politique et culturelle exceptionnelle sur l’île.

Trois ans plus tard, Wije a subi un pontage coronarien. En dépit d’une santé déclinante et des difficultés physiques qui accompagnent naturellement la vieillesse, il est resté actif sur le plan politique, offrant un leadership et des conseils politiques fondés sur ses vastes connaissances et son expérience, jusqu’aux derniers jours de sa vie. Mardi, il a participé à une réunion du comité de rédaction sri-lankais du World Socialist Web Site.

Dans les mois qui ont précédé sa mort, il a été intimement participé à l’élaboration de la réponse du parti au soulèvement massif des travailleurs et des ouvriers qui secoue l’île depuis avril et qui, au début du mois, a poussé le président Gotabaya Rajapakse à démissionner et à fuir le pays.

Wije a joué un rôle de premier plan dans le troisième congrès national du SEP sri-lankais en mai, et en étroite collaboration avec le CIQI, il a joué un rôle central dans la rédaction de la déclaration du SEP, «Pour un congrès démocratique et socialiste des travailleurs et des masses rurales au Sri Lanka!» publiée le 20  juillet, exactement une semaine avant sa mort.

Cette déclaration exprime clairement l’opposition implacable du SEP à la domination capitaliste. S’appuyant sur les vastes expériences faites par la classe ouvrière au siècle dernier, depuis la Révolution russe de 1917 jusqu’aux leçons de la révolution égyptienne ratée de 2011, en passant par la trahison du LSSP en 1964, cette déclaration élabore une stratégie, basée sur le développement d’organisations indépendantes de lutte de la classe ouvrière, pour lutter pour le pouvoir des travailleurs et pour le socialisme.

Le camarade Wije a mené une vie riche et bien remplie. C’était un puissant orateur, aussi bien dans sa langue maternelle, le cinghalais, qu’en anglais, comme l’attestent les nombreuses vidéos de ses interventions.

Il avait une vaste connaissance de l’histoire du Sri Lanka et de l’Inde, du mouvement ouvrier international et de la culture sud-asiatique et occidentale.

Wije Dias en 2003

Il était intrépide dans son opposition à l’ennemi de classe, mais même son ennemi le plus acharné ne pouvait ni n’osait remettre en question son intégrité politique.

Il avait un grand sens de l’humour. Un sens qu’il pouvait utiliser très efficacement pour dénoncer la vanité et la vénalité des représentants politiques de la bourgeoisie et des opportunistes petits-bourgeois.

Malgré sa stature politique bien méritée, Wije était un homme intensément modeste. Même s’il souffrait des ravages de la vieillesse, il ne se plaignait pas de sa santé déclinante.

Wije a dû traverser les longues et difficiles circonstances liées aux colossales trahisons de la classe ouvrière perpétrées par les staliniens, les sociaux-démocrates et leurs complices pablistes. Mais il a vécu pour voir une nouvelle poussée révolutionnaire de la classe ouvrière au Sri Lanka – poussée que les événements révèlent rapidement, dans les conditions de la crise systémique du capitalisme mondial, être un précurseur pour le monde entier.

Le camarade Wije Dias est une figure monumentale de la lutte pour le trotskisme au Sri Lanka. Sa vie et son héritage entrent désormais dans l’histoire de la lutte pour le socialisme. Ils serviront à inspirer et, même plus important encore, à orienter politiquement les travailleurs et les jeunes dans ce qui va et doit s’avérer être la décennie de la révolution socialiste mondiale.

(Article paru d’abord en anglais le 28 juillet 2022)

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David North rend hommage à Wije Dias - World Socialist Web Site (wsws.org)

David North rend hommage à Wije Dias

Voici l’hommage rendu en ligne par David North, président du Parti de l’égalité socialiste (États-Unis), lors des funérailles du président du SEP sri-lankais, Wije Dias, qui se sont tenues à Colombo le samedi 30 juillet. Le camarade Dias est décédé chez lui le 27 juillet d’une crise cardiaque, un mois avant son 81e anniversaire.

