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L’extrême droite aux portes du pouvoir en Italie
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L’extrême droite aux portes du pouvoir en Italie – CONTRETEMPS
En tête des sondages pour les élections générales de septembre, Giorgia Meloni cherche à dissimuler les liens de son parti – Fratelli d’Italia – avec le fascisme historique. Pourtant, sa politique reste fondée sur l’ethnonationalisme, l’anticommunisme et le rejet des valeurs des Lumières.
Giorgia Meloni a proposé son nom pour devenir la prochaine Première ministre italienne, si sa coalition obtient la majorité lors des élections qui auront lieu dans quelques semaines – et à en juger par les sondages actuels, elle est pratiquement assurée d’y parvenir. La coalition dite de « centre-droit » formée par son parti Fratelli d’Italia, la Lega de Matteo Salvini et Forza Italia de Silvio Berlusconi devrait obtenir 45 à 47 % des voix lors du scrutin du 25 septembre, le parti de Mme Meloni recueillant environ la moitié de ce total. Compte tenu du système électoral italien, un tel résultat donnerait à cette coalition une nette majorité de sièges.
De l’autre côté du champ politique italien, on a assisté à l’échec retentissant de la tentative du Parti démocrate (PD), mené par Enrico Letta, de construire une large coalition de centre-gauche. Elle est au contraire fragmentée en plusieurs formations rivales. Au centre, on trouve une alliance entre deux partis ultra-néolibéraux (Italia Viva de Matteo Renzi et Azione de Carlo Calenda), qui insistent sur leur soutien aux politiques du gouvernement sortant du technocrate Mario Draghi. Du côté de la gauche libérale et pro-OTAN, les Démocrates de Letta n’ont réussi à obtenir le soutien que de quelques forces mineures, aux orientations contradictoires. L’éclectique Mouvement 5 étoiles (M5S), rompant le pacte qui l’unissait aux Démocrates, a refusé une entente avec les autres forces. La gauche radicale, qui n’est pas parvenu à intégrer le parlement en 2018, s’est plutôt réorganisée au sein de l’Unione Popolare, dirigée par l’ancien maire de Naples Luigi de Magistris.
Dans cette situation où Fratelli d’Italia a de grandes chances de diriger le prochain gouvernement, l’organisation avance dans deux directions tactiques. Premièrement, elle a donné la priorité à la question de la candidature de Meloni à la tête d’un éventuel gouvernement de droite. L’objectif est de vanter sa légitimité populaire et d’éviter les manœuvres post-électorales des alliés qui chercheraient à imposer une autre figure sans lien avec les différents partis. Ensuite, elle tente de présenter un profil rassurant de parti fondamentalement pro-système.
Les conservateurs européens ?
La formation de Meloni a été créée en 2012, mettant en avant sa continuité avec le courant néofasciste incarné pendant quatre décennies par le Movimento Sociale Italiano (MSI) avant sa transformation dans les années 1990 en Alleanza Nazionale. Trouvant ses racines dans un MSI qui était à la fois sentimentalement et idéologiquement lié à vingt ans de régime fasciste, la question de la nature de Fratelli d’Italia n’a cessé de se poser ces dernières années. Cette attention s’est particulièrement accrue depuis qu’il est passé d’une force marginale à ce que les sondages considèrent comme le premier parti d’Italie.
La semaine dernière, Meloni a produit une vidéo en plusieurs langues pour rejeter l’étiquette fasciste ou néofasciste. Cependant, la question de la continuité ou de la rupture avec le fascisme historique n’est pas aussi simple qu’elle est généralement présentée, que ce soit par ceux qui présentent de manière simpliste une continuité avec le passé ou par ceux qui la nient complètement.
Fratelli d’Italia se présente aujourd’hui comme un parti « conservateur », vantant à cet effet la présidence de Meloni au sein du parti continental des Conservateurs et Réformistes Européens (ECR). Cette formation, qui regroupe diverses forces à l’intérieur et à l’extérieur de l’Union européenne, et s’aligne sur le groupe correspondant au Parlement européen, est née d’une initiative des conservateurs britanniques et du parti polonais Droit et Justice (PiS) au pouvoir. Avec la sortie de la Grande-Bretagne de l’UE, les conservateurs ont pris du recul mais maintiennent toujours une relation de collaboration. Les partis officiellement liés à l’ECR en dehors de l’Europe comprennent les Républicains états-uniens et le Likoud d’Israël.