David North

Chers camarades,

Je regrette de ne pas pouvoir être avec vous à Colombo pour l’enterrement du camarade Wije Dias. Mais la distance physique n’atténue pas le profond sentiment de perte que nous ressentons aujourd’hui, ni les puissants liens de solidarité qui existent entre les membres du Comité international à travers le monde et la section du Sri Lanka, que le camarade Wije a dirigée pendant les 35 dernières années, soit un tiers de siècle.

Tous ceux qui sont réunis ici aujourd’hui pour faire leurs adieux à Wije Dias ont conscience d’être en présence de l’histoire. On peut affirmer sans équivoque que Wije Dias a joué un rôle monumental, pendant soixante ans, dans la lutte pour la construction du mouvement trotskiste. Lorsqu’une biographie de Wije sera écrite, elle englobera nécessairement toute l’histoire moderne du Sri Lanka. Il avait 22 ans lorsque le parti Lanka Sama Samaja a trahi les principes marxistes-trotskistes sur lesquels il avait été fondé et est entré dans le gouvernement de coalition bourgeois de Bandaranaike. Wije allait consacrer les 58 années restantes de sa vie à surmonter les conséquences tragiques de cette trahison et à rétablir l’autorité du véritable trotskisme révolutionnaire dans la classe ouvrière.

Wije et une direction remarquable de jeunes trotskistes, dirigée par Keerthi Balasuriya, ont fondé la Ligue communiste révolutionnaire – prédécesseur du Parti de l’égalité socialiste – en 1968. Pour défendre les principes trotskistes, la LCR a été contrainte, comme Trotsky l’a décrit un jour dans de telles circonstances, de «nager à contre-courant». Mais Wije, Keerthi, Ratnayake et leurs camarades l’ont fait avec une confiance inébranlable dans le pouvoir de la vérité historique, la justesse de la perspective et du programme de la Quatrième Internationale, et le rôle révolutionnaire de la classe ouvrière au Sri Lanka et dans le monde entier.

Wije était un homme extraordinairement modeste, qui – pour autant que je m’en souvienne – n’a jamais cherché à attirer l’attention sur ses propres contributions à la direction du parti. Mais alors que la LCR faisait face au choc de la mort prématurée de camarade Keerthi le 18 décembre 1987, Wije a accepté la responsabilité d’assumer la direction de la Ligue communiste révolutionnaire. Il est devenu secrétaire national au milieu de la guerre sanglante déclenchée par le régime de Colombo contre la population tamoule. Sous sa direction, la LCR-SEP est restée inflexible dans son opposition au racisme cinghalais promu par le régime de Colombo et le JVP, tout en refusant de faire la moindre concession politique au nationalisme petit-bourgeois des LTTE.

Pendant la quasi-totalité de son travail politique, camarade Wije a dû se battre dans des conditions où les forces réactionnaires étaient à l’offensive et où la classe ouvrière – trahie par le LSSP, les syndicats et d’autres organisations opportunistes – était en retraite.

Wije Dias, président national du SEP [WSWS Media]

Mais dans les derniers mois de sa vie, camarade Wije a été témoin de la résurgence de la classe ouvrière. Il a accueilli avec enthousiasme l’opportunité de passer à l’offensive contre la classe dominante. Malgré sa santé déclinante, Wije a rassemblé toutes ses forces restantes et a fait appel à sa vaste expérience pour fournir une direction politique au puissant mouvement spontané.

Pas plus tard que le 9 juillet, camarade Wije a participé à une réunion du comité politique du Parti de l’égalité socialiste pour formuler sa réponse à la crise du régime Rajapakse. Il s’est prononcé avec force contre tout soutien politique à un gouvernement capitaliste intérimaire et a plaidé pour que le parti lance un appel à un Congrès démocratique et socialiste des travailleurs et des masses rurales, afin de jeter les bases du transfert du pouvoir d’État à la classe ouvrière.

Wije a consacré les derniers jours de sa vie à travailler en étroite collaboration avec le comité politique et le Comité international à la rédaction d’une déclaration programmatique majeure, qui a été publiée sur le WSWS le 20 juillet. Expliquant pourquoi le SEP rejetait tout soutien ou participation à un «gouvernement intérimaire», la déclaration invoquait l’expérience politique de toute une vie:

En refusant de prendre part aux pourparlers sur la formation d’un gouvernement intérimaire, le SEP a tiré les leçons politiques amères de la trahison catastrophique des principes politiques essentiels du trotskisme par le Lanka Sama Samaja Party en 1964. Au milieu d’une crise économique et politique, et face au puissant mouvement des «21 revendications» de la classe ouvrière, le premier ministre Sirima Bandaranaike, chef du parti bourgeois Sri Lanka Freedom Party, s’est tourné vers les dirigeants du Lanka Sama Samaja Party (LSSP) pour soutenir la domination capitaliste. L’entrée du LSSP dans le gouvernement bourgeois «Cinghalais d’abord» de Bandaranaike n’a pas seulement marqué la fin du mouvement des «21 revendications». Elle a démoralisé les masses, favorisé les conflits ethnolinguistiques au détriment de la lutte des classes, et a ouvert la voie à la domination de la politique communautariste réactionnaire et à des décennies de guerre civile.

Le SEP n’a pas suivi et ne suivra jamais le chemin de la trahison commise par le LSSP. Nous rejetons toute forme de soutien direct ou indirect aux gouvernements capitalistes. Le prédécesseur du SEP, la Ligue communiste révolutionnaire a été fondée en 1968 en tant que section du Comité international de la Quatrième Internationale en opposition directe à la répudiation par le LSSP de l’internationalisme socialiste et de la politique de classe indépendante, piliers de la lutte pour le pouvoir des travailleurs.

Dans ce qui s’est avéré être la dernière déclaration politique publiée sous la direction de Wije, seulement sept jours avant sa mort, le Parti de l’égalité socialiste a déclaré:

Nous lançons un appel spécial aux travailleurs en Inde et dans toute l’Asie du Sud, ainsi qu’au niveau international, pour une lutte commune en faveur d’un avenir socialiste pour l’humanité. Nous appelons les travailleurs et les jeunes militants du Sri Lanka à rejoindre le SEP et à prendre leur place dans la lutte révolutionnaire pour l’internationalisme socialiste.

Comme il est approprié que camarade Wije ait conclu sa longue vie par un puissant appel à «la lutte révolutionnaire pour l’internationalisme socialiste».

Camarade Wije Dias est mort en pleine lutte, soutenant dans sa vieillesse, et avec une passion intacte, les idéaux de sa jeunesse. Son héritage – courage, engagement envers les principes trotskistes et dévouement au socialisme – sera un exemple inspirant pour la classe ouvrière dans les grandes batailles de classe qui décideront du sort de l’humanité.

Que Wije Dias vive dans nos mémoires!

Vive le Parti de l’égalité socialiste au Sri Lanka!

Vive le Comité international de la Quatrième Internationale!

David North

(Article paru en anglais le 1er août 2022)

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Des milliers de personnes rendent hommage à Wije Dias, vétéran trotskiste sri-lankais, lors de ses funérailles - World Socialist Web Site (wsws.org)

Des milliers de personnes rendent hommage à Wije Dias, vétéran trotskiste sri-lankais, lors de ses funérailles

Samedi, près d’un millier de membres de la famille, de camarades et de sympathisants se sont rassemblés au cimetière de Borella à Colombo, en provenance de toutes les régions du pays, pour rendre un dernier hommage au défunt camarade Wije Dias, président du Parti de l’égalité socialiste (SEP), la section sri-lankaise du Comité international de la Quatrième Internationale (CIQI).