D’un point de vue idéologique, l’objectif poursuivi par Meloni n’est pas de nier la continuité avec la droite néofasciste d’après-guerre, mais plutôt de l’insérer dans un courant plus large qui jouit d’une plus grande légitimité pour gouverner un pays d’Europe occidentale. Le fascisme historique est « relégué dans le passé » et certains de ses aspects, qu’il serait difficile de reproduire dans le présent, sont condamnés. Mais d’autres références idéologiques fondamentales sont conservées.
Tradition anti-Lumières
Dans ses Thèses de Trieste – approuvées lors du deuxième congrès du parti en décembre 2017 et toujours considérées comme son manifeste de référence – l’activité du parti est placée dans le contexte d’une bataille idéologique de longue haleine qui remonte au moins à la Révolution française :
« Notre civilisation, écrit Fratelli d’Italia, est désormais attaquée dans ses structures constitutives par une attaque concentrique, menée au nom de la lutte contre les préjugés, avec le même schéma idéologique que les Lumières ont inauguré pour la première fois dans leur croisade, au nom de la raison, contre l’autorité de la tradition ».
Et ce que l’on reproche le plus aux Lumières, c’est précisément de hisser la raison au-dessus de la tradition. Les partisans de la « société ouverte », lit-on, veulent imposer « des politiques sociales et culturelles qui, au nom du progrès, cherchent à déraciner les fondements du modèle de civilisation que les peuples européens ont créé pendant des millénaires« . L’affrontement oppose donc les Lumières, la raison et le progrès à une identité issue de la tradition et devant s’incarner dans l’autorité.
Benito Mussolini lui-même (pourtant idéologiquement éclectique quand cela l’arrangeait) se vantait que le fascisme s’opposait aux « principes français de 1789 ». C’est dans ce cadre que s’inscrit l’ensemble des valeurs de Fratelli d’Italia. Il en découle, avant tout, un nationalisme à caractère ethnique. La rhétorique patriotique, fortement présente dans la propagande d’une organisation qui s’est définie comme le « mouvement des patriotes », se fonde sur la nation comme « organisme vivant ».
Pour l’extrême droite, la Première Guerre mondiale est un moment primordial dans la formation historique de l’identité italienne. Elle est perçue comme une continuation du Risorgimento, d’où est né l’État unitaire italien. L’ensemble des événements menant de la défaite militaire de Caporetto (automne 1917) à la victoire sur les puissances centrales à Vittorio Veneto en octobre 1918 sont exaltés comme le véritable creuset de l’identité nationale. La sacralisation de la guerre et le culte des morts (du seul côté italien, bien sûr) sont considérés comme essentiels à la construction d’une identité nationale qui doit être défendue contre les éléments corrosifs.
L’anticommunisme
Il s’agit d’une représentation qui se nourrit davantage de mythologies que de reconstitutions historiques authentiques. Mais l’exaltation de la Première Guerre mondiale est également jugée implicitement nécessaire pour dissimuler autant que possible la Deuxième Guerre mondiale, qui a vu les forces libérales et communistes s’aligner contre le bloc nazi-fasciste. Il s’agit également d’une tentative d’effacer la Résistance et le mouvement partisan comme référence idéale de l’Italie démocratique.
Le communisme continue d’être considéré comme un ennemi absolu car il est présenté comme la conclusion la plus extrême de certaines idées des Lumières, dont l’internationalisme. L’idée même de conflit social, inhérente à la perspective de la lutte des classes, est considérée comme destructrice de l’identité nationale.
Alors que le nationalisme ethnique, dans lequel les identités nationales sont figées dans le temps et incapables d’évoluer et de changer, est ouvertement affiché, une conception hiérarchique des relations sociales demeure comme un courant sous-jacent. L’idée que l’égalité est une aspiration à laquelle il faut tendre (elle figure d’ailleurs parmi les valeurs constitutionnelles de la République italienne créée en 1946) est également considérée comme faisant partie de l’héritage des idées révolutionnaires qui s’opposent à la « tradition ». Cette vision hiérarchique se combine dans Fratelli d’Italia avec des références à Margaret Thatcher et Ronald Reagan, dont le néolibéralisme inspire la vision économique du parti.
Pendant des décennies, le MSI néofasciste a été divisé entre différentes visions économiques. Il y avait des partisans du corporatisme et des « socialisateurs », inspirés par les proclamations démagogiques de la République de Salò de 1943-45 (dirigée nominalement par Mussolini mais subordonnée à tous égards à l’occupant nazi). Pourtant, ces questions économiques ont été largement mises de côté dès sa transformation en Alleanza Nazionale, sous la direction de Gianfranco Fini.