Les porteurs du cercueil de camarade Wije Dias [Photo: WSWS] [Photo: WSWS]

Le cercueil contenant la dépouille de Wije a été transporté au cimetière par un cortège solennel de 500 personnes, dont des membres du SEP et des sympathisants, qui ont parcouru les deux kilomètres depuis le salon funéraire. L’Internationale a été jouée tout au long de la marche.

Wije Dias est décédé le matin du 27 juillet d’une violente crise cardiaque, juste un mois avant son 81e anniversaire. Sa dépouille est restée au Jayaratne Respect Home à Borella, Colombo, depuis jeudi matin pour ceux qui souhaitaient lui rendre un dernier hommage.

Il était un membre fondateur de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR), le prédécesseur du SEP. Après le décès prématuré de Keerthi Balasuriya, le secrétaire général fondateur de la LRC, en décembre 1987, Wije a assumé la responsabilité de secrétaire général jusqu’en mai dernier, lorsqu’il a été élu au nouveau poste de président du parti.

Pendant trois jours, près de 2000 personnes de toutes les parties de l’île sont venues rendre hommage, notamment des membres du SEP, des sympathisants, des membres de la famille, des artistes, des intellectuels, des travailleurs et des étudiants. Des groupes du nord et du sud ainsi que des districts de la plantation centrale se sont rendus aux funérailles malgré les graves perturbations des transports causées par une grave pénurie de carburant.

Une partie du cortège funéraire [Photo: WSWS] [Photo: WSWS]

La mort du camarade Wije et ses funérailles ont été rapportées avec des photos sur plusieurs chaînes de télévision privées et d’État dans leurs journaux télévisés aux heures de grande écoute avec de brefs commentaires sur le rôle politique de Wije. Les principaux journaux en cinghalais, tamoul et anglais ont également publié des reportages importants qui faisaient tous référence à Dias comme un combattant intransigeant qui a consacré sa vie d’adulte au trotskisme, et mentionnaient le SEP et sa relation avec le CIQI.

Le Daily Mirror, un journal anglophone largement diffusé, a titré son rapport «Legendary Trotskyist Wije Dias no more». Le Sri Lanka Mirrora déclaré: «L’icône trotskiste sri-lankaise décédée».

Le cortège funéraire mené par des membres du parti vêtus de rouge a attiré l’attention de nombreuses personnes sur le bord des routes. Une bannière à l’avant du cortège affichait sa photo avec l’inscription 'Notre salut révolutionnaire au camarade Wije Dias, président du SEP, la section sri-lankaise du CIQI'. Les membres des comités d’action pour la santé, l’éducation et les plantations portaient des banderoles avec des messages de condoléances.

L’ensemble des funérailles a été retransmis en direct sur la page Facebook du SEP qui a eu une audience de près de 1000 personnes, notamment des États-Unis, d’Europe, d’Australie, d’Inde, du Moyen-Orient et de plusieurs autres pays. Jusqu’à présent, plus de 3000 personnes ont regardé la vidéo et près de 450 personnes l’ont partagée. De nombreuses personnes, dont des membres des partis frères du SEP, ont commenté, ajoutant leurs messages de condoléances et de salut révolutionnaire.

K. Ratnayake, membre de longue date du SEP, rédacteur national du WSWS sri-lankais et camarade très proche de Dias, a présidé la réunion. En ouverture, il a fait référence à la fondation de la LCR en 1968 à la suite de la trahison par le Lanka Sama Samaja Party (LSSP) des principes de l’internationalisme socialiste lorsqu’il est entré dans le gouvernement de coalition bourgeois du premier ministre Sirima Bandaranaike en 1964.