La vision néolibérale établie depuis le début des années 1980 dans les principaux pays capitalistes, avec sa composante de darwinisme social, s’est avérée acceptable et compatible avec l’idéologie des héritiers du MSI, car elle accepte comme inévitables les différences de pouvoir, de richesse et d’autorité entre les individus. Cependant, ces différences ne sont plus déterminées de manière rigide par une structure sociale fixe et immuable, mais résultent plutôt de la concurrence entre les individus, qui se déroule principalement sur le terrain économique.
La condamnation de certains aspects du fascisme, réaffirmée par Meloni au début de la campagne électorale, n’est pas entièrement nouvelle, car des formulations similaires avaient déjà été introduites par Fini, et même par son leader historique Giorgio Almirante, bien qu’en alternance avec des revendications explicites d’adhésion au fascisme. Cette condamnation n’exclut pas la continuité avec le cadre idéologique (ethnonationalisme, darwinisme social, anticommunisme) dans lequel s’insère le fascisme historique.
Fratelli d’Italia continue, dans une certaine mesure, à appliquer le même principe qui a guidé l’un des premiers dirigeants de l’ancien MSI, Augusto De Marsanich, selon lequel il promettait de « ne pas restaurer » (la dictature fasciste), mais aussi de « ne pas désavouer » le régime comme faisant partie de l’héritage historique de la droite italienne. La condamnation de certains éléments peu recommandables du fascisme ne se transforme pas pour autant en engagement antifasciste. Dans les médias proches de Fratelli d’Italia, la Résistance partisane contre le nazi-fascisme pendant la Seconde Guerre mondiale continue d’être présentée uniquement comme responsable d’actions criminelles et anti-nationales.
Pro-système
Le numéro d’équilibriste de Meloni consiste donc à revendiquer la continuité avec la droite néofasciste tout en se faisant accepter comme une force politique pro-système. Les éléments de base du paradigme dominant sont au nombre de deux : 1/ l’engagement envers le bloc occidental articulé autour de l’OTAN ; 2/ la défense de la primauté des entreprises sur le travail.
Sur le premier point, Fratelli d’Italia a fourni les garanties les plus larges. Le MSI, après une phase initiale d’incertitude, s’est rangé du côté du bloc atlantique, favorisant l’adhésion à la croisade idéologique anticommuniste par rapport aux discours d’autres éléments d’extrême-droite sur une « troisième » force séparée des États-Unis et de l’URSS. Le parti de Meloni a été favorable, dès le début, au soutien militaire à l’Ukraine dans son conflit avec la Russie. Il a ouvertement préconisé l’envoi d’armes offensives et pas seulement défensives, soutenant ainsi l’alignement du gouvernement Draghi sur la politique de l’administration Biden.
Au fil des ans, les déclarations faisant l’éloge de la politique de Vladimir Poutine (principalement en ce qui concerne sa « bataille culturelle » et son opposition à une supposée « dictature LGBTQ ») ou sa sympathie pour le Hongrois Viktor Orbán n’ont pas manqué. Mais c’est avec la droite polonaise que que Fratelli d’Italia a construit sa principale alliance. Les diverses formations de la droite radicale européenne n’ont jamais été en mesure de trouver un terrain d’organisation commun, bien qu’elles convergent sur de nombreuses questions idéologiques et programmatiques, précisément en raison de leurs attitudes différentes à l’égard de la Russie.
Pour des raisons historiques et géopolitiques, une partie de la droite a toujours adopté des positions fortement hostiles à la Russie tout en exprimant une vision idéologique à bien des égards similaire à celle de Poutine. Grâce aux manœuvres de Fratelli d’Italia, l’ensemble de la coalition de droite italienne s’est clairement positionnée en faveur de l’élargissement de l’OTAN, du soutien militaire à Kiev et des sanctions contre la Russie.
Sur le plan économique, l’adhésion de Fratelli d’Italia au paradigme néolibéral va de pair avec le soutien à l’équilibre budgétaire comme contrainte de l’action gouvernementale. Suppression du « revenu citoyen » (un ensemble d’allocations pour les demandeurs d’emploi introduites en 2019) ; réduction des impôts en assouplissant le principe de l’imposition progressive ; soutien aux infrastructures par le biais de « grands projets » ; et interventions sur les questions environnementales strictement subordonnées à l’intérêt économique. De ce point de vue, la politique économique de Fratelli d’Italia peut être considérée comme moins populiste non seulement que celle défendue par le Mouvement 5 étoiles, mais aussi que celles de la Lega de Salvini et de Forza Italia.