«Quand on regarde la période autour de 1968, ce n’était pas une période très facile politiquement. La vague de la politique de coalition réactionnaire et sans issue – le socialisme par la voie parlementaire – se répandait. À cette époque, le maoïsme, le castrisme, le guévarisme et la lutte armée étaient la mode politique au niveau international. Le marxisme et le rôle révolutionnaire de la classe ouvrière étaient rejetés. Ces idéologies ont trouvé un écho au Sri Lanka. Keerthi, Wije et d’autres camarades qui ont fondé la LCR en 1968 ont rejeté ces théories anti-marxistes et ont fondé le parti sur le trotskisme, la continuation du marxisme, qui n’était défendu que par le Comité international.»

Ratnayake a déclaré que la mort de Wije était une grande perte pour la section sri-lankaise ainsi que pour le CIQI, ajoutant: «Mais nous nous engageons à l’honorer en luttant sans relâche pour la perspective trotskiste à laquelle il a consacré toute sa vie.» Il a expliqué que Wije a vu les luttes des travailleurs, de la jeunesse et des opprimés au Sri Lanka au cours des trois derniers mois avec beaucoup d’optimisme et qu’il s’est engagé jusqu’à la dernière minute de sa vie pour armer et diriger politiquement le SEP au milieu de ces développements.

K. Ratnayake, rédacteur national de la WSWS au Sri Lanka [Photo : WSWS]. [Photo: WSWS]

David North, président du SEP américain et du comité de rédaction international du WSWS, s’est adressé à l’assemblée via Internet. Il a commencé par exprimer son regret de ne pas pouvoir être présent à Colombo lors de l’enterrement du camarade Wije. Tous ceux qui sont réunis aux funérailles de Dias, a dit North, «sont conscients qu’ils sont en présence de l’histoire.» Il poursuit: «On peut déclarer sans équivoque que Wije Dias a joué un rôle monumental, pendant soixante ans, dans la lutte pour la construction du mouvement trotskiste.»

North a déclaré que Wije et un cadre remarquable de jeunes trotskystes, dirigé par Keerthi Balasuriya, ont dû «nager à contre-courant» pour fonder la LRC. Mais Wije, Keerthi et leurs camarades, a dit North, «l’ont fait avec une confiance inébranlable dans le pouvoir de la vérité historique, la justesse de la perspective et du programme de la Quatrième Internationale, et le rôle révolutionnaire de la classe ouvrière au Sri Lanka et dans le monde entier.»

Le texte complet de l’hommage de David North est publié ici.

Vilani Peiris, membre du comité politique du SEP, a décrit le rôle crucial joué par Dias dans la formation de la LCR. Elle a expliqué que Dias, aux côtés de Keerthi Balasuriya, s’est brillamment inspiré de l’orientation politique et de l’intervention décisive du CIQI, qui a expliqué que la racine de la grande trahison du LSSP ne se trouvait pas au niveau national, mais international dans le révisionnisme pabliste.

Saman Gunadasa, secrétaire adjoint du SEP, a expliqué que le camarade Wije avait travaillé avec beaucoup d’enthousiasme pour préparer le parti à la lutte des classes qui se développe actuellement au Sri Lanka. Il a rendu hommage aux efforts inlassables de Wije dans ses derniers jours: sa participation active au troisième congrès national du SEP au Sri Lanka et son étroite collaboration avec le CIQI pour produire la dernière déclaration décisive du SEP intitulée «Pour un congrès démocratique et socialiste des travailleurs et des masses rurales». Saman a conclu son discours en promettant que le parti poursuivrait la lutte pour la Quatrième Internationale, comme Wije l’avait fait et l’aurait souhaité.

S’exprimant en tamoul, M. Thevarajah, membre du comité politique du SEP, a déclaré: «J’ai rencontré Wije à Jaffna en 1976, juste deux mois après avoir rejoint le parti. Il était venu là pour suivre des cours théoriques sur le livre de Lénine 'What Is to Be Done'. Il insistait sur le fait que la classe ouvrière était la seule classe révolutionnaire et que la conscience socialiste ne pouvait être fournie que par un parti révolutionnaire. Il insistait sur le rôle du parti marxiste pour la victoire de la révolution socialiste. Après 45 ans, nous pouvons voir à quel point cela a été justifié...