Pour Meloni et son parti, la question non résolue de la relation avec l’Union européenne demeure. La première préoccupation est d’assurer à ses concitoyens que les fonds du Plan national de relance et de résilience (PNRR), alloués à l’Italie par la Commission européenne à Bruxelles, continueront à arriver comme prévu. Au moment où le gouvernement alors dirigé par Giuseppe Conte (Cinq étoiles) négociait ce Plan, Mme Meloni a tenté de s’opposer à la demande de financement européen en évoquant plutôt l’utilisation possible des droits de tirage spéciaux fournis par le Fonds monétaire international. Cette proposition a été jugée bizarre par de nombreux économistes.
Bien que le parti ait exclu les perspectives d’Italexit ou d’abandon de l’euro, il reste fortement hostile à un développement fédéraliste de l’UE. Dans certains discours, Mme Meloni a comparé l’UE à l’URSS, comprise comme une cage qui opprime ses États membres. Elle propose une Europe organisée comme une confédération d’États souverains, mais préconise en même temps son développement en tant que « marché libre », suivant une perspective qui a caractérisé la présence britannique dans l’UE dans les versions de Thatcher et de Tony Blair.
Le programme électoral adopté par la droite à l’approche des élections du 25 septembre évite de faire des propositions particulièrement conflictuelles et utilise des formules plutôt vagues. Il déclare que l’Italie confirme sa « pleine adhésion au processus d’intégration européenne » mais en se concentrant sur une Union « plus politique et moins bureaucratique ». Toutefois, elle souhaite également que cette Europe réaffirme son identité « judéo-chrétienne ».
Dans son livre Io Sono Giorgia (« Je suis Giorgia »), la leader de Fratelli d’Italia affirme une idée de l’Europe qui n’est pas liée au dépassement des nationalismes qui ont produit les deux guerres mondiales, mais plutôt à la guerre comme marqueur d’identité. Il s’agit de la bataille de Poitiers en 732, qui a arrêté la « marée islamique », de la défense de Constantinople par Constantin XI, et de la bataille de Lépante en 1571, qui a réussi à « arrêter l’avancée turque ». Comme pour la bataille italienne de Caporetto en 1917, c’est toujours la guerre, le conflit qui se termine par la suppression physique de l’ennemi, qui alimente les fantasmes guerriers du « soldat Meloni » (une auto-définition qui clôt son autobiographie).
Un acte d’équilibre
Il convient de souligner que l’extrême droite italienne se trouve prise dans un certain nombre d’équilibres politico-idéologiques. Ayant toujours pris le parti de l’opposition à tous les gouvernements successifs depuis sa création fin 2012, Fratelli d’Italia a bénéficié de l’instabilité permanente du système politique italien. Il a notamment pu rassembler des soutiens grâce à la crise de ses deux alliés. D’abord Forza Italia s’est effondré avec le déclin du leadership de Berlusconi, puis avec la montée rapide, suivie d’un déclin tout aussi rapide, de la popularité de Salvini.
La droite italienne, grâce à son articulation entre des partis porteurs d’identités distinctes et de leaderships forts, a pu maintenir son large réservoir de soutien qui s’est presque toujours situé entre 45 et 50 % de l’électorat. Seule la montée du Mouvement 5 étoiles au cours des années 2010 a été en mesure de dépouiller une part importante des électeurs de droite, mais ils sont rapidement revenus, notamment grâce à la communication populiste du leader de la Lega, Salvini.
Quant au centre-gauche, les deux stratégies poursuivies par le Parti démocrate depuis sa formation en 2007 ont échoué. Il avait fait le pari de devenir une force capable d’intercepter le soutien de tous ceux qui ne votent pas pour la droite, en éliminant tous les concurrents (la « vocation majoritaire » de Walter Veltroni, son premier leader). Il aspirait également à l’agrégation d’une coalition hétérogène de forces, dont les Démocrates conserveraient le leadership incontesté (le « large champ » de Letta, son leader actuel). Pourtant, face au succès de la droite, la seule alternative qu’elle peut offrir est une autre coalition technocratique, fondée non pas sur le soutien des électeurs mais plutôt sur une alchimie favorisée par le système électoral byzantin de l’Italie.
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Publié initialement dans Jacobin.