M. Thevarajah

«Au milieu des nombreuses tendances nationalistes, le camarade Wije, avec les jeunes camarades déterminés de la LCR dirigés par Keerthi, a fermement lutté pour les politiques internationalistes basées sur la compréhension que la classe ouvrière est la classe révolutionnaire internationale. Nous devrions apprendre de la vie du camarade Wije et nous consacrer à porter la classe ouvrière au pouvoir.»

Janarthi, la petite-fille de Wije âgée de douze ans, s’est adressée à l’assemblée au nom de sa famille. Elle a déclaré que son grand-père était une personne extraordinaire qui se souciait constamment d’elle et que ce que tout le monde avait dit de lui l’avait inspirée à être aussi déterminée que lui. «Tout au long de ses efforts pour faire une révolution ouvrière, il a toujours trouvé du temps pour sa famille et du temps pour moi», a-t-elle déclaré. Au nom de la famille, elle a remercié tous ceux qui ont participé à l’événement.

Kapila Fernando, membre du comité politique du SEP et responsable des Étudiants et jeunes internationalistes pour l’égalité sociale, a déclaré: «Il faut mentionner en particulier que tous les camarades du mouvement de jeunesse ont reçu d’immenses conseils de la part du camarade Wije pour organiser des réunions publiques et pour écrire des articles pour le WSWS sur les attaques contre l’éducation publique, le chômage des jeunes et d’autres questions culturelles.» Dans certains cas, il a écrit lui-même les analyses nécessaires au développement du mouvement de la jeunesse, en s’appuyant sur ses vastes connaissances et son acuité politique.

Kapila rappelle que Wije a été arrêté en 1986, alors qu’il prenait la parole lors d’une réunion à Chilaw pour défendre l’éducation gratuite. Il a été maintenu en prison pendant six semaines, avec deux autres membres du parti, par la police, dans le cadre de la répression déclenchée par le régime du Parti national uni (UNP) de l’époque.

«Nous tous, membres du mouvement de jeunesse, avons considéré comme un grand privilège de travailler avec lui», a-t-il déclaré.

Secrétaire général du SEP Deepal Jayasekara [Photo: WSWS] [Photo: WSWS]

Deepal Jayasekara, secrétaire général du SEP, a prononcé les remarques finales. Il a déclaré qu’en commençant par la lutte contre la trahison de la LSSP, l’engagement du camarade Wije envers les principes de l’internationalisme socialiste trotskiste est resté ininterrompu tout au long de sa vie politique. «Au milieu de toutes les difficultés auxquelles notre parti a été confronté en tant que LCR de 1968 à 1996, et depuis lors en tant que SEP au Sri Lanka et dans le monde entier en raison de la nature néfaste de la domination de la classe capitaliste, il a lutté pour ces principes sans hésitation et avec un courage indomptable.»

Expliquant le caractère décisif du leadership de Wije dans l’avancement de la lutte du SEP pour construire l’unité de la classe ouvrière cinghalaise et tamoule, Jayasekara a dit: «Le camarade Wije s’est engagé très fermement dans la lutte pour unifier la classe ouvrière contre le chauvinisme cinghalais du gouvernement de Colombo, ainsi que le séparatisme tamoul des LTTE…

«Nous accorderons au camarade Wije le respect qu’il mérite en construisant le SEP en tant que parti révolutionnaire de masse au Sri Lanka et le CIQI au niveau international et en faisant avancer l’internationalisme socialiste auquel il aura consacré toute sa vie d’adulte.»

Le rassemblement funéraire s’est terminé par le chant de l’Internationale [Photo: WSWS]

(Article paru en anglais le 1eraoût 2022)